Rapport au travail : les attentes des jeunes sont-elles si différentes de celles des autres actifs ?
Pas autant qu’on veut nous le faire croire !
« Les jeunes sont-ils fâchés avec le travail ? », « ‘’Ils ne savent pas quoi faire, ils ne veulent pas travailler’’… Mais que veulent les jeunes ? » Le rapport au travail de la nouvelle génération fait régulièrement les gros titres. On les dit souvent moins investis dans leur travail, moins fidèles à leur entreprise, adeptes du 100% télétravail, moins respectueux de la hiérarchie.
Le travail reste une valeur importante pour les jeunes
Une étude, réalisée par l’Apec et Terra Nova, publiée le 1er février, vient nuancer largement ce tableau et montrer que l’entreprise est loin d’être le théâtre d’un conflit de générations. Tout d’abord parce que les jeunes n’accordent pas une place moins importante dans leur vie que les actifs plus âgés : 36% des moins de 30 ans estiment que leur travail est aussi important que les autres sphères de leur vie (familiale, sociale, etc.) et 11% jugent même qu’il est plus important qu’elles. On retrouve une proportion similaire chez les 30-44 ans et même légèrement inférieure chez les 45-65 ans.
Le sondage bat en brèche un certain nombre d’autres idées reçues par rapport à la nouvelle génération. Ainsi, les moins de 30 ans se disent prêts à s’investir dans leur travail au-delà du simple rapport contractuel qui les lie à leur employeur. Notamment en cas de pic d’activité : 78% de cette tranche d’âge se déclare capable de travailler davantage si les circonstances l’exigent et qu’ils sont plus rémunérés, et même 52% en l’absence de contreparties. En outre, 70% des jeunes actifs affirment qu’ils sont disposés à remplir des missions qui ne figurent pas dans leur fiche de poste.
Autre cliché : les jeunes collaborateurs seraient allergiques à l’autorité. Les chiffres de l’Apec prouvent le contraire. 40% des moins de 30 ans acceptent par principe les décisions de leur hiérarchie et 43% disent les appliquer à partir du moment où ils comprennent ces choix. « Tout au plus peut-on dire que les jeunes expriment un peu plus que leurs aînés le souhait de voir leur manager soigner le dialogue et le partage d’informations », notent les auteurs de l’étude.
Un travail bien payé et intéressant : le Graal de toutes les générations
L’enquête montre aussi que les principales attentes des moins de 30 ans concernant leur travail sont identiques à celles de leurs aînés. Dans toutes les catégories d’âges, on retrouve dans le trio de tête : un travail bien rémunéré (cité par 55% des 18-29 ans, 55% des 30-44 ans et 51% des 45-65 ans), intéressant (cité par 41% des 18-29 ans, 44% des 30-44 ans et 49% des 45-65 ans) et qui permet de concilier facilement vie personnelle et vie professionnelle (cité par 34% des 18-29 ans, 38% des 30-44 ans et 45% des 45-65 ans).
Seule différence notable entre générations : les moins de 30 ans sont davantage désireux de progresser rapidement dans leur carrière. 89% d’entre eux souhaitent être mieux rémunéré, 80% aspirent à davantage d’autonomie au travail, 69% souhaitent avoir plus de responsabilités et 50% briguent un poste de manager. Ce qui explique que les jeunes candidats sont particulièrement attentifs, au moment de postuler, au fait que l’entreprise visée réponde à leur désir de montée en compétences et leur offre de belles perspectives d’évolution professionnelle.
Les 6 profils des jeunes travailleurs
En conclusion, l’Apec et Terra Nova observent que les différences de rapport au travail se fondent davantage sur l’origine sociale et la nature de l’emploi occupé que sur l’âge des actifs. Ils distinguent ainsi six profils types de jeunes actifs :
- Les ambitieux (qui regroupent 39% des moins de 30 ans) sont des actifs bien lotis, provenant souvent d’un milieu social aisé, souvent diplômés du supérieur et bien insérés dans le monde du travail. Ils sont plus attachés que la moyenne à leur entreprise et sont très investis dans leur travail. Ils affichent leur volonté de travailler dans des entreprises prestigieuses et d’y évoluer rapidement.
- Les satisfaits (qui représentent 14% des moins de 30 ans) sont très diplômés et facilement insérés dans le monde du travail. Ils estiment que le métier qu’ils exercent correspond à ce qu’ils souhaitaient faire. Comme les ambitieux, ils sont en phase avec leur entreprise mais y sont moins investis et expriment peu de désirs de changement professionnel.
- Les attentistes (11% des moins de 30 ans) regroupent des jeunes issus de tous les milieux sociaux et de tous niveaux d’étude, qui ont le sentiment que leur travail ne correspond pas à leur niveau d’études et à leurs souhaits. Ils expriment de nombreuses frustrations vis-à-vis de leur travail et aimeraient sortir de leur routine professionnelle et gagner en responsabilités, en rémunération et en autonomie.
- Les distanciés (6% des moins de 30 ans) se complaisent dans un train-train qu’ils jugent confortable et ne souhaitent pas de changements fondamentaux. Ils sont majoritairement issus de familles au capital économique modéré, titulaire d’un niveau bac ou bac+2.
- Les combatifs (20% des moins de 30 ans) ont souvent vu leurs parents travailler beaucoup sans être rémunérés à la hauteur de leurs efforts. Surreprésentés parmi les ouvriers, ils sont en moyenne moins diplômés que les autres jeunes actifs et s’estiment mal préparés au monde du travail. 42% d’entre eux exercent un métier qu’ils n’ont pas choisi. Cette catégorie est particulièrement exposée aux risques physiques au travail. Ils aimeraient que leur travail paie plus et sont prêts à changer d’entreprise, voire de métier ou de statut pour gagner plus d’argent.
- Les découragés (10% des moins de 30 ans) rassemblent ceux qui ne voient pas le travail comme un vecteur d’épanouissement. On les retrouve souvent au sein des milieux populaires et principalement dans les zones rurales. Ils ont un niveau bac ou inférieur et s’estiment peu préparés à la vie professionnelle. Plus exposés que la moyenne au stress et à l’épuisement professionnel, ils sont insatisfaits de leur situation actuelle et affichent une certaine résignation. Ils cherchent à trouver des sources d’épanouissement en dehors du travail.