Comment l’IA a déjà réduit les recrutements des jeunes diplômés

Une vaste étude américaine expose les premiers effets de l’explosion de l’intelligence artificielle au travail sur le marché de l’emploi outre-Atlantique.

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Les Américains âgés de 22 à 25 ans travaillant dans des secteurs très exposés à l'IA ont moins d'opportunités d'emploi que les autres actifs. © TA design/stock adobe.com

Des milliers d’emplois supprimés chez Microsoft, Meta, Salesforce ou Google : combien de travailleurs seront remplacés par l’IA au cours des prochaines années ? Dans son étude Future of Jobs Report 2025 publiée en janvier, le Forum économique mondial établissait que 41% des entreprises envisageaient de supprimer des postes d’ici 2030, compte tenu des progrès de l’IA. Mais, quels sont les profils sur la sellette et quels sont les premiers impacts de l’essor de cette technologie sur les recrutements des entreprises ?

Une étude*, menée par Erik Brynjolfsson, Bharat Chandar et Ruyu Chen, chercheurs à l’université de Stanford, et parue le 26 août, se penche sur les effets de la généralisation de l’intelligence artificielle sur les dynamiques du marché de l’emploi américain. Entre fin 2022 (à partir du développement de l’IA générative, impulsé par le lancement de ChatGPT) et juillet 2025, les auteurs ont scanné, dans le logiciel ADP, les fiches de paie de 25 millions de salariés travaillant dans 90 000 entreprises aux Etats-Unis.

Une « quiet erosion » de l’emploi des 22-25 ans

Il en ressort que la massification du recours à l’IA au travail affecte principalement les jeunes diplômés, âgés de 22 à 25 ans, exerçant des métiers très exposés à l’automatisation par IA, tels que ceux du service client, de la comptabilité, du support administratif ou encore du développement logiciel d’entrée de gamme. Dans ces secteurs, le volume d’offres proposées à des juniors a baissé de 13% entre 2022 et 2025. Les chercheurs américains qualifient ce phénomène de « quiet erosion », c’est-à-dire non pas une vague massive de licenciements de profils junior, mais une diminution progressive des offres d’emploi visant des candidats sortant d’études ou débutants.

A l’inverse, les opportunités d’emploi restent relativement stables, voire augmentent, pour les populations de 35 ans et plus exerçant des métiers très exposés à l’IA. Sur la même période, l’emploi est également resté stable ou en augmentation dans les professions les moins exposées à l’IA (aide-soignant, cuisinier, chauffeur, par exemple), et ce toutes catégories d’âge confondues.

L’exception des travailleurs « augmentés par l’IA »

Comment expliquer ces chiffres ? D’après les chercheurs, l’IA a été conçue pour être performante sur des connaissances théoriques et des savoir-faire techniques standardisés (saisie de données, tests logiciels simples…), des compétences que les jeunes diplômés acquièrent lors de leur cursus scolaire. En revanche, l’algorithme est, aujourd’hui, moins bien entraîné sur des connaissances empiriques, agrégées par les travailleurs au fil de leurs expériences professionnelles (intuition, intelligence émotionnelle, jugement…).

Il est intéressant de noter que tous les métiers impactés par l’IA ne le sont pas de la même manière, en fonction des missions comprises dans leur fiche de poste. Ainsi, les postes junior les plus concurrencés par l’IA sont ceux qui concentrent un fort taux de tâches automatisables par l’IA (génération de contenus, synthèse, analyse de document…). En revanche, les postes où les jeunes travailleurs sont « augmentés par l’IA » continuent, eux, d’embaucher. Par salarié « augmenté », on entend, par exemple, un collaborateur qui utiliserait l’IA comme un assistant pour perfectionner une présentation, expliquer un concept ou vérifier un raisonnement.

Dernier enseignement notable de l’étude américaine : l’automatisation liée à l’IA n’a pas eu d’impact significatif sur le niveau de rémunération des salariés, quel que soit leur âge.

*Etude basée sur les fiches de paie du logiciel ADP de 25 millions de salariés à temps plein, âgés de 18 à 70 ans, et travaillant dans 90 000 entreprises aux Etats-Unis, sur une période allant d’octobre 2022 à juillet 2025.

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Bien s’équiper pour bien recruter