Pauses, trajets, absences… que recouvre le temps de travail effectif ?
La définition du temps de travail effectif est essentielle car il forme la base de la rémunération de vos salariés.

Quelle définition juridique ?
A son article L.3121-1, le Code du travail précise que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel :
- Un salarié est à la disposition de son employeur
- Un salarié se conforme aux directives de son employeur
- Un salarié ne peut pas vaquer à ses occupations personnelles.
« Le lien de subordination est l’élément essentiel de la définition du temps de travail effectif. Ce lien est la transcription du pouvoir de direction de l’employeur, rappelle Me Audrey Ballu-Gougeon, avocate en droit du travail. Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. »
Comment sa durée est-elle calculée ?
« Le temps de travail débute à l’heure où le salarié prend ses fonctions et se consacre à des tâches professionnelles, résume Me Ballu-Gougeon. Le salarié est soumis à une durée hebdomadaire de travail et au respect des horaires fixés au sein de son entreprise. »
Un salarié à temps complet effectue un minimum de 35h de travail par semaine. Il peut dépasser ce seuil en effectuant des heures supplémentaires dans la limite de 10h de travail effectif quotidiennes et de 48h hebdomadaires (sauf dérogations).
Que recouvre la notion de temps de travail effectif ?
Les pauses
« Les temps de pause et les temps nécessaires à la restauration sont considérés comme du temps de travail effectif dès lors qu’en raison de la spécificité de leurs fonctions, les salariés qui travaillent en cycle continu ne peuvent s’éloigner de leur poste de travail. Dans ce cas, ils restent à la disposition de l’employeur, même pendant le temps de repas, comme c’est le cas pour les réceptionnistes, par exemple », développe l’avocate.
En revanche, si le temps de restauration s’intercale entre deux périodes de travail effectif, il n’est pas considéré comme du travail effectif et n’est pas rémunéré (sauf disposition conventionnelle contraire).
Pour rappel, un salarié ne peut pas travailler plus de six heures d’affilée dans une journée. À partir de ce seuil, il a droit à une pause d’au moins vingt minutes consécutives.
Les périodes d’astreinte
L’astreinte se définit comme une période pendant laquelle le salarié, sans être présent sur son lieu de travail, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir une mission au service de son entreprise. Dans ce cas précis, seule la durée de l’intervention du salarié pour accomplir son travail est considérée comme un temps de travail effectif, en vertu de l’article L.3121-9 du Code du travail.
« Ce temps d’intervention commence au moment où le salarié est appelé à intervenir jusqu’à son retour à son domicile, car, pendant ce temps, le salarié est tenu de se conformer aux directives de l’employeur sans pouvoir vaquer à ses obligations personnelles », détaille Me Ballu-Gougeon.
Les formations professionnelles
Si une formation se déroule sur le temps de travail du collaborateur, elle est alors décomptée au titre du temps de travail effectif. « Pendant la formation, le salarié reste sous la subordination juridique de l’employeur et est donc soumis aux mêmes droits et aux mêmes obligations que s’il continuait à exercer son activité professionnelle », ajoute Audrey Ballu-Gougeon.
Les séminaires d’entreprise
« Le temps consacré aux réunions de travail à l’occasion des séminaires d’entreprise est du temps de travail effectif si le salarié se trouve à la disposition de son employeur. Concernant les activités organisées dans le cadre du séminaire, certaines peuvent être organisées dans le but de renforcer les liens entre les collaborateurs et font partie intégrante du programme. Alors, ce temps peut être considéré comme du temps de travail effectif. Quant aux activités proposées aux salariés sur la base du volontariat, elles ne seront pas décomptées comme du temps de travail effectif. »
Les absences assimilées à du temps de travail effectif
Les absences qui entrent en compte dans le temps de travail effectif sont :
- Les congés maternité, paternité, d’accueil de l’enfant et d’adoption
- Les jours de repos acquis au titre de la réduction du temps de travail
- Les congés de formation
- Les absences consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, à un accident et trajet et à une maladie non professionnelle
- La période de préavis dispensée par l’employeur
- L’activité partielle
- Les absences liées à des activités associatives, civiques, sociales, politiques ou militantes.
Quels temps n’entrent pas dans le cadre du travail effectif ?
Le temps de trajet domicile-travail
En principe, le temps de déplacement du collaborateur entre son domicile et son lieu de travail n’est pas du travail effectif. Sauf s’il s’agit d’un déplacement qui dépasse le temps normal de trajet, précise l’avocate : « Si vous habitez et travaillez à Rennes et que vous devez vous rendre à Lyon pour un rendez-vous professionnel, le temps de trajet Rennes-Lyon et Lyon-Rennes sera décompté comme du temps de travail effectif. Il donnera alors lieu à une compensation, financière ou sous forme de repos. »
Pour les travailleurs itinérants, le temps consacré aux déplacements entre leur domicile et les sites du premier et du dernier client de la journée n’a longtemps pas été considéré comme du temps de travail effectif. Mais, dans un arrêt du 23 novembre 2022, la Cour de cassation est revenue sur sa jurisprudence antérieure, notamment à la lumière des dispositions européennes.
« Désormais, le juge vérifiera, en cas de litige, si, pendant son temps de trajet, le salarié devait se tenir à la disposition de l’employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles. Dans l’affirmative, ce temps de trajet devra être pris en compte dans le temps de travail effectif, notamment au titre du décompte des heures supplémentaires réalisées. C’est le cas, par exemple, d’un commercial itinérant qui appelle tous les soirs son manager, sur son trajet retour, pour lui débriefer les rendez-vous de la journée », illustre l’avocate.
En revanche, le temps de trajet ne répond pas à la définition du temps de travail effectif, le salarié ne pourra alors prétendre qu’à une contrepartie financière ou sous forme de repos, dans l’hypothèse où ce temps dépasse le temps normal de trajet entre son domicile et son lieu habituel de travail.
Un arrêt de la Cour de cassation du 25 octobre 2023, venant confirmer la Cour d’appel de Paris, a considéré que le temps de trajet d’un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premiers et derniers clients ne constituait pas du temps de travail effectif.
La Cour d’appel avait apprécié souverainement les éléments suivants :
- Le véhicule de service disposait d’un dispositif de géolocalisation, ainsi qu’un interrupteur « vie privée » permettant au salarié de le désactiver ;
- Le salarié recevait un planning mensuel, il devait impérativement soumettre à l’accord de son supérieur la réalisation d’heures supplémentaires, tout décalage, anticipation ou annulation d’un contrôle, et il recevait également un planning hebdomadaire indiquant les contrôles à effectuer et les dates de ces derniers ;
- Le contrôle quant à l’optimisation des temps de trajets et au respect de la note de service relative aux soirées étapes ne suffisait pas à établir que le salarié se tenait à la disposition de l’employeur durant ses premier et dernier trajets de la journée, dès lors qu’il prenait l’initiative de son circuit quotidien, les contrôles de l’employeur n’étant que rétrospectifs et se justifiant pleinement dès lors que l’employeur avait mis en place un dispositif d’indemnisation des trajets anormaux ouvrant droit à indemnisation au-delà de 45 minutes ;
- En tant que travailleur itinérant, le salarié restait libre de vaquer à des occupations personnelles avant son premier rendez-vous et après le dernier, et il ne pouvait davantage arguer de l’existence de soirées étapes imposées par l’employeur au-delà d’une certaine distance, dès lors qu’il pouvait les choisir et que cette prescription n’avait nullement pour objet ni pour conséquence de le maintenir à disposition de l’employeur mais d’éviter de trop longs trajets ;
- Le salarié ne caractérisant pas l’importance effective des tâches administratives accomplies à domicile, l’accomplissement de ces tâches ne conférait pas audit domicile la qualité de lieu de travail, quand bien même son usage ponctuel justifiait que l’employeur lui allouât une indemnité mensuelle.
Les absences non assimilées à du temps de travail effectif
Il s’agit des absences liées à :
- La vie familiale (congé pour enfant malade, congé parental d’éducation…)
- Un pouvoir disciplinaire de l’employeur (mise à pied)
- Une participation à une grève
- Un congé sabbatique.