Politique diversité & inclusion et marque employeur : comment les faire dialoguer ?

Comment valoriser sa politique D&I sans être accusé de diversity washing ?

L’articulation de la politique D&I et de la marque employeur était au cœur d’une table ronde organisée dans le cadre de l’Inclusiv’Day, le 10 avril 2024, à Paris.
L’articulation de la politique D&I et de la marque employeur était au cœur d’une table ronde organisée dans le cadre de l’Inclusiv’Day, le 10 avril 2024, à Paris. © HelloWork

Parce qu’elle en dit long sur l’ADN de l’entreprise, la politique diversité & inclusion (D&I) est un facteur de plus en plus important aux yeux des candidats et des collaborateurs. En témoigne une enquête BVA People Consulting/AFL Diversity selon laquelle 41% des salariés seraient prêts à démissionner si leur entreprise ne respectait ses promesses en matière de D&I, si elle discriminait un collaborateur ou en cas de désaccord avec les valeurs promues. D’où l’importance de déployer un répertoire d’actions RH efficaces et de bien communiquer sur celles-ci. Mais par où commencer ?

Pour Virginie Delalande, conférencière et fondatrice d’Handicapower, « il est nécessaire que les actions portent le mot et que politique D&I et marque employeur soient alignées ». « J’entends que certains collaborateurs puissent associer ces actions à une stratégie de com, à du make-up mais c’est beaucoup plus subtil que cela. C’est donc important de se montrer exemplaire, en interne, pour avoir des choses tangibles à valoriser à l’extérieur de l’entreprise », complète Lucie Liborio, responsable D&I chez France Médias Monde.

Le préalable : s’interroger sur qui l’on est

La première étape, pour Aurélie Laval, CEO de You Hand’Me, est que « le top management et toutes les parties prenantes de l’entreprise se posent cette question : que signifient la diversité et l’inclusion pour moi, à titre individuel, et pour notre entreprise, à titre collectif ? Qu’est-ce qui fait qu’une entreprise est unique ? C’est la somme de ses collaborateurs singuliers. On n’a pas besoin d’être en situation de handicap ou d’une autre couleur de peau pour être différent, unique. Si les personnes qui composent l’entreprise n’acceptent pas leur propre singularité, l’inclusion ne fonctionnera pas. Il faut donc commencer par se regarder soi-même pour ensuite accepter l’autre dans sa différence. »

Chez Apicil, cette réflexion est passée par la définition d’une raison d’être : « Par une relation proche et attentionnée, soutenir toutes les vies, toute la vie. » « C’est dans l’ADN du groupe d’inclure et de favoriser la singularité de toute nos parties prenantes. J’ai été recruté pour aller au-delà des sujets d’égalité professionnelle et de handicap, les premiers critères de discrimination sur lesquels l’entreprise a travaillé, témoigne Frédéric Faye, DRH du groupe. Avec le directeur général, il nous a paru important de considérer d’autres thèmes, huit au total, pour fédérer le personnel et démystifier certains mots. L’objectif ? Que l’ensemble des parties prenantes comprennent que nous sommes tous concernés par ces thématiques, de près ou de loin, un jour ou l’autre. »

Quelles traductions concrètes de votre politique D&I ?

Le conseil de Frédéric Faye : « Démarrer par un diagnostic en phase avec votre entreprise pour développer un plan d’action qui vous correspond plutôt que de chercher à faire comme les autres. Sinon vous risquez de vous faire rattraper par vos collaborateurs, et notamment les nouveaux, qui vous mettront face à vos contradictions : ‘’Sur le papier vous accueillez la diversité avec bienveillance, mais ma différence semble mal acceptée par mes collègues…’’ »

Lucie Liborio en est persuadée : la mise en place d’une stratégie diversité et inclusion « efficace, en cohérence avec vos valeurs » doit précéder la communication autour de la marque employeur. « Notre plan d’action D&I a été mis en place il y a cinq ans. On est partis d’une feuille presque blanche et on s’est fortement inspirés du cadre légal pour mettre en place un plan d’action handicap. On a ensuite exploré une bonne partie des 25 critères de discrimination, par silo, pour élargir notre spectre. »

Cette politique passe aussi par l’accompagnement de chaque collaborateur dans ses projets d’évolution professionnelle : « Le comité de direction est encore l’endroit où il y a le moins de diversité. Avoir de l’ambition, rêver devient possible si on a des exemples, des rôles-modèles auxquels d’identifier », souligne Virginie Delalande.

Comment en faire un argument de marque employeur ?

Cela passe d’abord par une communication interne des actions mises en place : « campagnes de sensibilisation, conférences, messages diffusés sur l’intranet », liste Virginie Delalande. Parler à toutes les diversités représente également un défi. « Ça peut être problématique de traiter les thèmes en silo, reconnaît la fondatrice d’Handicapower. Si on décide d’axer sa politique sur l’emploi des femmes, ceux qui ne sont pas concernés par la thématique de l’année auront l’impression qu’on ne s’occupe pas d’eux. Ayez toujours le petit mot qui fait que les autres types de diversité se sentent concernés : par exemple, si on met en place un entretien de retour de congé maternité ou paternité, on peut également instaurer un entretien de retour de longue absence liée à un handicap. »

Pour ensuite faire passer le message en dehors de l’entreprise, Lucie Liborio préconise de nommer, au sein de la DRH, une personne chargée de la communication RH : « Elle s’attache à valoriser les actions existantes à l’externe. Nous avons aussi remodelé notre site carrière pour qu’il soit la vitrine de nos engagements D&I. » De son côté, Apicil a lancé plusieurs campagnes de marketing RH « pour dire que seul le talent compte ».

« Le troisième niveau est de réussir à incarner ce supplément d’âme de la diversité, explique Virginie Delalande. En faisant en sorte que chaque collaborateur puisse mettre sa singularité au service des produits et des services que l’entreprise propose. C’est cette richesse qui vous permettra développer des produits et services inclusifs, qui s’adressent à toute la population de la planète. »

Une démarche d’amélioration continue

Enfin, il faut accepter que ces sujets prennent du temps pour arriver à maturité. « Dans une entreprise inclusive, mon poste n’existerait pas, souligne Lucie Liborio. Quand j’accompagne des managers sur des sessions de formation, je leur rappelle qu’on est encore éloigné de l’entreprise inclusive qu’on souhaiterait être. Ces sujets prennent du temps, demandent de l’énergie et de l’investissement. Il ne faut pas hésiter à faire appel à des cabinets, bien s’entourer et continuer à sensibiliser. Se poser sans cesse les mêmes questions : Comment être plus pertinent dans mes actions ? Dans mon plan de communication ? Quels KPIs prendre en compte ? En matière de politique D&I, la performance n’est pas un gros mot, ça reste l’objectif d’une entreprise ! »

Les salariés peuvent être associés à cette démarche d’amélioration continue via des sondages, des enquêtes : « Proposer régulièrement des baromètres permet de sonder l’état d’esprit des collaborateurs au sujet de votre politique D&I et d’identifier les potentiels écarts de perception face à l’action réellement engagée, estime Aurélie Laval. Il faut aussi en faire un sujet managérial et le remettre sur la table lors de certains échanges entre la direction et les managers. »

Découvrir le livre blanc « Diversité, inclusion et marque employeur : comment les faire dialoguer ? » de l’Association française des managers de la diversité

 

 

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