Loi sur le partage de la valeur : comment anticiper son application dès vos négociations salariales 2024
Comment mettre en place, dès à présent, des dispositifs de partage de la valeur dans votre entreprise ?
Les parlementaires ont adopté la loi sur le partage de la valeur le 29 novembre 2023. Si les nouvelles obligations ne s’appliqueront qu’à partir de 2025, de nombreuses entreprises souhaitent intégrer des dispositifs de partage de la valeur à leurs négociations salariales dès 2024. On fait le point avec Émilienne Grenier, responsable expertise rémunération chez Ferway, un outil qui recense les salaires du marché.
Ce que la loi va changer pour les entreprises de 11 à 49 salariés
« La philosophie de la loi, c’est qu’un maximum de salariés aient accès à au moins un dispositif de redistribution de la valeur créée au sein de l’entreprise, qu’il s’agisse de performance économique, de croissance, de qualité, de satisfaction client… », précise l’experte.
Aujourd’hui, seule une entreprise sur cinq de moins de 50 salariés, en moyenne, a mis en œuvre un dispositif de partage de la valeur. Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, les PME comptant 11 à 49 salariés, ayant réalisé un bénéfice net fiscal d’au moins 1% de leur chiffre d’affaires durant trois années consécutives, seront obligées de mettre en place une prime de partage de la valeur (PPV), d’intéressement ou de participation.
Et pour les autres ?
Les entreprises de plus de 50 salariés sont déjà tenues de mettre en place un plan de participation. La nouvelle législation n’aura que peu d’impact pour elles. « Elles devront néanmoins tenir compte du fait que les dispositifs s’étendent à d’autres acteurs du marché, qui pourront potentiellement les challenger sur cet aspect », souligne Émilienne Grenier.
Quel(s) dispositif(s) choisir ?
La loi laisse aux entreprises le libre choix du mode de partage de la valeur. « Elles doivent en faire un atout. C’est-à-dire être en mesure d’expliquer pourquoi elles privilégient tel ou tel dispositif en fonction de leur culture d’entreprise et de leurs valeurs », conseille Émilienne Grenier.
Le montant de la prime de participation est calculé à l’aide d’une formule mathématique : [1/2 (bénéfice net – 5% des capitaux propres] X [salaires/valeur ajoutée de l’entreprise]. « Un calcul assez complexe à expliquer aux salariés, admet la spécialiste en rémunération. L’intéressement offre davantage de souplesse et de latitude à l’employeur, selon elle. La prime d’intéressement se fonde sur des indicateurs collectifs de performance définis par l’entreprise : chiffres d’affaires, marges, qualité, productivité, satisfaction… »
Autre avantage de l’accord d’intéressement : il est amené à évoluer plus régulièrement, car il court sur une durée limitée (souvent trois ans), à l’inverse de l’accord de participation à durée indéterminée.
Quant à la PPV, qui s’est substituée à la Pepa (prime exceptionnelle pour le pouvoir d’achat), elle constitue un levier facile à actionner pour apporter un soutien financier à ses collaborateurs, en particulier en période d’inflation marquée. « Contrairement aux autres dispositifs, elle peut être versée à n’importe quel moment de l’année et jusqu’à deux fois. Cet outil, simple et peu coûteux, est très utilisé aujourd’hui, car il présente de nombreux intérêts : montant fixé par l’employeur de manière unilatérale, exonéré de charges, ne nécessitant pas d’accord d’entreprise à mettre en place. Mais il faut faire attention, car la PPV peut être interprétée comme le fait du prince, un cadeau qui pourra être considéré comme dû chaque année par les salariés. À mon sens, ça doit rester un joker, un complément éventuel aux dispositifs d’intéressement et de participation. »
De l’importance de bien communiquer
Quelle que soit l’option retenue, la responsable expertise rémunérations conseille de communiquer régulièrement sur les dispositifs de partage de la valeur auprès de ses salariés : « Ces dispositifs prennent de plus en plus de place dans les NAO avec les représentants des salariés. Il faut être attentif à bien expliquer aux partenaires sociaux en quoi ces éléments viennent compléter les augmentations des salaires fixes, qu’ils ont le mérite de venir étoffer le package de rémunération en apportant une réponse complète et sur la durée aux salariés. »
Tout au long de l’année, elle recommande ensuite aux entreprises de faire des points d’étapes : quel chemin reste-t-il à parcourir pour atteindre les objectifs qui conditionnent le versement des primes d’intéressement et de participation ?
Enfin, la politique de l’entreprise en matière de partage de la valeur doit aussi être transparente pour le candidat. Les dispositifs peuvent, par exemple, figurer sur l’offre d’emploi et être explicités par le recruteur dans le cadre de l’entretien d’embauche.