Les RH vont mal : comment préserver leur santé mentale ?

De nombreux risques pèsent sur la santé mentale des RH qui se dégrade d’année en année, selon plusieurs baromètres. Dernier en date, celui de Teale, qui, au-delà du diagnostic, esquisse des pistes pour inverser la tendance.

santé mentale RH
38% des RH se déclarent prêts à quitter leur entreprise pour préserver leur santé mentale. © svetazi/stock adobe.com

Soutien aux salariés en détresse, accompagnement de transformations d’ampleur au sein de leur organisation, évolution du monde du travail, gestion des conflits… Du fait du rôle qu’ils jouent au quotidien dans l’entreprise, les professionnels des RH voient régulièrement leur santé mentale mise à rude épreuve. Des risques qui s’accroissent sur fond d’accélération des enjeux autour de l’IA et d’inquiétudes des salariés quant au contexte économique et politique incertain.

D’après le dernier baromètre Teale*, la santé mentale des RH se fragilise : avec un score de 49/100 à l’indicateur de bien-être de l’OMS, le WHO-5, les RH se situent sous le seuil de 50, marquant l’entrée en dépression clinique. Trois causes principales à ce mal-être sont avancées :

  • une surcharge de travail liée à l’élargissement constant du périmètre RH, sans moyens supplémentaires ;
  • une pression psychologique forte face aux transformations du travail (inflation, restructurations, IA, tensions sociales…) ;
  • une hyperconnexion qui brouille la frontière entre vie professionnelle et vie personnelle et entretient une disponibilité permanente.

Près de 4 RH sur 10 pensent à quitter leur entreprise

Cette détresse pyschologique se manifeste, à la fois, par une prégnance des pensées négatives (43% des personnes interrogées seulement parviennent à s’en débarrasser), une incapacité grandissante à gérer le stress (63% du panel estiment leur stress gérable) ainsi qu’une impossibilité à faire part de ses émotions (seuls 59% le font facilement).

Conséquence, les RH sont épuisées et peinent à trouver l’énergie nécessaire à la réalisation de leurs missions. A force d’absorber les tensions des autres, sans parvenir à partager les leurs, ils sont plus exposées au risque de burn out et de désengagement. La baisse de leur sentiment d’utilité pèse sur leur moral : seuls 73% d’entre eux jugent leurs activités importantes. Elles souffrent, enfin, d’un manque de reconnaissance et d’un isolement au sein de l’entreprise.

Autant de situations qui expliquent qu’une part croissante de RH envisagent de quitter leur entreprise pour se protéger : 38% sont prêts à le faire, soit 5 points de plus qu’en 2024. Pour inverser cette tendance, plusieurs leviers existent néanmoins : « Préserver la santé mentale des RH, ce n’est pas un sujet périphérique : c’est une condition de survie pour les entreprises, avance Julia Néel Biz, cofondatrice de Teale, une plateforme de prévention en santé mentale. Cela suppose de leur donner les moyens de se recentrer sur l’humain, de revaloriser leur rôle stratégique, et de leur offrir un soutien organisationnel à la hauteur des responsabilités qu’ils portent. »

Comment aider les RH ?

Concrètement, pour préserver la santé mentale de leurs RH sursollicités, les entreprises doivent sacraliser le droit à la déconnexion, en appelant les collaborateurs à ne pas leur envoyer de messages en dehors des heures de travail.

Les entreprises ont également tout intérêt à créer des espaces de discussions sécurisés pour permettre aux RH de partager, à leur tour, les difficultés qu’ils peuvent rencontrer dans le cadre professionnel, et rompre avec les situations d’isolement qui leur pèsent. « Ce n’est pas bon de rester seul quand on est RH, il faut être entouré. Même s’il n’y a pas de signes de maladie, les RH ont besoin d’être orientés, secondés, accompagnés, car c’est une fonction qui est confrontée aux émotions des collaborateurs, qui fait face à des situations de conflit et qui doit parfois annoncer des décisions difficiles à vivre pour les salariés », explique Michel Lejoyeux, professeur de psychiatrie et d’addictologie à l’université Paris-Diderot. Ces échanges peuvent se faire avec leur manager ou avec des pairs RH, dans le respect de la confidentialité des propos rapportés par les collaborateurs.

Face au besoin de reconnaissance d’une profession souvent peu considérée, les entreprises doivent renforcer le rôle stratégique de la fonction RH. Elles doivent le faire en portant une attention particulière à l’appropriation de l’IA par les RH, pour les décharger des tâches les plus chronophages et à plus faible valeur ajoutée. Ce virage technologique leur permettra de se recentrer sur les missions qui ont le plus de sens à leurs yeux : l’accompagnement de l’humain.

Les RH, acteurs de leur propre bien-être au travail

Enfin, en plus de cette aide extérieure, les professionnels des RH peuvent également devenir les artisans de leur bien-être au travail. Notamment en rappelant aux autres collaborateurs en quoi consiste leur rôle et en donnant un cadre aux échanges, rappelle Sophie Cot-Rascol, psychologue conseil en santé au travail chez Empreinte Humaine : « Un RH n’est ni un médecin ni un ami. C’est important de rester dans votre rôle et d’expliquer au collaborateur ce sur quoi vous pouvez agir et ce sur quoi vous ne pouvez pas. Rappelez-lui aussi les objectifs de cet entretien : définir avec lui des pistes de solution pour améliorer son bien-être au travail. »

Pour contrer la fuite continue en avant, Michel Lejoyeux conseille de redonner sa place au temps présent, de se reconnecter à l’essentiel et de valoriser toutes les victoires, y compris les petites : « Faites du temps présent un moment de pleine conscience, recentrez-vous sur ce qui compte vraiment pour vous, et qui est le plus souvent en dehors de la sphère professionnelle, et passez de l’objectif à court terme à la valeur à long terme. »

Dernier conseil de Sophie Cot-Rascol : ne vous oubliez pas. « Si ces sujets deviennent trop lourds à porter seul, appliquez à vous-même ce que vous recommandez à vos salariés : allez consulter un psychologue ou votre service de santé au travail. Car un RH épuisé n’est plus un RH efficace pour aider les autres ! »

*Étude réalisée entre août 2024 et juillet 2025 auprès de 1 120 professionnels RH, tous métiers et niveaux hiérarchiques confondus. Les résultats reposent sur le WHO-5 (OMS), l’indice propriétaire Teale et 10 questions organisationnelles inspirées du COPSOQ.

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