New York : comment les entreprises appliquent-elles la loi sur la transparence des salaires ?

La mention d’une fourchette de salaire sur les offres d’emploi est obligatoire dans la Grosse Pomme depuis le début du mois de novembre.

Toutes les offres pour un emploi à New York doivent depuis le 1er novembre contenir une fourchette de salaire.
Toutes les offres pour un emploi à New York doivent depuis le 1er novembre contenir une fourchette de salaire. © Luciano-Mortula-LGM/stock adobe.com

Depuis le 1er novembre, toute offre d’emploi pour un poste à pourvoir dans la ville de New York doit afficher le salaire correspondant. L’objectif premier de cette loi, qui s’impose aux entreprises de quatre salariés ou plus, est de réduire les inégalités de salaires qui se perpétuent au détriment des femmes et des minorités ethniques. Mais aussi de redonner du poids aux candidats dans les négociations salariales.

Le texte stipule que les employeurs doivent indiquer les salaires minimum et maximum pour chaque offre d’emploi, promotion ou offre de mobilité interne, en toute « bonne foi », c’est-à-dire ceux qu’ils « pensent honnêtement être prêts à offrir aux candidats retenus, au moment où ils publient l’offre d’emploi ».

Un salaire du simple au triple

Un flou juridique qui donne lieu à des interprétations extensives de la notion de « bonne foi ». Certains employeurs ne jouent pas franchement le jeu de la transparence des salaires, comme ont pu le relayer plusieurs internautes sur Twitter. Dans leur viseur, des offres d’emploi comprenant une fourchette de salaire allant du simple au double, voire au triple, ce qui n’aide pas vraiment le candidat à se situer sur le marché ni à se projeter dans son futur poste.

The Guardian cite notamment l’exemple du cabinet Deloitte, qui propose un salaire compris entre 86 800 et 161 200 dollars par an, ou encore celui du Wall Street Journal, qui affiche une fourchette de 140 000 à 450 000 dollars par an pour un poste de chef de service. Une offre d’emploi de Citigroup, mentionnant une rémunération de 0 à 2 millions de dollars, a fait vivement réagir les internautes, avant que la direction ne fasse savoir qu’une erreur informatique était à l’origine de ces chiffres absurdes.

Des points de blocage pour certains employeurs

Si l’on comprend aisément que le niveau de rémunération doit être adapté en fonction de la qualification, de l’expérience professionnelle et du profil du candidat, comment justifier de tels différentiels ? Dans un contexte d’inflation et de Grande Démission, certains employeurs ont gonflé les salaires à l’embauche et redoutent que la publicité de ces chiffres n’incite les employés en poste à demander une revalorisation plus importante de leur rémunération. Ou même à démissionner s’ils jugent qu’ils n’ont plus de perspectives d’évolution intéressantes dans leur entreprise actuelle.

Pour s’abstenir de publier les salaires sans enfreindre la loi, certains employeurs pourraient être tentés d’arrêter de diffuser des offres d’emploi et inciter les candidats à envoyer leur CV directement à une adresse mail générique, présage le Wall Street Journal.

Un effet boost sur les recrutements

Pourtant, d’après Beverly Neufeld, présidente du réseau PowHer New York, qui promeut l’égalité salariale femmes-hommes, les entreprises ont beaucoup plus à gagner qu’à perdre en divulguant les salaires dès leurs offres d’emploi : « La loi n’a pas pour finalité de sanctionner mais de faire progresser les entreprises, explique-t-elle à Gothamist. Nous assistons à un réel changement de culture. Pour certains employeurs, ça va prendre un peu plus de temps de se rendre compte qu’ils ont tout intérêt à adopter la règle de la transparence », notamment en matière d’attraction et de rétention des talents. Dans le Colorado, une loi similaire, entrée en vigueur l’année dernière, a certes réduit le nombre d’offres d’emploi publiées mais a augmenté significativement le nombre de recrutements dans l’Etat.

Quelle fourchette de salaire peut être jugée acceptable pour un candidat ? De l’avis de Robin Blaire-Batte, membre du syndicat New York’s Communication Workers Local 1180, interviewée par The Guardian, un écart de 30 000 à 40 000 dollars entre salaire minimum et salaire maximum serait raisonnable. Si des écarts plus importants persistent, la Commission des Droits de l’Homme de New York, en charge de l’application de la loi, pourrait bien apporter des précisions au texte.

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