Le « pleasanteeism », cette joie de façade au travail qui a un coût

Le mot RH de la semaine. Sabrina Redouane, experte en recrutement au Mercato de l’emploi, explique les conséquences de cette attitude qui consiste à faire bonne figure, quoi qu’il arrive, au travail.

pleasanteeism
« Le "pleasanteeism" est l'art de masquer ses véritables émotions pour se conformer à une image de productivité et de bien-être. » © skypicsstudio/stock adobe.com

« Nous avons tous entendu parler du présentéisme, cette tendance des employés à se rendre au bureau même malades, pour « montrer qu’ils sont là ». Mais une nouvelle tendance, plus insidieuse, existe : le pleasanteeism. Si le présentisme est une question de présence physique, le pleasanteeism, lui, se réfère davantage à la présence émotionnelle. »

Le masque du bonheur au travail

« Le pleasanteeism, c’est le fait de se sentir obligé d’afficher un visage joyeux et une attitude positive, même quand on est stressé, angoissé ou en difficulté. C’est l’art de masquer ses véritables émotions pour se conformer à une image de productivité et de bien-être. Ce phénomène est alimenté par plusieurs facteurs, comme l’incertitude économique, la pression du retour au bureau ou les défis personnels. Une étude de l’assureur Lime Global révèle que 75% des employés britanniques se sentent obligés de faire bonne figure au travail, un chiffre en forte augmentation. »

« Cette mascarade a un coût. Elle engendre un cercle vicieux de silence et de souffrance, où les employés n’osent pas parler de leurs soucis de santé mentale, par peur d’être jugés ou de mettre leur emploi en péril. En cachant leur mal-être, les employés se retrouvent seuls face à leurs difficultés, ce qui peut mener au burnout, à la baisse de la productivité et à un manque d’engagement. »

Créer un environnement de confiance

« Pour éviter d’en arriver là, il est nécessaire de briser le tabou de la santé mentale. La première étape est de normaliser le dialogue sur la santé mentale. Les dirigeants et managers doivent faire comprendre qu’il est normal de ne pas toujours se sentir bien. En instaurant une culture de l’ouverture, où l’on peut exprimer ses sentiments sans crainte des répercussions, on encourage les employés à être honnêtes et à chercher de l’aide en cas de besoin. »

« Les entreprises ont un rôle à jouer dans la promotion de la santé mentale positive. Des formations peuvent être mises en place pour aider les employés à comprendre que les émotions négatives font partie de l’expérience humaine. Mieux on comprend ses propres émotions, plus il est facile de les exprimer et d’y faire face. »

« Les employeurs doivent également encourager la vulnérabilité et inciter leurs leaders à montrer l’exemple. En partageant leurs propres difficultés, ces derniers prouvent que la vulnérabilité n’est pas une faiblesse, mais une force. Cela crée un climat de confiance et encourage les employés à faire de même. Un dirigeant qui n’affiche aucune faille donne l’impression que la souffrance n’a pas sa place dans l’entreprise. »

Une stratégie gagnant-gagnant

« Ignorer le pleasanteeism, c’est mettre en péril la performance de l’entreprise à long terme. Les employés qui souffrent en silence ne peuvent pas donner le meilleur d’eux-mêmes. En investissant dans le bien-être émotionnel de leurs collaborateurs, les entreprises ne font pas qu’un geste de générosité ; elles investissent dans leur propre succès. »

« Pour qu’une entreprise prospère, elle doit avoir une culture forgée sur la confiance et l’ouverture. En encourageant les employés à parler de leurs problèmes, on les aide à s’épanouir et on construit une équipe plus forte, plus résiliente, et plus productive. »

« Le pleasanteeism est un signal d’alarme qui nous rappelle que derrière chaque employé se cache un être humain. En tant que professionnels des ressources humaines, il est de notre devoir de créer des environnements où chacun peut être authentique, et où l’on peut être à la fois productif et honnête sur son bien-être. »

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