Quels sont les leviers RH pour améliorer la vie des cadres parents ?

Retour sur la dernière enquête de l’Apec « La parentalité chez les cadres : une conciliation sous tension, surtout pour les mères ».

Les leviers RH pour améliorer la vie des cadres parents enquête apec
Parmi les actions jugées importantes pour soutenir la parentalité en entreprise : une souplesse dans l'organisation du travail. © Apec, 2025

Une nouvelle enquête de l’Apec révèle que 37% des cadres parents d’enfants mineurs peinent à concilier vie professionnelle et vie personnelle, soit 10 points de plus que pour les autres cadres, et ce malgré des conditions de travail flexibles pour 84% des sondés. Car bien que la situation des cadres octroie une certaine forme de souplesse, elle génère également plus de pression professionnelle. Un défi majeur pour les services RH.

Des chiffres qui alertent

Parmi les résultats de cette enquête conduite auprès de 2005 cadres en emploi, notons que :

L’âge des enfants est au cœur des difficultés

45% des cadres avec au moins un enfant de moins de 6 ans peinent à équilibrer vie pro / vie perso, contre 41% pour ceux ayant des enfants de 6-10 ans, 36% de 11-14 ans et seulement 29% de 15-17 ans. On observe une division par deux du taux de tension entre la petite enfance et l’adolescence. La petite enfance constitue un pic dans les difficultés rencontrées par les cadres parents, période où l’autonomie limitée des enfants multiplie les contraintes organisationnelles.

Des sacrifices plus importants chez les cadres parents d’enfant mineur

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : près d’un cadre parent sur trois (28%) estime rater des opportunités professionnelles ou décliner des projets, contre seulement un sur cinq (21%) chez les autres cadres. Cette sur-représentation se retrouve dans le quotidien : 27% manquent ou écourtent des réunions versus 17% des cadres sans enfant mineur. Des renoncements « choisis » qui, cumulés, dessinent une parentalité qui coûte parfois cher aux trajectoires professionnelles.

Côté vie personnelle, là aussi, l’équilibre n’est pas stable. Sport, loisirs, sorties entre amis et même rendez-vous médicaux : autant d’aspects sacrifiés sur l’autel de la conciliation. 7 mères sur 10 et 6 pères sur 10 admettent ne plus s’accorder suffisamment de temps personnel. Cette privation individuelle alimente un cercle vicieux : moins de récupération, plus de stress, des performances dégradées… parfois jusqu’à l’épuisement.

Les femmes cadres plus impactées que les hommes cadres

L’enquête met en lumière une réalité persistante : la gestion des imprévus familiaux reste encore largement l’apanage des femmes :

  • 55% des mères cadres estiment que la gestion des tâches domestiques leur incombe essentiellement (vs 17% des pères) ;
  • 55% gèrent en grande partie les rendez-vous médicaux des enfants (vs 22% des pères) ;
  • 50% déclarent s’occuper le plus souvent de leur enfant malade (vs 18% des pères) ;
  • 42% prennent en charge les défaillances de garde (vs 21% des pères).

Cette situation pèse davantage sur leur organisation de travail et ainsi, leur évolution professionnelle. Mais plus inquiétant, ce déséquilibre les expose à des risques importants pour leur santé mentale. Elles sont 62% à ressentir de l’épuisement professionnel, contre 53% des pères.

RH : quels sont vos leviers d’action ?

Alors que 83% des cadres parents se sentent compris par leur hiérarchie, l’écoute et la tolérance ne semblent plus suffire. Mais à quel endroit les RH peuvent-ils intervenir ?

Repenser les mesures d’accompagnement

Parmi les mesures possibles, si la souplesse organisationnelle reste plébiscitée (49%), les cadres dessinent un véritable « package parentalité ». Leur hiérarchie des priorités révèle des attentes concrètes : autorisations d’absence spéciales en lien avec la parentalité (34%), règles pour favoriser l’équilibre vie pro / vie perso tel que le droit à la déconnexion (33%), soutien aux modes de garde (28%) ou encore allongement des congés légaux (22%). Un écosystème d’actions qui dépasse la seule souplesse des horaires pour repenser l’organisation du travail.

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Les leviers RH pour améliorer la vie des cadres parents © Apec, 2025

Sécuriser les parcours professionnels

Alors que 31% des cadres parents ont renoncé à changer d’entreprise en raison de leur parentalité et que 13% ont déjà refusé une promotion interne, comment les RH peuvent repenser leur approche de la gestion de carrière ?

Parmi les axes de travail envisageables :

  • Un accompagnement individualisé en retour de congé lié à la parentalité ;
  • Un bilan à N+1, N+2 et N+3 ;
  • La création de parcours « parentalité-compatible » avec des postes à fort télétravail et des possibilités de mobilité fonctionnelle sur des postes plus adaptés ;
  • Une sensibilisation aux biais liés à la parentalité, notamment pour les managers ;
  • La surveillance de KPI « parentalité »…

Normaliser l’implication paternelle

Parce que derrière les chiffres de conciliation se cache une réalité tenace, à savoir l’asymétrie des rôles parentaux, comment les RH peuvent-ils intervenir pour casser cette logique ? Car cette répartition inégale transforme bien souvent un imprévu familial en pénalité professionnelle pour les mères cadres, qui deviennent des « référentes urgences » par défaut.

Plusieurs leviers sont possibles :

  • Des communications actives sur l’égalité des droits parentaux ;
  • La formation des managers pour traiter ces sujets avec équité et les sensibiliser à leurs biais cognitifs ;
  • L’instauration d’un congé paternité allongé ;
  • La mise en place de jours de congé enfant-malade rémunérés et la surveillance de l’équilibre genré dans la prise de ces congés, pour intervenir sur cette question le cas échéant…

Assouplir les règles de télétravail pour les cadres parents de jeunes enfants

Dans un contexte où de plus en plus d’entreprises prônent le retour au bureau, les chiffres de cette enquête plaident pour une approche tout autre. Tandis que 67% des cadres parents télétravaillent régulièrement (vs 64% des autres cadres), ils sont aussi 73% à ajuster leurs horaires de travail pour des raisons personnelles (contre 64%) et 61% à retravailler tard le soir (contre 55%).

Aussi, le télétravail est utilisé de façon stratégique : 44% organisent leurs jours selon leurs contraintes familiales et leurs réunions professionnelles. Cette double optimisation révèle un télétravail « sur-mesure » qui va bien au-delà de la simple flexibilité.

Les autres critères – télétravail selon les tâches à accomplir (38%), coordination avec l’équipe (34%) – montrent une maturité dans l’usage qui bénéficie autant à l’efficacité qu’à l’équilibre personnel. Face à cette réalité, les entreprises qui imposent un retour généralisé au bureau risquent de pénaliser leurs talents parents, créant une fuite vers des organisations plus adaptées aux réalités familiales modernes.

Bien s’équiper pour bien recruter