Ubérisation : Deliveroo jugé en France pour « travail dissimulé »
Le procès de Deliveroo pour « travail dissimulé » s’ouvre mardi 8 mars en France.
Deliveroo a-t-il employé en tant que livreurs indépendants des travailleurs qui auraient dû être salariés ? C’est la question qui devra être tranchée lors du procès pour « travail dissimulé » qui s’ouvre mardi 8 mars, devant le tribunal correctionnel de Paris, et vise l’entreprise ainsi que trois de ses anciens dirigeants. A l’origine de cette première action au pénal sur le sujet de l’ubérisation en France, 71 coursiers ayant travaillé pour la plateforme britannique sur la période 2015-2017.
Un lien de subordination existant
Selon les gendarmes de l’Office central de lutte contre le travail illégal, il existe bel et bien un « lien de subordination », caractéristique d’une relation de travail salariée, entre Deliveroo France et plus de 2000 livreurs. L’accusation reproche à l’entreprise de se présenter comme une plate-forme de mise en relation entre clients, restaurateurs et livreurs alors qu’en réalité la livraison de repas est leur cœur d’activité.
De son côté, Deliveroo défend son recours à la sous-traitance en prétendant ne pas disposer en interne d’un personnel alliant « la technicité » et le « savoir-faire particulier » nécessaires à la livraison. Un argument balayé par les enquêteurs qui jugent l’expertise toute « relative ».
Une série d’obligations mettant à mal l’indépendance
« Deliveroo travaille avec des livreurs indépendants, parce que cela est conforme à la manière dont ils nous disent qu’ils aiment exercer leur activité. Cela leur accorde une flexibilité dont ils ne pourraient pas bénéficier dans une relation salariée », avance encore l’entreprise. Or, selon les enquêteurs, la série d’obligations, liées au port de l’uniforme, aux créneaux attribués et au comportement à adopter face au client ou au restaurateur, imposées par Deliveroo à ses livreurs, va à l’encontre de cette prétendue « indépendance ».
« Aujourd’hui, c’est le procès de Deliveroo mais c’est surtout une alerte à toutes les sociétés qui fonctionnent sur le même principe et abusent du statut d’indépendant », fait valoir Me Kévin Mention, avocat des livreurs constitués parties civiles dans ce dossier. Le verdict est attendu pour le 16 mars.
La France s’inspirera-t-elle du statut hybride de « travailleur salarié » adopté par Uber en Grande-Bretagne ? Il y a près d’un an, la société américaine, a créé ce nouveau statut qui ouvre de nouveaux droits pour ses 70 000 chauffeurs britanniques : salaire minimum, congés payés et cotisations retraite.