Comment rendre un métier sexy pour mieux attirer les candidats ?
Le métier sexy des uns n’est pas le métier sexy des autres.
Rendre un métier séduisant, oui, mais pas en dépit du bon sens. L’objectif, ici, n’est pas d’appliquer un vernis cosmétique sur des offres qui vous semblent compliquées à pourvoir, mais plutôt de trouver les bons leviers à actionner pour valoriser ces métiers qui font la richesse de votre entreprise. On a cherché à en savoir plus, avec Vanessa Williot-Bertrand, directrice de la communication de l’agence Neno.
L’image métier, tout un art
« Chez Neno, nous avons déjà accompagné de nombreuses entreprises avec des difficultés de recrutement, qui ont du mal à faire venir des profils chez eux. Nous nous sommes rendu compte que la problématique n’était pas la réactivité ou l’attractivité de l’entreprise, mais celle d’un métier. Nous nous sommes donc penchés sur la problématique d’image métier », raconte Vanessa. « Au-delà de l’image entreprise et de la marque employeur, il y a un problème d’image métier. Nous avons donc lancé une expertise pour valoriser l’image des métiers, cela rejaillira sur l’entreprise et l’entreprise s’appropriera ces éléments de valorisation pour pallier ses difficultés de recrutement. »
Le sujet intéresse naturellement les entreprises privées avec un déficit ou des biais d’image ainsi que les fédérations et les organismes de branches qui doivent agir à de très grandes échelles : « Comment rendre un métier — une branche sexy ? »
Vanessa est partie du principe qu’il y a des métiers qui pâtissent de préjugés, d’idées reçues ou qui sont, tout simplement, méconnus : « On peut avoir une image fausse d’un métier, une image préconçue. Il y a aussi des métiers inconnus, d’autres qui se créent. Si on reste crispé sur l’idée que les métiers que l’entreprise recrute ne sont pas attractifs, on pourra tout faire pour rendre la marque employeur de l’entreprise la plus attrayante possible, ça ne fonctionnera pas. Faire le détail de tous les avantages et dire à quel point cette entreprise est géniale restera vain si les postes ont un déficit d’image en interne ou s’ils ne sont pas en accord avec la réalité. »
Il y a donc un intérêt très fort de communiquer sur les métiers, changer les préjugés, changer le regard sur des métiers qu’aujourd’hui on connaît mal : « Je pense que le fondement pour rendre un métier sexy, c’est la connaissance de ce métier et de son secteur. On crée une proximité, on fait preuve d’empathie, on essaie de comprendre la réalité de chaque métier. »
Identifier les métiers et leurs avantages, sans naïveté et au-delà des stéréotypes
« Tout métier comporte des avantages comme des inconvénients. L’objectif n’est pas de dire que tel ou tel métier est super et parfait, mais plutôt d’acquérir une connaissance à 360°, avec les avantages et les inconvénients. Pour pouvoir valoriser ce qui va être le plus important. Au fond, ce que nous cherchons, c’est l’émotion », explique Vanessa. En suscitant l’émotion chez un candidat en quête de sens, on crée les conditions de l’engagement.
Qu’est-ce qui fait qu’un salarié ou collaborateur potentiel se lève le matin ? Son plaisir de travailler ? Sa contribution à un projet collectif ? Son rôle utile à l’échelle de la société ? Chacun a ses motivations propres : « On caricature certains métiers comme ceux de caissière ou éboueur, or ce sont des métiers utiles. Pour d’autres, dans l’industrie ou l’artisanat notamment, c’est la pénibilité qui est montrée du doigt, alors qu’ils ont connu une évolution impressionnante grâce à la technologie. Heureusement, la notion d’utilité est aujourd’hui de plus en plus valorisée. »
Comment s’y prendre ? D’abord, faire connaissance
La première chose à faire pour rendre un métier sexy, « c’est d’aller vraiment à la rencontre des gens qui travaillent dans l’entreprise. Pour les comprendre, pour savoir ce qui est compliqué dans leur quotidien, et ce qui est positif, ce qui les fait continuer, ce qui les motive. »
Avant de rédiger une belle fiche de poste, « immergez-vous au sein de vos équipes, demandez-leur à quoi ressemblent leurs journées. Si on veut pouvoir faire passer cette émotion, cette envie, il faut aller la chercher auprès des gens qui font vraiment ce métier en les interviewant. » Pour convaincre les autres, il faut être convaincu soi-même, « les RH doivent être les premiers ambassadeurs des métiers de leur entreprise et partager ce storytelling dans les offres publiées. »
Les vidéos et témoignages sont un relais puissant pour raconter ces histoires : « Ce sont les meilleurs moyens de retranscrire une émotion. Le format vidéo et les témoignages sont les formats les plus engageants, notamment grâce aux réseaux sociaux. Nous préconisons d’aller au-delà des vidéos collaborateurs, d’aller jusqu’à solliciter les anciens collaborateurs et les clients. »
Quant au volet écrit de vos offres, « il est primordial d’attacher de l’importance à l’histoire du métier en apportant de la perspective. L’authenticité du métier, avec ses beaux aspects et ses moins bons. Si tu vends du rêve et qu’en fait, tu te rends compte que ce n’est pas du tout en adéquation avec la réalité, tu perds les candidats, et donc du temps et de l’argent. »
Pour atteindre cet objectif d’authenticité, il faut se tourner vers ses collaborateurs parce que ce sont eux qui vont avoir un discours de vérité : « Rien ne vous interdit de dire que vous avez conscience de ce qui est compliqué. Il peut d’ailleurs être très intéressant et efficace de prendre le contre-pied d’un métier considéré comme peu séduisant en mettant en exergue tous les préjugés pour mieux les contrer et interpeller les candidats »
S’appuyer sur un réseau, utiliser la gamification
Certains métiers en tension sont indispensables, avec un rôle essentiel : « C’est la raison pour laquelle nous misons beaucoup sur la proximité avec tous les acteurs de l’emploi sur le terrain en développant des partenariats forts avec des missions locales, des associations ou des acteurs institutionnels. Le but est de leur présenter les métiers pour qu’ils orientent mieux vers eux ! »
Pour les candidats les plus jeunes, la gamification peut être un levier intéressant : « Nous mettons en place des challenges pour attirer. Par exemple, le domaine de la méthanisation est une source d’énergie renouvelable plutôt méconnue. Ce sont souvent des agriculteurs qui en font une activité complémentaire et cela devrait être beaucoup plus valorisé. On aimerait bien que les futurs agriculteurs, qui sont de futurs probables méthaniseurs, soient sensibilisés à ce métier. C’est très technique, complexe et pointu. Nous avons donc créé un hackathon d’une journée que l’on a déployé dans les lycées et écoles agricoles. »
Oser une communication décalée
Pour Vanessa, « une communication décalée est toujours une bonne solution pour résoudre des problèmes de notoriété ou de réputation. Nous avons aussi les communications du type “poils à gratter” qui vont casser les idées reçues et les mettant en exergue. Mais en tant qu’agence, je pense que notre vraie valeur ajoutée, c’est notre capacité à être dans l’empathie, avec une vraie volonté de comprendre ces métiers, comment ils fonctionnent, et le sens qu’ils portent. En mettant les collaborateurs dans la boucle dès le départ. On aime les gens avec leurs qualités et leurs défauts. C’est pareil pour un métier ! »