Congé parental : droits des salariés, obligations des employeurs
Que dit le droit du travail sur ce congé dont peut bénéficier un collaborateur ou une collaboratrice qui accueille un enfant ou plusieurs dans son foyer ? On vous dit tout !
Le congé parental d’éducation est un dispositif proposé aux parents qui souhaitent s’occuper de leur enfant durant les premières années de sa vie ou dans les mois qui suivent son adoption. Il permet à un salarié ou à une salariée d’interrompre, partiellement ou totalement, son activité professionnelle pendant quelques mois ou quelques années, en cas de naissance ou d’adoption d’un enfant (ou de plusieurs enfants) de moins de 16 ans, à la suite de son congé maternité, paternité ou d’adoption. Quelles sont les conditions pour bénéficier d’un congé parental ? Combien de temps dure-t-il ? Comment et combien est-il rémunéré ? Quels sont les droits des salariés en congé parental ? Et quelles sont les obligations de l’employeur vis-à-vis du collaborateur en congé parental d’éducation ? On fait le tour de la question.
Même s’il est ouvert aux pères depuis plus de 40 ans, ce congé est encore en majorité pris par des femmes pour accompagner les premières années de vie de leur enfant : en 2021, 14% des mères en avaient bénéficié à l’arrivée de leur enfant contre 0,8% des pères, d’après les chiffres de l’OFCE. En cause, la faible indemnisation de ce congé qui fait que la prise du congé par le père (le plus souvent mieux rémunéré que la mère) se traduirait par une perte importante de revenus pour la famille. Mais aussi la persistance de stéréotypes genrés, héritage d’une longue tradition paternaliste et nataliste.
Le congé parental en France en 8 dates clés
Le congé parental, tel qu’on le connaît aujourd’hui, est le fruit de plusieurs décennies de combat pour rémunérer l’inactivité professionnelle du parent qui s’occupe de son enfant, durant ses premiers mois, voire années, de vie.
- En 1939, un décret-loi instaure une allocation de mère au foyer, d’un montant de 10% du salaire mensuel de base d’un ouvrier au moment de l’accueil d’un enfant ;
- Dans la lignée, en 1941, le régime de Vichy instaure une allocation de salaire unique, d’un montant de 20% du salaire de référence ouvrier, dont peuvent bénéficier tous les couples dès le mariage pendant deux ans. Cette mesure a pour but d’inciter les Français à avoir des enfants ;
- Une loi promulguée le 12 juillet 1977 acte la naissance du premier congé parental d’éducation (CPE). Il s’agit d’une suspension provisoire du contrat de travail, à l’arrivé d’un enfant, d’une durée maximale de deux ans, assortie d’une garantie de retrouver son emploi (ou un emploi similaire) et une rémunération équivalente. Ce congé est d’abord réservé aux femmes accueillant un enfant, qui travaillent dans des entreprises de plus de 200 salariés et qui ont au moins un an d’ancienneté
- Le 4 janvier 1984, une loi permet aux pères de bénéficier du congé parental d’éducation aux mêmes conditions que les mères, pour accompagner les premières années de vie de leur enfant. Ce même texte abaisse le seuil des entreprises éligibles à celles employant plus de 100 salariés, contre 200 auparavant, et étend la durée maximale du congé à trois ans. Elle crée aussi un droit à un travail à temps partiel durant cette période.
- La loi du 4 janvier 1985 crée l’allocation parentale d’éducation pour les parents de jeunes enfants en congé parental d’éducation.
- La loi du 25 juillet 1994 ouvre l’accès au congé parental d’éducation aux salariés parents travaillant dans des entreprises de toutes tailles.
- En 2004, une nouvelle allocation est créée, la PAJE (prestation d’accueil du jeune enfant), qui comprend une composante liée à l’interruption ou diminution d’activité (dite « complément libre choix d’activité », reprenant l’APE) mais englobe également une composante liée au choix par la famille du mode d’accueil de leur enfant (dite « complément libre choix du mode de garde », qui finance le recours à un accueil externe individuel).
- En 2015, une réforme vise à rééquilibrer les écarts de situation liés au genre : à la naissance du premier enfant, la durée de ce congé est passée de six mois à un an, si les deux parents partagent ce congé et, à partir du 2e enfant, la durée du congé parental a été réduite de 3 à 2 ans, sauf pour les parents se partageant ce congé.
Qui a droit au congé parental d’éducation ?
Pour bénéficier du congé parental d’éducation, un salarié doit avoir au moins un an d’ancienneté dans son entreprise à la date de la demande du congé. L’article L.1225-47 du Code du travail prévoit que « pendant la période qui suit l’expiration du congé de maternité ou d’adoption, tout salarié justifiant d’une ancienneté minimale d’une année a le droit :
- soit au bénéfice d’un congé parental d’éducation durant lequel le contrat de travail est suspendu ;
- soit à la réduction de sa durée de travail, sans que cette activité à temps partiel puisse être inférieure à 16 heures hebdomadaires. »
Comment les salariés doivent-ils le demander ?
Votre collaborateur ou votre collaboratrice doit vous adresser sa demande de congé parental d’éducation par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Dans cet écrit, il ou elle doit mentionner la date de début du congé parental ainsi que sa durée, et s’il s’agit d’un congé parental à temps complet ou à temps partiel.
Cette demande doit être effectuée auprès de l’employeur au moins un mois avant la fin du congé maternité, paternité ou d’adoption, et au moins deux mois avant le début du congé parental si celui-ci s’enchaîne directement avec le congé maternité, paternité ou d’adoption.
Un employeur peut-il refuser un congé parental ?
Que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, un employeur ne peut pas refuser un congé parental à un collaborateur ou à une collaboratrice s’il ou elle remplit les conditions fixées par le Code du travail décrites plus haut. S’il s’y oppose, il encourt une amende de 5e classe pouvant aller jusqu’à 1 500€. Une récente décision de la Cour de cassation est venue préciser que le non-respect du délai de prévenance de l’employeur dans le cadre d’une demande de congé parental ne peut pas justifier un refus de sa part.
En revanche, dans le cas d’un congé parental à temps partiel, l’employeur a le dernier mot sur les nouveaux horaires de travail du salarié en cas de désaccord entre les deux parties.
Quelle est la durée du congé parental ?
La durée initiale du congé parental d’éducation est d’un an pour les salariés du privé, qui doivent le prendre après leur congé maternité, paternité ou d’adoption. Elle peut être renouvelée plusieurs fois, en fonction du nombre d’enfants nés simultanément de la personne qui demande le congé. Les parents ayant accueilli un enfant ou des jumeaux pourront prendre leur congé jusqu’aux 3 ans de leur(s) enfants(s), et ceux ayant donné naissance à des triplés voire davantage d’enfants, pourront prendre ce congé jusqu’aux 6 ans de leurs enfants.
Nombre d’enfants nés simultanément | Nombre maximum de renouvellements | Durée maximale du congé parental |
1 | 2 | 3 ans |
2 | 2 | 3 ans |
3 et plus | 5 | 6 ans |
Les règles sont les mêmes en cas d’adoption d’un ou de plusieurs enfants de moins de 3 ans. Pour l’adoption d’un enfant de 3 à 16 ans, le congé parental initial, également d’une durée d’un an, ne peut pas être renouvelé.
A noter qu’en cas de maladie, de situation de handicap ou d’accident de l’enfant, la durée maximale du congé parental d’éducation peut être prolongée d’une année.
Comment le salarié est-il rémunéré durant cette période ?
Deux cas de figure peuvent se présenter pendant le congé parental :
- soit le salarié ou la salariée le prend à temps complet. Dans ce cas, son contrat de travail et sa rémunération sont suspendus pendant toute cette durée ;
- soit le collaborateur ou la collaboratrice le prend à temps partiel. Il ou elle touche alors une partie de sa rémunération au prorata de son temps de travail.
Pour compenser cette perte de revenus, la personne en congé parental d’éducation touche certaines prestations sociales, en fonction de sa situation :
- la PreParE ou prestation partagée d’éducation de l’enfant, dont le montant varie en fonction du nombre d’heures travaillées par le parent et du nombre d’enfants à charge. En 2025, les montants nets de la PreParE proposés pour une naissance ou une adoption en vigueur sont de 456,06 € pour un congé parental total et de 294,82 € € pour une personne travaillant à mi-temps ou moins pendant son congé parental ;
- la PreParE majorée, si le parent a au moins trois enfants, dont l’un âgé de moins d’un an au 1er janvier de l’année en cours. Il n’est versé qu’aux parents en congé parental total et pour une durée maximale d’un an. Elle est d’un montant de 745,45 € ;
- l’allocation de base, versée sous conditions de revenus avant les 3 ans de l’enfant ;
- la prime à la naissance ou à l’adoption, versée sous conditions de revenus ;
- le complément de libre choix de mode de garde, si l’enfant a moins de 6 ans et est gardé par une assistance maternelle, à domicile ou s’il va à la crèche ;
- l’AJPP ou allocation journalière de présence parentale, si l’enfant du parent est atteint d’une maladie grave.
Quelles conséquences sur la carrière du salarié ?
Pendant toute la durée de son congé parental, le salarié n’a pas le droit d’exercer une autre activité professionnelle, sauf s’il occupe un emploi d’assistant maternel. La période de congé parental entre en compte dans le calcul de l’ancienneté du salarié.
Les droits du salarié en congé parental
Les congés payés acquis ou en cours d’acquisition par le salarié à la date du début de son congé parental sont maintenus dans leur état jusqu’à la fin de celui-ci et s’appliquent à l’issue du congé. En revanche, le collaborateur n’acquiert plus de congés payés pendant le congé parental.
En principe, durant la période du congé parental, le salarié ou la salariée ne bénéficie plus du contrat d’adhésion à sa mutuelle d’entreprise, car son contrat de travail est suspendu. Néanmoins, certains contrats prévoient le maintien d’avantages dans cette situation.
Quant aux droits à la retraite, les personnes qui bénéficient d’un congé parental obtiennent un trimestre d’assurance retraite pour chaque période de 90 jours passée en congé parental. Au total, un salarié peut donc avoir 12 trimestres d’assurance retraite validés si son congé parental dure 3 ans.
Quelles sont les obligations de l’employeur dans le cadre d’un retour de congé parental ?
Lorsque le congé parental touche à sa fin, l’employeur doit s’assurer que le salarié ou la salariée retrouve le même emploi ou un emploi similaire associé à une rémunération au moins équivalente à celle qu’il touchait au début de son congé.
Depuis 2014, l’employeur doit également organiser un entretien professionnel au retour de son collaborateur ou de sa collaboratrice dans l’entreprise. Ce rendez-vous a pour objectif de déterminer si le congé parental d’éducation a eu un impact sur l’évolution de la carrière de la personne et sa rémunération ainsi que d’identifier des souhaits éventuels de formation chez le salarié.
Un congé bientôt remplacé par le congé de naissance
Début 2024, le président de la République, Emmanuel Macron, a mis sur la table un projet de réforme du congé parental. Dans sa nouvelle version, qui se veut mieux rémunérée et plus courte, il s’appellerait le congé de naissance.
La ministre des Familles, Aurore Bergé, a précisé les modalités et le calendrier de ce nouveau congé : il serait d’une durée de 4 mois pour les pères et 4 mois pour les mères et devrait voir le jour en 2026. En revanche, on ne connait pas encore le montant de l’indemnisation qui sera versée aux bénéficiaires.
En résumé
- Le congé parental d’éducation existe en France depuis 1977. A l’origine il était réservé aux femmes, travaillant dans les entreprises de plus de 200 salariés et n’était pas rémunéré.
- Actuellement, tout salarié et toute salariée peuvent bénéficier d’un congé parental d’éducation à l’accueil d’un ou de plusieurs enfants dans leur foyer, à condition qu’il ait un an d’ancienneté dans son entreprise.
- Ce congé est d’une durée d’un an renouvelable, à prendre dans les trois premières années de vie de l’enfant dans le cadre d’une naissance ou bien en cas d’adoption d’un enfant de moins de 16 ans.
- Il peut être renouvelé deux fois en cas d’une ou deux naissances simultanées et trois fois en cas de naissance simultanée de trois enfants ou plus. Dans le cadre d’une adoption d’un enfant de 3 à 16 ans, il ne peut pas être renouvelé au-delà de sa durée initiale d’un an.
- Le montant de la PreParE est de 456,06 € nets pour une personne en congé parental à temps complet, en 2025.
- Le congé parental devrait être remplacé en 2026 par le congé de naissance, un congé plus court et mieux rémunéré.