RH : 5 challenges humains à relever post-Covid
Travail hybride, flex office, onboarding, management… Quels sont les sujets sur lesquels les RH vont devoir plancher dans les mois qui viennent et quelles solutions envisager pour construire l’entreprise de demain ?
A cause de la crise sanitaire, les entreprises ont dû faire preuve d’une extrême réactivité sur des sujets nouveaux : le chômage partiel, le télétravail… Ce contexte particulier a vu émerger des pratiques RH inédites, dont certaines pourraient bien perdurer lorsque la situation sanitaire s’améliorera.
Comment les professionnels RH peuvent-ils écrire l’après-Covid dans leur entreprise ? Quelles cartes ont-ils en main et comment les jouer ? Nous avons énuméré avec Mathilde Bauret, global DRH chez Fifty-Five, une société de conseil en stratégie digitale, les défis humains que les équipes RH sont amenées à relever au cours des prochains mois.
1. Trouver la meilleure recette de travail hybride
« Chez nous, le télétravail n’était pas une option, on n’imaginait pas que cela était possible. Du jour au lendemain, on est passé à 100% de travail à la maison. Les gens n’avaient pas le choix, certains se sont beaucoup réfugiés dans le travail pour lutter contre l’isolement et l’inquiétude générés par la pandémie. Aujourd’hui, on voit que la plupart des salariés ont pris goût au télétravail. Ils apprécient la suppression du temps de transport, le fait de passer plus de temps avec leur famille. On ne peut plus revenir au monde d’avant », constate Mathilde Bauret.
Pour la DRH, le travail hybride tend à devenir la nouvelle norme. « On est actuellement dans une période où tous les RH se demandent qui va faire quoi. Il y aura les observateurs et les précurseurs. On va sans doute devoir mettre en place quelque chose d’hybride, intégrant des questions logistiques de type : faut-il dupliquer l’équipement de bureau des collaborateurs pour qu’ils retrouvent le même à leur maison ? Que vont devenir les open space si les salariés passent une partie de leur temps à la maison ? Quelles tâches effectuer au bureau et à la maison ? »
» La présence au bureau reste indispensable pour apprendre à travailler ensemble, manager par l’exemple, partager les connaissances entre salariés, s’entraider et ainsi créer du lien entre salariés et renforcer le sentiment d’appartenance à son entreprise. »
Au sein de son entreprise, Mathilde Bauret va tester, à partir de la rentrée, une formule de 60% minimum de travail au bureau et 40% à la maison, durant une période donnée à l’issue de laquelle elle demandera aux équipes un retour via un sondage, un outil largement utilisé pendant la pandémie pour jauger le moral des salariés travaillant à distance, avec l’aide du CSE.
« On va demander aux gens de venir au bureau pour certaines tâches : accueillir les nouveaux, préparer les appels d’offres (pitches), aller rencontrer les clients. Toute une partie de la population peut se dire que toutes leurs tâches sont réalisables à distance, comme certains ingénieurs par exemple. Néanmoins, même pour ces catégories de travailleurs, j’estime que la présence au bureau reste indispensable pour apprendre à travailler ensemble, manager par l’exemple, partager les connaissances entre salariés, s’entraider et ainsi créer du lien entre salariés et renforcer le sentiment d’appartenance à son entreprise. »
2. Créer une nouvelle expérience de travail au bureau
Avec l’instauration du travail hybride se pose également la question d’une nouvelle organisation des bureaux. « Il paraît absurde de conserver des places de bureaux inoccupées, fait valoir Mathilde Bauret. On va devoir procéder à des réagencements en prenant en compte les besoins des collaborateurs : plus de salles de réunion, plus d’espaces de visioconférences, plus d’espaces de convivialité. »
Le flex office peut être une solution mais cela suppose d’accompagner les collaborateurs : « Ne plus avoir son espace personnel au bureau constitue un grand changement. Un simple déménagement de bureau peut déjà être perturbant si on ne sait pas à côté de qui on va être assis, si on va se trouver près de la fenêtre ou du couloir. Ne plus avoir de poste de travail personnalisé est psychologiquement encore plus difficile à accepter. On peut imaginer des changements progressifs, par roulements de deux équipes sur un même espace une semaine sur deux par exemple. Ces changements doivent être sagement réfléchis avant d’être mis en place. »
3. Consolider le sentiment d’appartenance des collaborateurs à leur entreprise
Au-delà des lieux, le sentiment d’appartenance du salarié à son entreprise dépend énormément des personnes qu’il y côtoie, souligne la DRH. « A distance, continuer à animer la communauté a représenté un réel défi. Il est important de préserver les groupes en organisant des événements et des moments de convivialité qui soudent les gens entre eux. »
A titre d’exemple, pendant les confinements, Fifty-Five a organisé des jeux avec des photos de stars à associer à des salariés « sosies », des concours photo d’animaux de compagnie, des interviews vidéo amusantes de collaborateurs ou encore des cours de yoga à distance.
« On avait besoin de fun pendant cette période morose. A travers ces initiatives, nous avons cherché à apprendre à mieux nous connaître et à recréer du lien entre les salariés malgré la distance, au bureau de Paris comme avec nos équipes basées à l’étranger. On a d’ailleurs perpétué certaines activités mises en place pendant le confinement. Dernièrement, on a proposé à nos collaborateurs de réaliser un clip global où l’on pourra retrouver les membres de tous les bureaux. Ce type de projet unit les gens de manière amusante, créative et chaleureuse ! »
4. Soigner l’intégration des nouvelles recrues
Fortement bouleversé pendant la crise sanitaire, le parcours d’intégration des nouvelles recrues a dû être adapté. « Habituellement, nos nouveaux collaborateurs passent une semaine en immersion dans nos équipes, en France, où ils sont formés et rencontrent les équipes avec lesquelles ils seront amenés à travailler au quotidien. Mais, comme de nombreuses entreprises, nous avons dû revoir nos processus d’onboarding. »
Les formateurs ont ainsi enregistré des vidéos thématiques pour guider les nouveaux arrivants à distance. Des modules d’e-learning aujourd’hui intégrés à un parcours d’intégration hybride : « Les formations sur des compétences techniques fonctionnent bien en format vidéo. Nous les avons donc conservées et couplées avec des séances de questions-réponses en présentiel. Car la clé de l’intégration des nouveaux est la communication », explique Mathilde Bauret.
Autre idée créative qui a germé pendant le confinement : la mise en place d’un document partagé à l’ensemble des collaborateurs sur lequel les nouvelles recrues se racontent à travers une anecdote. Une initiative que l’entreprise compte perpétuer.
5. Réussir à manager ses équipes à distance
Pour maintenir les liens entre les managers et leurs équipes, Mathilde Bauret a pu s’appuyer sur une pratique déjà à l’œuvre dans son entreprise avant la pandémie : la réunion d’une heure hebdomadaire des managers avec chaque membre de leur équipe. « Cela permet de faire le point sur les missions sur lesquelles la personne travaille, sur sa santé mentale, sur ses envies d’évolution, sur son sentiment par rapport au télétravail… »
« Le bénéfice de cette période est qu’elle a forcé les managers à faire davantage confiance à leurs équipes car ils se sont aperçus que leurs salariés travaillaient bien à distance. Par la force des choses, certains chefs d’équipe qui avaient tendance à micro-manager, à aller trop dans le détail, à être trop sur le dos de leurs équipes, ont dû lâcher prise. Cela a fait du bien à certains ! » remarque la DRH.
Equipes RH et managers ont également joué un rôle important d’accompagnement psychologique de leurs salariés durant la crise sanitaire : « Nous avons répété à nos collaborateurs qu’on était disponibles pour eux et on les a également orientés, quand c’était nécessaire, vers des professionnels de santé via la plateforme mise en place par notre mutuelle. »
En outre, durant la crise, des réunions plénières ont été organisées, chaque mois, pour expliquer les décisions de la direction (mise en place du chômage partiel, modalités du télétravail…) avec transparence et pédagogie. De bonnes pratiques à garder à l’esprit pour imaginer l’entreprise post-Covid.