Télétravail : comment en faire un levier d’égalité femmes-hommes

Si le télétravail semble avoir accru les inégalités professionnelles de genre, il est temps de l’envisager comme une opportunité en faveur de l’égalité hommes-femmes.

Le télétravail peut contribuer à réduire les inégalités professionnelles.
Le télétravail peut contribuer à réduire les inégalités professionnelles. © Вадим Пастух/stock adobe.com

Si on s’en tient aux nombreuses études publiées depuis le début de la pandémie, le télétravail a renforcé les inégalités de genre. En moyenne, seule une télétravailleuse sur quatre avait à sa disposition une pièce où elle pouvait s’isoler pour travailler, contre 41% des hommes, selon une enquête de l’Ined parue en 2020. Comme un écho lointain à Virginia Woolf, qui écrivait, il y a près de cent ans : « Une femme doit avoir de l’argent et une chambre à soi si elle souhaite pouvoir écrire des histoires. »

Les femmes, premières victimes d’un télétravail en mode dégradé

Le dernier rapport du centre francilien Hubertine Auclert, publié le 15 mars, ne vient que corroborer ce constat. Les femmes sont plus nombreuses que leurs homologues masculins à avoir vu leur temps de travail allongé, du fait du travail à distance (24% des télétravailleuses contre 20% des télétravailleurs). Dans le même temps, elles ont été plus nombreuses à s’occuper de leurs enfants en même temps qu’elles télétravaillaient (87% contre 76% des hommes).

Ces conditions dégradées de télétravail ont affecté davantage de femmes que d’hommes : dégradation de l’état de santé physique et psychique, hausse des violences conjugales, mais aussi des violences sexistes et sexuelles.

Pour nuancer ce tableau sombre, le centre Hubertine Auclert donne des clés pour envisager le télétravail comme un vecteur vers davantage d’égalité professionnelle femmes-hommes en permettant notamment aux femmes de reprendre la main sur leur emploi du temps, grâce à une nouvelle forme d’autonomie, ou de gommer les différences de trajectoires professionnelles, notamment celles liées à la maternité. Voici les principales mesures de cette boîte à outils.

9 leviers pour améliorer l’égalité hommes-femmes grâce au télétravail

Intégrer dans le DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels) les situations de télétravail et de travail hybride

Le rapport préconise de faire figurer les nouveaux risques physiques et psychosociaux liés à la pratique du télétravail ou du travail hybride dans le DUERP pour les prévenir plus efficacement.

Renforcer les dispositifs de lutte contre les violences sexistes et sexuelles au travail

Il met également en exergue l’importance de prendre en compte les nouvelles formes de cyberharcèlement et les cyberviolences sexistes et sexuelles mais aussi de renforcer l’arsenal de lutte contre les violences intrafamiliales et conjugales.

Articuler télétravail et égalité professionnelle lors des négociations collectives

Au cours des négociations sur le télétravail, l’égalité professionnelle doit servir de boussole pour définir les modalités de mise en œuvre de ce dernier. A cet égard, soyez attentifs à construire un cadre s’appliquant aussi bien aux femmes qu’aux hommes, sans pénaliser personne. Un cadre structurant mais offrant des marges de manœuvre pour s’adapter aux situations individuelles.

Se baser sur des indicateurs genrés d’utilisation du télétravail

Les auteurs préconisent de « se doter d’indicateurs statistiques genrés par catégorie professionnelle pour repérer d’éventuels déséquilibres révélateurs d’inégalités ». Des informations à compléter avec des données qualitatives, recueillies à l’occasion de groupes de parole ou des entretiens annuels.

Intégrer la question du télétravail aux négociations sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail

Le télétravail peut également être intégré aux discussions dans le cadre des négociations obligatoires sur l’égalité professionnelle, la rémunération et la qualité de vie au travail. Et ce, afin de vérifier qu’ilne renforce pas les inégalités existantes et n’est pas sur le point d’en créer de nouvelles.

Développer l’inclusion numérique et l’égal accès aux équipements pour travailler à distance

Autre sujet : la formation des télétravailleurs et des télétravailleuses, notamment ceux qui expérimentent pour la première fois ce mode de travail, aux outils numériques mobiles et l’égal accès de chacune et chacun à un matériel leur permettant d’exercer correctement leur métier à distance.

Assurer les conditions d’un travail hybride choisi et non subi

Le centre Hubertine Auclert recommande également de mettre tout en œuvre pour que les collaborateurs puissent choisir librement leur lieu de travail. Cela passe, entre autres, par des bureaux adaptés aux besoins réels des équipes (configuration des bureaux, salles de réunion, box individuels, espaces de convivialité…).

En second lieu, l’entreprise doit également ouvrir la porte à la possibilité de télétravailler depuis un autre espace que le domicile (coworking, tiers lieu, maison de vacances…), en particulier lorsque le domicile du salarié n’offre pas un environnement propice au travail.

Enfin, l’employeur doit s’assurer que le télétravailleur dispose de bonnes conditions de travail à son domicile et peut lui proposer une compensation financière à différents frais liés à l’électricité, à internet ou à l’équipement de bureau.

Rechercher de nouveaux équilibres de temps et de charge de travail

Rappelez régulièrement à vos collaborateurs les bonnes pratiques à adopter en matière de droit à la déconnexion. Les managers doivent, eux aussi, être sensibilisés aux risques de sur-connexion et à la détection des signaux de détresse dus à une charge de travail trop importante.

Accompagner le management

Les entreprises doivent former les managers aux nouvelles missions du management à distance, en attirant leur attention sur l’égalité hommes-femmes pour éviter toute discrimination en termes d’accès au télétravail.

Bien s’équiper pour bien recruter