De recruteurs à recruteurs : les clés pour améliorer vos pratiques
IA, entretien structuré, KPI, sélection des candidats… Ce qu’on a retenu de la Non-conférence du recrutement, le 11 septembre 2025, à Paris.
Plus de 230 recruteurs et recruteuses se sont retrouvés, jeudi 11 septembre, à Paris, pour parler IA, entretien structuré, KPI de recrutement, transparence salariale ou encore évolution du métier de recruteur, à l’occasion de la 13e édition de la Non-conférence du recrutement, organisée par l’Ecole du recrutement. La rédaction d’Helloworkplace a pris part à ces échanges entre passionnés du recrutement. Et voici ce qu’on en a retenu !
L’IA générative : révolution ou évolution du métier de recruteur ?
L’intelligence artificielle a ouvert une nouvelle ère pour le recrutement. Elle s’impose désormais comme une compétence de base incontournable. Mais alors que les craintes d’être remplacé par la machine sont grandissantes et que les entreprises peinent encore à accompagner concrètement leurs recruteurs sur ce sujet, la question est-elle bien de savoir si l’IA va remplacer l’humain ? Ou si les recruteurs d’aujourd’hui seront encore motivés à exercer leur métier demain ? La réponse à cette deuxième question est oui, à condition de leur fournir un cadre clair et un accompagnement adapté.
Former et accompagner les équipes
L’une des clés pour réussir l’intégration de l’IA dans le recrutement réside dans la formation et l’accompagnement des recruteurs. Plutôt que de laisser chacun tester l’IA de façon isolée, les entreprises doivent se saisir du sujet et organiser des sessions de formation, d’échanges et de partage des bonnes pratiques. Cela vaut pour les recruteurs, mais aussi pour tous les métiers. Une telle approche favorisera une adoption harmonieuse et permettra de tirer pleinement parti des capacités de l’IA.
Cadrer son usage
Pour offrir de la transparence et sécuriser les usages, il convient de définir un cadre d’utilisation clair pour les collaborateurs. Cela passe notamment par trois questions fondamentales :
- Ce que l’on accepte de faire : définissez précisément les tâches que l’IA est censée accomplir, en garantissant la cohérence avec les valeurs de l’entreprise ;
- Ce que l’on refuse de faire : précisez ce que l’IA ne doit en aucun cas remplacer, notamment dans le domaine de la prise de décision ;
- Ce que la loi dit : assurez-vous de respecter les législations en vigueur, notamment l’IA Act, le règlement européen sur l’intelligence artificielle.
Rassurer les équipes face au changement
L’IA générative est un allié, non un concurrent. Aujourd’hui, le principal défi reste de rassurer les recruteurs. Elle n’est pas là pour les remplacer, mais pour les libérer des tâches répétitives, afin qu’ils puissent se concentrer sur ce qui fait leur valeur ajoutée : la qualité de l’échange avec les candidats lors de l’entretien, l’amélioration des score cards, l’accompagnement des managers, par exemple dans la phase de brief… « La valeur des recruteurs, c’est de générer de la confiance. C’est une chose que les IA ne pourront jamais nous enlever », insiste un recruteur.
Des offres d’emploi clivantes et transparentes
Dans l’assemblée, les recruteurs sont unanimes : les offres d’emploi doivent être clivantes, pour toucher rapidement la bonne cible. « La communication aseptisée, ça ne marche plus, surtout dans les métiers pénuriques », plaide une recruteuse. On ne le répètera jamais assez : les candidats attendent avant tout de la transparence de la part des recruteurs !
A côté des avantages qu’offre l’entreprise, il ne faut pas hésiter à présenter les difficultés du poste, par exemple en écrivant : « Si tu ne veux pas travailler le samedi, ne viens pas chez nous ». La bonne idée signée Burger King ? Détourner les mauvais avis Google (« 2h pour livrer ma commande, même ma grand-mère cuisine plus vite… ») au cœur d’une campagne de recrutement humoristique : « On recrute aussi des seniors. Quelles sont les coordonnées de votre grand-mère ? »

Entretien structuré : lever les freins des managers (et les vôtres)
L’entretien structuré est l’un des leviers pour améliorer la qualité des recrutements. Si certains sont déjà convaincus, des résistances persistent du côté des recruteurs comme des managers. Pourquoi ? Par manque de méthode, de temps, de préjugés ou par simple habitude.
Comprendre les résistances : d’un modèle au « feeling » à une méthode structurée
L’un des principaux freins à l’adoption de l’entretien structuré réside dans la perception qu’il est chronophage et qu’il manque de flexibilité. Managers et recruteurs jonglent déjà avec de multiples priorités et n’ont pas toujours le temps, la méthode ou même l’envie de s’investir dans un processus jugé trop rigide.
Il est important d’expliquer que l’entretien structuré n’est pas un processus déshumanisant, mais un cadre qui permet de comparer et d’évaluer les candidats de façon objective et équitable. Il permet d’éliminer les biais et de mieux sélectionner les talents qui correspondront aux besoins de l’entreprise.
Co-construire la méthode avec les managers
Pour surmonter cette résistance, impliquez les managers dès le brief initial. En vous appuyant à la fois sur leurs attentes vis-à-vis du profil recherché et sur leurs expériences passées – ce qui a fonctionné dans les recrutements antérieurs et ce qui l’a moins été -, vous pourrez définir ensemble les 4 ou 5 critères indispensables pour évaluer les candidats. Il vous sera ensuite possible de concevoir une trame de questions parfaitement alignées sur les besoins du poste. En impliquant les managers dès le départ, vous en faites des acteurs du processus, favorisant ainsi leur adhésion.
Appuyer le changement par des données concrètes
Les changements de pratiques nécessitent des preuves tangibles. Pour convaincre les plus réfractaires, vous pouvez fournir des arguments factuels et mesurables. Par exemple, l’entretien structuré permet d’évaluer plus précisément les soft skills d’un candidat, sa capacité à s’intégrer dans l’entreprise et à son équipe, ce qui influe directement sur la réussite de sa période d’essai et sa trajectoire de rétention à long terme.
En utilisant des KPI tels que la qualité d’intégration des nouveaux arrivants, le taux de validation des périodes d’essai ou encore la rétention, vous pourrez étayer vos arguments avec des données solides, en comparant les résultats obtenus grâce à un recrutement structuré et ceux d’un recrutement moins formalisé.
Quelques bonnes pratiques supplémentaires pour favoriser l’adhésion
- L’impulsion doit venir du top management : une telle évolution doit être portée par la direction. Lorsque l’adoption de l’entretien structuré est vue comme une priorité stratégique, les équipes sont plus enclines à s’y engager.
- La pédagogie est centrale : formez les recruteurs et les managers aux bénéfices de cette méthode. Donnez-leur les clés pour l’appliquer et montrez-leur en quoi elle peut faciliter leur travail, tout en garantissant des recrutements réussis.
- L’expérimentation progressive : ne forcez pas le changement du jour au lendemain. Testez d’abord l’entretien structuré sur un nombre restreint de postes, mesurez les résultats, ajustez et étendez ensuite cette méthode au reste des recrutements.
Sélection des candidats : la personnalité compte aussi !
Parole d’employeur : « On recrute pour les compétences et on licencie pour l’attitude. » Preuve s’il en est que le comportement du collaborateur est sans doute au moins aussi important que les compétences qu’il mobilise dans le cadre de son travail.
Or, si ces dernières s’évaluent relativement facilement lors d’un processus de recrutement, la personnalité est plus compliquée à déterminer en toute objectivité. Certes, il existe des tests de personnalité conçus à des fins de recrutement, mais les recruteurs s’accordent pour dire que rien ne vaut les mises en situation professionnelle ou les questions comportementales ou situationnelles, dans le cadre d’un entretien structuré, pour que se révèlent certaines facettes du caractère du candidat.
Pour l’un des recruteurs présents à la Non-conférence du recrutement, « impossible de découvrir la totalité de la personnalité du candidat en une heure d’entretien. Mais on peut déceler des traits de personnalité qui peuvent être intéressants pour le poste ». Ces traits de personnalité permettront au recruteur d’évaluer le culture fit à trois niveaux : avec l’entreprise, avec le manager et avec l’équipe.
Quelle place pour le recruteur dans l’entreprise d’aujourd’hui ?
Souvent perçu comme un « centre de coûts », le recrutement doit être repositionné comme un rouage essentiel à la réussite d’une entreprise. À une époque où l’on parle beaucoup de performance, il est important de repositionner le recruteur au cœur de cet écosystème, en rendant compte de sa véritable plus-value.
Comprendre le problème
Contrairement à d’autres fonctions, telles que la vente, la valeur ajoutée d’un recruteur est difficile à quantifier. Pourtant, son rôle dépasse largement la simple « fourniture de CV ». Un bon recruteur déniche des talents capables de performer et de contribuer directement au chiffre d’affaires de l’entreprise. Il s’agit de séduire, attirer et convaincre les talents les plus adaptés, tout en garantissant leur intégration et leur réussite à long terme.
Mesurer l’impact du recruteur
Prenons un exemple : un recruteur source, capte, séduit et suit la candidature d’un profil pour un poste de Key Account Manager. Le candidat est recruté et s’avère particulièrement performant, boostant la productivité et, donc, le chiffre d’affaires de l’entreprise. Comment mesurer la part de l’impact du recruteur dans cette réussite ?
Les KPI sont un bon moyen de valoriser le travail des recruteurs, car ils permettent d’objectiver leurs missions et leurs actions. Des indicateurs comme le taux de rétention des talents, le taux de promotion interne ou la performance des candidats embauchés au bout de six mois ou un an, peuvent démontrer l’impact concret de leur travail. À l’instar d’un commercial qui quantifie son chiffre d’affaires, ces données offrent une vision du retour sur investissement et permettent aussi de défendre les coûts de recrutement.
KPI de recrutement : gare à l’overdose !
En voulant suivre trop d’indicateurs, on n’en suit souvent aucun sérieusement. Les recruteurs s’accordent pour dire qu’un nombre raisonnable de KPI pour piloter ses recrutements tourne autour de 5. Mais lesquels ?
Cela dépend des objectifs stratégiques de votre entreprise : cherchez-vous à faire des recrutements massifs ? A recruter sur de nouveaux métiers ? A améliorer l’expérience candidat ? Ce sont les réponses à ces questions qui vous guideront vers les KPI à suivre (à ne pas confondre avec les OKR ou objective key results, qui sont des objectifs chiffrés à atteindre).
Parmi les KPI les plus intéressants à analyser, selon les recruteurs :
- Le taux de retour aux candidats ;
- Le time to hire (nombre de jours entre la candidature d’un candidat et son acceptation de l’offre d’embauche) ;
- Le time to fill (délai entre l’ouverture d’un poste et le moment où le candidat accepte l’offre d’embauche) ;
- Le taux de conversion des candidats (le nombre de candidats qui postulent après avoir lu une offre d’emploi) ;
- Le nombre de recrutements par recruteur ;
- La durée pendant laquelle un candidat reste à telle ou telle étape du process…
Ces KPI vous serviront à comprendre quels sont les points bloquants de votre process et facilitera les conversations avec les hiring managers, car vous pourrez vous appuyer sur des chiffres pour justifier vos difficultés.
Article rédigé par Lucie Chevron et Maïté Hellio