Le « quiet hiring », ce recrutement qui ne dit pas son nom
Le mot RH de la semaine. Vous connaissez le « quiet quitting » ? Voici son pendant côté entreprise : le « quiet hiring », décrypté par Alexandra Loyatho, recruteuse au Mercato de l’Emploi.

« Miser sur des effectifs existants ou ponctuels plutôt que d’engager un nouveau recrutement face à un nouveau besoin, tel est le principe du quiet hiring ou « recrutement silencieux ». Cette stratégie alternative d’acquisition de talents utilisée par les entreprises pose question. En effet, élargir massivement les responsabilités d’un collaborateur en poste sans recourir à un nouveau recrutement n’est pas sans conséquences… »
Le recrutement « discret »
« Selon le cabinet de conseil McKinsey, d’ici 2030, un travailleur sur 16 dans le monde serait contraint de changer de métier, car son poste deviendra obsolète. En effet, le déficit imminent de compétences guette de nombreuses entreprises, notamment dans la tech. Face au besoin de compétences nouvelles (IA…), des employeurs choisissent d’attribuer un nouveau rôle à leurs propres salariés plutôt que de recruter à l’extérieur. Ce job enrichment peut être accueilli favorablement par les collaborateurs en vue d’élargir leurs compétences, mais certains ne sont pas favorables à cette idée.
Le « recrutement silencieux” peut revêtir 2 formes bien distinctes :
- Quiet hiring interne : attribuer de nouveaux rôles et responsabilités aux employés existants ;
- Quiet hiring externe : engager des sous-traitants ou des travailleurs temporaires. »
Comment le mettre en œuvre dans votre entreprise ?
- « Procédez à une Talent Review pour identifier les forces en présence et les opportunités de transformation des postes ;
- Formez les collaborateurs impliqués dans le processus de recrutement silencieux ;
- Veillez à la confidentialité des informations sur les nouvelles recrues potentielles. »
Les avantages du quiet hiring
- « Amélioration de la rétention et de l’engagement : offrir des opportunités de progression aux collaborateurs déjà en poste ;
- Réduction des coûts : économies sur les salaires et sur les frais de recrutement ;
- Gain de temps : cela permet de contourner parfois les longs processus de recrutement classiques ;
- Développement de l’employabilité : créer une main-d’œuvre plus polyvalente et adaptable. »
Les défis à relever et les points de vigilance
- « Risque de surcharge de travail et d’épuisement professionnel : demander aux talents existants d’assumer des responsabilités supplémentaires sans soutien adéquat peut entraîner du stress et du burn-out ;
- Inadéquation des compétences : les talents internes peuvent ne pas posséder les compétences exactes requises pour les nouveaux rôles ou projets, ce qui peut conduire à des sous-performances pour l’entreprise ;
- Manque de clarté et de direction : les talents peuvent se sentir incertains quant à l’évolution de leur carrière au sein de l’entreprise, surtout si les postes et les responsabilités changent fréquemment sans communication claire ;
- Problèmes d’intégration : l’intégration de freelances ou de contractuels dans les équipes existantes peut créer des frictions ou un manque de cohésion, surtout s’il y a des différences majeures dans les méthodes de travail ou de culture d’entreprise ;
- Absence de diversité : lorsqu’une entreprise n’embauche pas à l’extérieur, elle ne laisse pas la porte ouverte aux personnes issues d’horizons différents. Elle passe également à côté du “sang neuf” au cœur même de l’entreprise de façon pérenne. Elle peut se renfermer sur elle-même ;
- Compensation et reconnaissance inadéquates : assumer plus de responsabilités sans ajustement de rémunération peut entraîner de l’insatisfaction et un sentiment de sous-évaluation chez les employés ;
- Risques juridiques : les employeurs doivent rester vigilants quant aux exigences légales liées à cette pratique, notamment en matière d’égalité des chances et de modifications des contrats de travail ;
- Négligence de la planification à long terme : s’appuyer excessivement sur le quiet hiring peut amener les entreprises à négliger le développement d’un plan de recrutement stratégique, ce qui peut avoir un impact sur la capacité d’innovation et de croissance de l’organisation à long terme. »
« Le quiet hiring peut être une solution de facilité de court-terme pour répondre à un besoin patent de l’entreprise. Cela étant, différents risques ne sont donc pas à négliger (juridique, organisation, bien être au travail…). La question du recrutement externe sur un temps plus long peut alors se poser afin d’éviter de surcharger les collaborateurs déjà en poste et de préserver leur motivation et leur engagement. A chaque entreprise d’arbitrer ! »