Évolution des salaires : les 6 erreurs les plus courantes (et comment les éviter)

Le principal mot d’ordre : ne vous précipitez pas !

La Californie marche dans les pas d'une poignée d'états américains qui se sont dotés d'une loi de transparence des salaires.
Sur la transparence des salaires, "on peut y aller petit à petit". © TarikVision/stock adobe.com

C’est la saison des négociations salariales. Après un volume d’augmentation des salaires inédit en 2023 (+4,6% de budget supplémentaire alloué, en moyenne, aux augmentations), à quoi faut-il s’attendre en 2024 ?

« On ne fera sans doute pas aussi bien que l’an dernier, présage Sandrine Dorbes, consultante en rémunération. Chez les employeurs, la tendance est à chercher d’autres stratégies pour accroître le pouvoir d’achat de leurs salariés sans toucher à leur masse salariale. »

Quelle que soit votre stratégie, on vous informe des erreurs les plus fréquentes en matière d’évolution des salaires.

1.     Modifier sa grille salariale sans travailler sa politique de rémunération

C’est l’erreur la plus commune, observe Sandrine Dorbes : « Il ne faut pas oublier qu’une grille de rémunération est un outil de pilotage au service de votre politique de rémunération, un outil construit pour répondre à la stratégie de l’entreprise. »

Avant de modifier cette grille en profondeur, il convient donc de s’interroger sur la stratégie de votre entreprise : quels sont vos objectifs à six mois, à un an ou à trois ans, en fonction de votre taille. « A chaque fois que cette stratégie évolue, il faut se demander si vos politiques de recrutement, de formation, de rémunération sont toujours adaptées. »

Votre politique de rémunération doit également correspondre à votre culture d’entreprise, refléter vos valeurs : « Par exemple, si le sens du collectif est important pour vous et que vous instaurez du variable individuel dans toute votre grille, cela crée une dissonance cognitive. »

Une fois que l’on a répondu à ces deux questions (qui l’on est et où on va), on peut faire le point sur le budget interne (que peut-on se permettre sur les deux années à venir en termes d’évolution de rémunération ?) et décider de son positionnement sur le marché.

2.     S’autocensurer en se référant à la grille salariale

« J’entends parfois certains employeurs qui, au moment des discussions pour faire évoluer les salaires, me disent : ‘’On ne peut pas, notre grille nous empêche de faire cela’’ », témoigne Sandrine Dorbes.

Mais la grille salariale n’est pas figée : c’est un instantané de la ventilation des rémunérations et des postes au sein de l’entreprise à un moment donné. « Si le contexte change, si votre stratégie évolue, la grille doit, elle aussi, être retouchée. On adapte la grille aux nouveaux besoins, et pas l’inverse ! »

« La grille salariale est, avant tout, un support pratique auquel se référer en un coup d’œil : elle permet de répondre à deux mêmes questions de la même manière et de traiter tous les collaborateurs sur un pied d’égalité. »

3.     Négliger le dialogue social

« Certaines entreprises semblent avoir oublié le dialogue social, notamment sur les sujets de rémunération, déplore la consultante en rémunération. Or, les représentants du personnel sont très près du terrain et peuvent avoir une idée plus nette de ce dont les équipes ont besoin. »

Elle conseille donc de les informer des décisions liées à l’évolution des rémunérations en amont et d’en débattre avec eux. « Et si on estime qu’ils n’ont pas la compétence pour discuter des aspects de rémunération, il suffit de les former pour qu’ils deviennent des interlocuteurs de choix. »

4.     Ne pas faire preuve de transparence

Seules deux entreprises sur cinq communiquent aujourd’hui des informations liées à leur politique de rémunération, selon une récente étude réalisée par WTW. Leur principale crainte liée à la divulgation de ces informations ? Susciter de mauvaises réactions chez leurs collaborateurs.

« Transparence et individualisation ne font parfois pas bon ménage, confirme l’experte. Les dirigeants craignent d’ouvrir la boîte de Pandore et que tous les salariés montent au créneau, parce qu’ils s’estimeront lésés. » Son premier conseil aux RH : se détendre sur le sujet. « Le législateur français a jusqu’à 2026 pour transposer la directive européenne sur la transparence des salaires, on a encore le temps de se poser la question du niveau de transparence dont on veut. On peut y aller petit à petit : d’abord bien définir les règles, se poser la question de quel niveau d’information on donne aux managers, puis à l’ensemble des collaborateurs. »

5.     Proposer des rémunérations en réaction à un marché tendu

De nombreuses entreprises, en particulier sur le marché de la Tech, proposent des packages de rémunération bien au-dessus marché, car elles ont peur que leurs collaborateurs s’en aillent, constate Sandrine Dorbes : « Prises dans le rouleau compresseur quotidien de l’opérationnel, certaines RH manquent de recul pour se demander si les décisions, en matière de salaire, répondent aux besoins de l’entreprise ou sont prises pour réagir à un contexte incertain (inflation, crises, guerres…). »

Pour éviter cet écueil, Sandrine Dorbes conseille de faire le point sur ce que vous avez mis en place et de prendre de la hauteur : « Sortez de votre bureau, participez à des événements RH, rencontrez des pairs et partagez vos bonnes pratiques et vos galères ! »

6.     Abuser des primes défiscalisées au détriment d’un soutien plus pérenne du pouvoir d’achat

Si les primes défiscalisées peuvent offrir une bonne solution de court terme pour soutenir financièrement ses salariés sans toucher à sa masse salariale, « à moyen terme, ne pas augmenter les salaires risque de laisser prendre trop de retard par rapport à l’augmentation du coût de la vie », explique Sandrine Dorbes.

Elle plaide pour des solutions de soulagement du pouvoir d’achat plus pérennes, telles que les renégociations de contrats de santé, pour apporter une meilleure couverture sans surcoût pour le collaborateur, augmenter la contribution de l’employeur sur la prise en charge des tickets restaurant et des abonnements de transport.

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