Repos compensateur : ce que dit la loi
Vous avez probablement déjà entendu parler de la fameuse « récup’ ». Dans le cadre légal, on parle de repos compensateur. On vous explique dans quels cas vos salariés y ont droit.
Le repos compensateur fait partie de ces notions importantes à connaître et à maîtriser dans la gestion des ressources humaines. Lorsqu’un salarié dépasse la durée légale de travail, il ne perçoit pas toujours un paiement en heures supplémentaires. Parfois, c’est du temps de repos qui lui est dû.
Qu’est-ce que le repos compensateur ? Dans quels cas le repos compensateur s’applique-t-il ? Comment le calculer ? Comment organiser sa prise ? Et que risque l’entreprise en cas d’erreur ou d’oubli ? On fait le point sur tout ce que vous devez savoir.
Qu’est-ce que le repos compensateur ?
Le repos compensateur est une forme de compensation pour les heures supplémentaires effectuées par un salarié. Ce temps de repos peut être pris à la place d’une contrepartie financière. Il existe deux types de repos compensateur :
- Le repos compensateur de remplacement (RCR) : l’entreprise peut remplacer tout ou une partie du paiement des heures supplémentaires par du temps de repos.
- La contrepartie obligatoire en repos (COR) : il s’applique automatiquement lorsque le collaborateur dépasse un certain contingent annuel d’heures supplémentaires, fixé par la loi ou par une convention collective.
Dans les deux cas, il s’agit d’un droit pour le salarié et d’une obligation pour l’employeur de gérer ce temps de repos conformément aux règles légales et conventionnelles.
Qui a droit au repos compensateur, et dans quels cas ?
Le repos compensateur de remplacement
Selon l’article L.3121-24 du Code du travail, ce dispositif peut être mis en place si un accord (convention, accord collectif d’entreprise, d’établissement ou de branche) l’autorise. À défaut, dans une entreprise sans délégué syndical, l’employeur peut décider unilatéralement de le mettre en place, mais il doit consulter le CSE (Comité Social et Économique) s’il existe.
Le principe du repos compensateur de remplacement est simple : au lieu de payer le collaborateur pour les heures supplémentaires effectuées, l’employeur lui accorde des heures de repos équivalentes. Ce mécanisme permet de réguler la charge de travail sans augmenter la masse salariale de l’entreprise.
À noter toutefois : les salariés rémunérés au forfait et les cadres dirigeants ne peuvent bénéficier du repos compensateur.
La contrepartie obligatoire en repos
Selon l’article L.3121-30 du Code du travail, la contrepartie obligatoire en repos (COR) entre en jeu lorsque le collaborateur dépasse le contingent annuel d’heures supplémentaires, fixé par défaut à 220 heures. Attention cependant, certaines conventions collectives peuvent prévoir un contingent différent.
La COR est automatique et ne peut être remplacée par une compensation financière. L’employeur est obligé de donner au salarié du temps de repos pour ces heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent.
Situations particulières : travail de nuit, les dimanches et jours fériés
Repos compensateur pour le travail de nuit
Le travail de nuit donne droit à un repos compensateur obligatoire, sous certaines conditions. Pour en bénéficier, le collaborateur doit être considéré comme travailleur de nuit selon le Code du travail, c’est-à-dire :
- Travailler au moins deux fois par semaine, avec un minimum de 3 heures de travail de nuit à chaque fois.
- Avoir accompli au moins 270 heures de travail de nuit sur une période de 12 mois consécutifs.
La période de travail de nuit est habituellement définie entre 21h et 6h.
Repos compensateur pour travail le dimanche
Certains salariés travaillant le dimanche ont droit à un repos compensateur, qui varie selon le secteur :
- Commerces de détail alimentaire : repos compensateur sous forme de journée de repos par roulement toutes les deux semaines.
- Commerces de détail sur autorisation du maire : repos compensateur en temps équivalent, pour un maximum de 12 dimanches par an sur la base du volontariat.
- Dérogation sur autorisation du préfet : le calcul du repos est défini par l’accord ou la décision prise dans l’entreprise.
Repos compensateur pour les jours fériés
Le travail les jours fériés peut donner lieu à un repos compensateur si cela est prévu par un accord ou une convention collective. À l’exception du 1er mai (fête du Travail), les jours fériés ne sont pas obligatoirement chômés et ne donnent pas automatiquement droit à une majoration ou à un repos compensateur.
Cas particulier du 1er mai : le 1er mai, bien que travaillé dans certains secteurs, doit obligatoirement être payé avec une majoration de 100% et non un repos compensateur.
Repos compensateur pour les astreintes
Lorsque des astreintes sont effectuées, le collaborateur peut bénéficier d’un repos compensateur. Le mode de calcul de ce repos est déterminé par un accord collectif, la convention collective, ou par décision unilatérale de l’employeur.
Comment calculer le repos compensateur ?
Le repos compensateur de remplacement
Le calcul du repos compensateur de remplacement dépend du taux de majoration appliqué aux heures supplémentaires. Par exemple, pour un taux de majoration de 25%, chaque heure supplémentaire effectuée donne droit à 1,25 heure de repos compensateur. Si la majoration est de 50%, chaque heure supplémentaire donnera droit à 1h30 de repos.
Exemple : un salarié effectue 5 heures supplémentaires avec un taux de majoration de 25%.
- 1 heure supplémentaire = 1,25 heure de repos compensateur
- 5 heures × 1,25 = 6h15 de repos compensateur
Certaines conventions peuvent aussi prévoir que seules les heures supplémentaires soient compensées par du temps de repos et la majoration payée, et vice-versa.
Exemple : un salarié effectue 4 heures supplémentaires avec un taux de majoration de 25%. Selon ce qui est indiqué dans la convention, il a droit à :
- 4 x 1 = 4 heures de repos compensateur + 4 heures rémunérées à 25%.
- 4 x 0,25 = 1 heure de repos compensateur + 4 heures rémunérées non majorées.
La contrepartie obligatoire en repos
Le mode de calcul de la COR varie en fonction de la taille de l’entreprise :
- Moins de 20 salariés : 50% du temps effectué au-delà du contingent annuel d’heures supplémentaires.
- 20 salariés ou plus : 100% du dépassement du contingent d’heures supplémentaires.
Exemple : un salarié effectue 240 heures supplémentaires sur l’année. Le contingent annuel est de 220 heures, il y a donc un dépassement de 20 heures.
- Si l’entreprise a moins de 20 salariés : 20h × 50% = 10 heures de repos compensateur.
- Si l’entreprise a 20 salariés ou plus : 20h × 100% = 20 heures de repos compensateur.
Organisation de la prise de repos compensateur
Une fois que le droit au repos est ouvert, l’employeur doit permettre au salarié de prendre son repos compensateur dans un délai de deux mois dès que son droit est ouvert, c’est-à-dire dès qu’il a cumulé 7 heures de repos.
Des reports peuvent être autorisés, mais ils doivent être temporaires et justifiés. En cas de contrainte d’organisation, l’employeur peut différer la prise du repos compensateur, mais ce refus doit être motivé et ne pas être abusif.
Existe-t-il un seuil minimal pour prendre ses heures de repos compensateur ?
Pour pouvoir poser ses heures de repos compensateur, le salarié doit avoir cumulé un minimum de 7 heures. Cela signifie qu’il doit accumuler des heures supplémentaires jusqu’à atteindre ce seuil minimum pour faire une demande de repos, demande formulée au moins une semaine à l’avance.
Le Code du travail prévoit également que le repos compensateur doit être pris par tranches d’au moins une demi-journée.
S’ils ne sont pas pris dans les délais, le salarié perd-il ses heures de repos compensateur ?
La réponse est non : le salarié pourra les prendre dans un délai maximum d’un an.
Là encore, une convention ou un accord peut définir des modalités différentes.
Suivi en paie : comment faire ?
L’employeur est dans l’obligation de suivre et de comptabiliser les heures de repos compensateur acquises par chaque collaborateur, et de les mentionner sur un document annexé au bulletin de salaire ou à la fin de la fiche de paie, avec les compteurs de congés payés. Ce suivi doit indiquer le solde des heures disponibles ainsi que la date limite pour prendre le repos.
Lorsqu’un salarié est absent en raison d’un repos compensateur, cette absence est considérée comme du temps de travail effectif et donc comptabilisé dans le calcul des congés payés.
Quelles sanctions pour l’employeur en cas de manquement ?
Un salarié dispose de deux ans pour engager une action en justice, à partir du moment où il prend connaissance de ses droits. S’il a quitté l’entreprise, ce délai commence à courir à partir à la rupture de son contrat.
L’entreprise qui ne respecte pas les règles concernant le repos compensateur s’expose à plusieurs risques, notamment :
- Le paiement des heures non prises, parfois avec une majoration ;
- Des dommages et intérêts si un préjudice est prouvé par le salarié ;
- Des amendes administratives ou des sanctions en cas de contrôle par l’inspection du travail.
Les prud’hommes considèrent que c’est à l’employeur de prouver que le salarié a pu prendre ses droits au repos compensateur. Il est donc important pour l’employeur de suivre et de documenter correctement ce temps de repos, afin d’éviter toute contestation ou sanction.
En résumé :
- Qu’est-ce que le repos compensateur ?
- Compensation en temps de repos pour les heures supplémentaires effectuées par un salarié, à la place d’une rémunération supplémentaire ;
- Il en existe deux types : le repos compensateur de remplacement (RCR) et la contrepartie obligatoire en repos (COR).
- Qui a droit au repos compensateur ?
- RCR : le salarié peut bénéficier du repos compensateur si un accord collectif le prévoit ou, dans certaines entreprises, si l’employeur décide unilatéralement de l’instaurer (sauf pour les cadres dirigeants et les personnes travaillant au forfait) ;
- COR : obligatoire si dépassement du contingent d’heures supplémentaires (220 heures par an en général).
- Repos compensateur : situations particulières
- Travail de nuit : le salarié doit effectuer au moins 3 heures de travail de nuit par semaine ou avoir travaillé 270 heures de nuit sur 12 mois pour en bénéficier ;
- Travail le dimanche : le repos compensateur varie en fonction du secteur (commerces alimentaires, autorisation municipale…), avec des règles spécifiques pour chaque cas ;
- Jours fériés : le travail effectué un jour férié peut donner droit à un repos compensateur, sauf pour le 1er mai qui doit être payé avec une majoration de 100% ;
- Astreinte : si un salarié est en astreinte, il peut bénéficier d’un repos compensateur, avec un mode de calcul défini par l’accord collectif ou la décision de l’employeur.
- Calcul du repos compensateur
- RCR : calcul basé sur le taux de majoration des heures supplémentaires ;
- COR : en fonction de l’effectif de l’entreprise.
- Organisation de la prise de repos compensateur
- Minimum de 7 heures accumulées avant de pouvoir poser son repos ;
- Repos à prendre par tranches d’au moins une demi-journée dans un délai de deux mois suivant l’ouverture des droits ;
- Report possible, mais justifié et temporaire.
- Suivi en paie : l’employeur doit comptabiliser les heures et indiquer le solde et la date limite de prise sur le bulletin de salaire ou en annexe.