Travail hybride ou full remote ? 3 entreprises nous expliquent leur choix

Des témoignages qui démontrent que l’organisation du travail est fortement liée à la culture d’entreprise.

Quelle organisation du travail convient le mieux à votre culture d'entreprise ?
Quelle organisation du travail convient le mieux à votre culture d'entreprise ? © Rudzhan/stock adobe.com

Loin d’être un vernis séduisant, appliqué sur les offres d’emploi pour suivre un effet de mode, le télétravail est aujourd’hui un mode d’organisation du travail au service de la stratégie d’entreprise. Voire un marqueur fort de leur identité. À l’aube de 2024, et alors que plusieurs employeurs battent le rappel au bureau, trois chefs d’entreprise nous livrent leur vision à ce sujet.

« Le full remote permet d’élargir nos horizons de recrutement »

« Les entreprises qui sont en full remote vont le rester. » Le CEO de Tixeo, Renaud Ghia, en est convaincu. L’éditeur de logiciel de visioconférence fait partie de la petite galaxie d’entreprises françaises dont les salariés sont en 100% télétravail depuis l’origine.

L’équipe est passée de 10 à 35 personnes, mais la mêlée du matin à distance fait toujours partie des rituels : « On a gardé cette agilité qui nous est chère, en subdivisant les équipes, à mesure que l’on grandit. Le full remote nous apporte tellement en termes de résilience, de diversification, de facilité à trouver des profils. »

Si l’entreprise s’est aujourd’hui développée à l’international, le 100% télétravail n’y est pas étranger : « Ça nous a clairement permis d’élargir nos horizons de recrutement et de toucher des profils compliqués à approcher, notamment des développeurs et des commerciaux », admet le chef d’entreprise.

Le tout distanciel implique néanmoins d’apporter un soin particulier au parcours d’intégration des nouvelles recrues : « On leur remet un livret d’accueil présentant l’entreprise, sa culture, l’équipe et nos rituels et on veille à les rencontrer en présentiel dans les deux à trois mois suivant leur arrivée dans l’entreprise. »

Contrairement aux idées reçues, les salariés de Tixeo ont de nombreuses interactions quotidiennes, « sans doute bien plus que des personnes travaillant côte à côte dans un espace de coworking, car nous poursuivons le même objectif. Maintenir la communication à distance est la clé ! »

Alors qu’une large majorité de Français souhaite télétravailler au moins une partie de la semaine, Renaud Ghia est prêt à prendre le pari que « les entreprises qui feront le choix du retour au bureau perdront en compétitivité et auront encore plus de difficultés à recruter. »

« Grâce au 100% télétravail, notre entreprise endosse un rôle de facilitateur »

Chez Deel, tout a aussi été pensé en full remote dès le premier jour : les modes opératoires, les réflexes, les rituels. « Cette plateforme de gestion RH a été créée à San Francisco par un Français et une Américaine. Le 100% télétravail est bien plus développé aux États-Unis qu’en France, il fait partie de notre ADN », retrace Julien Couderc, directeur général France de Deel.

Aujourd’hui, un tiers des 3 000 collaborateurs de l’entreprise travaille depuis la France, les autres aux quatre coins de la planète. « Nous sommes présents dans 120 pays. L’utilisation de notre propre plateforme nous permet d’avoir un fonctionnement très global. On travaille en toute flexibilité, en mode projet. Ce modèle fonctionne, car nous collaborons à distance depuis notre création et qu’on télétravaille tous, y compris au top management. On est tous logés à la même enseigne : il n’y a pas d’un côté ceux qui se trouvent au siège, sont proches du pouvoir et ont davantage d’opportunités d’évolution et les autres qui sont les éternels oubliés. »

De son aveu, chaque salarié de Deel tire des avantages différents de cette organisation de travail : « Les jeunes en profitent souvent pour choisir leur cadre de vie, voyager, rejoindre des amis vivant à l’étranger. Les parents apprécient la souplesse dans l’organisation familiale et le fait de pouvoir suivre leur conjoint ou conjointe en cas de mobilité géographique. Nos collaborateurs louent aussi le gain d’efficacité. Même s’il faut préciser que le full remote n’est pas fait pour tout le monde : il faut être organisé, avoir une vie sociale en dehors du travail et savoir s’octroyer des pauses ».

L’entreprise propose aussi à ses collaborateurs un accès à des espaces de coworking dans plusieurs grandes villes dans le monde. « La notion de liberté est essentielle chez nous. C’est plaisant de travailler pour une entreprise qui propose une aventure unique et contribue à la transformation du marché du travail. De mon point de vue, la question à se poser aujourd’hui n’est pas quel sera le futur du télétravail, mais quelle sera la place de l’entreprise dans la société au cours des prochaines années. L’entreprise, c’est un cadre qui offre une culture, des valeurs, des projets durables, elle endosse de plus en plus un rôle de facilitateur. Le modèle précédent est en train d’éclater, les flux se globalisent chaque jour davantage et les entreprises deviennent des lieux d’échange, de partage. »

« Le travail hybride combine le meilleur des deux mondes »

De son côté, Nicolas d’André, Head of Slack France, déclare que son entreprise a « toujours souhaité combiner le meilleur des deux mondes, ce que le travail hybride permet ».

Grâce au développement de nouvelles solutions, Slack a cherché à multiplier les points de contact entre ses collaborateurs travaillant à distance : des modules Huddle permettant d’organiser des discussions audio et vidéo d’équipe « à la volée » ou encore des Clips, des enregistrements audio ou vidéo qui facilitent la communication asynchrone.

« L’étude que nous avons menée avec OpinionWay montre que deux tiers des travailleurs du savoir veulent venir au bureau la moitié de la semaine et télétravailler le reste du temps. » En matière d’organisation du télétravail, il revient à chaque entreprise de trouver son équilibre en engageant un dialogue avec chaque service, selon Nicolas d’André : « Notre accord de télétravail laisse, en grande partie, la main aux managers et aux gestionnaires d’équipe. On n’a pas tous les mêmes temps forts, donc chaque équipe décide du rythme le plus en phase avec ses projets en cours et définit ses jours de présence au bureau. »

« Mais ce n’est pas parce que nos collaborateurs veulent revenir au bureau qu’ils y reviennent pour y faire la même chose qu’avant la crise sanitaire », poursuit-il. Pour ne pas freiner la productivité de ses équipes, l’entreprise a choisi de supprimer les réunions inutiles, de remplacer les points récurrents par une communication écrite ou des réunions plus courtes.

Elle a également réorganisé ses espaces de travail : « Pourquoi vient-on aujourd’hui au bureau ? On ne fait pas une heure de transport pour se retrouver seul dans le coin d’un open space, le casque sur les oreilles. On y vient pour brainstormer avec son équipe, partager des moments conviviaux, recevoir des clients ou des prestataires. »

Les locaux ont donc été transformés pour répondre à chaque besoin : des lieux d’accueil, des salles où laisser libre cours à sa créativité, des villages industries où rencontrer des experts. « Ces idées ont germé de discussions avec nos collaborateurs. Les équipes Tech, les commerciaux, la R&D n’ont pas les mêmes besoins. On a essayé de répondre à chaque usage pour que chacun puisse travailler efficacement lorsqu’il retrouve son équipe au bureau. »

« Les clés d’un travail hybride efficace ? Instaurer un management par la confiance et par le résultat et ne pas créer de rupture entre la façon de travailler à distance et au bureau », conclut Nicolas D’André. La meilleure preuve que l’entreprise a fait le bon choix pour elle et pour ses salariés ? Ses bureaux ne sont plus jamais vides.

Bien s’équiper pour bien recruter