Le « shadow AI », un usage risqué à transformer en opportunité
Le mot RH de la semaine. Jonathan Gozard, expert en recrutement au Mercato de l’Emploi, explique les enjeux pour les entreprises de connaître les usages de l’IA faits par leurs collaborateurs pour mieux les cadrer.

« Alors que les entreprises s’efforcent d’intégrer l’IA de manière structurée, un phénomène parallèle se développe discrètement mais sûrement : le shadow AI. Ce terme désigne l’usage solitaire de solutions d’IA par les collaborateurs, souvent à l’insu de leur direction ou des départements IT et RH. Cette pratique n’est pas sans conséquences… »
Une productivité accrue, mais…
« L’IA nous mâche le travail : pour rédiger des e-mails, user de chatbots pour optimiser les tâches ou d’applications pour résumer des documents. Si cette pratique est souvent motivée par un désir d’améliorer l’efficacité personnelle, elle pose de sérieux défis en matière de sécurité, de confidentialité et de conformité. Les collaborateurs se tournent vers le shadow AI pour combler des lacunes, gagner du temps et contourner les processus internes qui peuvent sembler lourds. Cette utilisation, bien que non officielle, témoigne de leur désir d’être plus productifs et de s’adapter rapidement à de nouvelles technologies. Cependant, cette liberté non contrôlée est une épée à double tranchant. »
… des risques significatifs
« Le principal risque concerne la sécurité des données. En utilisant des outils d’IA publics, les employés peuvent involontairement exposer des informations confidentielles ou des données clients. Une fois partagées avec des plateformes tierces, ces informations ne sont plus sous le contrôle de l’entreprise, ce qui expose l’organisation à des fuites de données, voire à des cyberattaques. En l’absence de directives claires, il est presque inévitable que des informations sensibles soient transmises à des modèles d’IA. De plus, le shadow AI peut entraîner des problèmes de conformité et de propriété intellectuelle. Les règles de l’entreprise concernant l’utilisation des données, la confidentialité et les droits d’auteur peuvent être facilement enfreintes. Par exemple, l’utilisation d’une IA pour générer du contenu peut involontairement produire des textes qui s’apparentent à des œuvres existantes, créant des risques de plagiat. Enfin, l’utilisation d’outils d’IA non approuvés peut créer des inégalités entre les employés et compromettre l’équité des processus. Si certains utilisent des outils pour accélérer leur travail, d’autres peuvent se retrouver désavantagés. »
Transformer ce risque en opportunité
« Plutôt que d’interdire purement et simplement le shadow AI, les entreprises doivent reconnaître son existence et le gérer de manière proactive. L’enjeu est de transformer cette tendance en une force positive. »
« Mettre en place des directives claires : l’entreprise doit établir une politique claire sur l’utilisation de l’IA. Ces directives doivent définir les types d’outils autorisés, les données qui peuvent ou ne peuvent pas être partagées, et les bonnes pratiques d’utilisation. »
« Sensibiliser et former les employés : il est essentiel d’éduquer les collaborateurs aux risques liés à la sécurité des données et à la confidentialité. Des sessions de formation peuvent les aider à comprendre les enjeux et à utiliser l’IA de manière responsable. »
« Encourager l’expérimentation encadrée : les entreprises peuvent créer des « espaces bac à sable » ou des programmes pilotes où les employés peuvent tester de nouvelles solutions d’IA en toute sécurité, en collaboration avec les équipes IT et RH. »
« Adopter une approche collaborative : le dialogue entre la direction, les équipes IT, les RH et les employés est crucial. En comprenant les besoins des collaborateurs, les entreprises peuvent mettre à leur disposition des outils d’IA sécurisés et performants qui répondent réellement à leurs attentes. »
« Le shadow AI est un signal d’alarme. Il révèle le besoin des employés d’avoir accès à des technologies qui les aident à être plus efficaces. En répondant à ce besoin de manière structurée et sécurisée, les entreprises peuvent non seulement réduire les risques, mais aussi cultiver une culture d’innovation et de responsabilité. »