« S’adapter à la GenZ en cultivant l’esprit Club Med »
Capacité à recruter la génération Z, rétention des saisonniers, évolution des métiers… Caroline Basset, DRH de Club Med France, revient sur ses enjeux 2025.

Quels sont vos prévisions de recrutement pour 2025 ?
Chaque année, notre nombre de recrutements reste relativement constant, autour de 3 500 par an. Bien que nous réussissions à améliorer nos taux de fidélisation, les recrutements se poursuivent grâce à l’ouverture de nouveaux resorts, comme celui prévu en Afrique du Sud en 2026. De plus, de nouveaux métiers ont émergé, notamment dans les domaines de l’hygiène et de la sécurité. Nous recrutons également des chargés de communication qui sont responsables des contenus numériques et des réseaux sociaux.
Comment arrivez-vous à attirer la génération Z en termes de recrutements ?
Le Club Med vient de fêter ses 75 ans et nous avons toujours su intégrer les différentes générations dans nos équipes. La génération Z a très vite évolué, plus que le monde de l’entreprise en lui-même. Il faut s’adapter à elle, ce n’est pas l’inverse. C’est une génération qui a une forte maîtrise des technologies numériques, les réseaux sociaux influencent beaucoup son mode de vie, ses orientations professionnelles aussi. Les jeunes de cette génération n’ont pas peur de changer de métier. Ils ont aussi une conscience sociale et environnementale accrue. Pour les attirer, nous adaptons notre proposition employeur : nous renforçons nos engagements RSE, travaillons sur notre empreinte carbone, la gestion des déchets…… C’est aussi une génération qui a besoin de vivre des expériences authentiques, et c’est en ça que nous cultivons cet esprit Club Med et qu’on le valorise comme une expérience professionnelle unique, porteuse de sens et d’engagement.
Concrètement, comment faites-vous vivre ça ? C’est un travail sur la marque employeur ?
C’est bien plus qu’un simple métier, nous offrons une véritable expérience de vie unique. Que l’on soit chef de cuisine, réceptionniste, employé d’entretien, animateur pour enfants, plombier ou infirmier, ce que nous offrons va au-delà d’une fonction : c’est une immersion dans un mode de vie et une expérience professionnelle singulière empreinte de l’esprit Club Med. Il est profondément enraciné dans nos valeurs et est difficile à décrire car il ne s’apprend pas, il se vit. Il se traduit par l’envie d’aller vers les autres, de créer des liens, mais aussi de s’impliquer dans des événements qui transcendent son rôle professionnel. C’est incarner au quotidien nos valeurs de gentillesse, de multiculturalité et de convivialité. Cet esprit est précieux, et nous devons veiller à le préserver, car il constitue notre véritable différence.
Vous disiez que vous cherchez à augmenter le taux de fidélisation de vos saisonniers. Pourquoi la rétention est importante pour vous ?
La rétention de nos équipes en resort est essentielle et constitue l’un des trois axes principaux de la DRH France aux côtés du recrutement et de la formation. Nous avons observé une diminution significative de notre taux de turnover ces dernières années, avec une moyenne cet hiver d’environ 9% contre 17-20% pendant certains saisons difficiles. Cela reste une priorité pour nous. D’une part, à cause des coûts élevés liés au recrutement pour une entreprise de notre taille. D’autre part, le développement des compétences de nos équipes est une priorité car il nous aide à protéger notre ADN qu’est l’esprit Club Med dont on parlait. Nous accordons toujours une grande importance à la promotion interne au sein de nos resorts : 100% de nos chefs de villages viennent de l’interne.
Comment l’IA s’inscrit-elle dans votre quotidien de DRH ?
L’intelligence artificielle fait désormais partie intégrante de notre quotidien. Nous menons actuellement six projets majeurs intégrant l’IA, allant d’un chatbot interne pour nos équipes commerciales à des outils de pilotage pour les achats. Côté RH, nous utilisons un modèle de type GPT pour faciliter l’accès à la documentation juridique et aux process RH. Nous avons également développé un projet test « GO Match », qui optimise l’affectation de nos équipes (GO-GE) en resort. Cette tâche qui pouvait être chronophage pour les partenaires RH (HRBP) est aujourd’hui en partie automatisée afin de leur libérer du temps pour se concentrer sur l’accompagnement humain, l’écoute et le développement de leurs filières, des éléments clés pour renforcer la fidélisation de nos équipes.
Quel est votre rôle en tant que DRH dans l’intégration de l’IA à l’entreprise ?
Mon rôle de DRH consiste à accompagner les équipes RH dans le développement de leurs compétences en matière d’intelligence artificielle, tout en les aidant à surmonter leurs éventuelles inquiétudes. L’IA peut parfois susciter des craintes notamment autour de la question : « L’intelligence artificielle va-t-elle remplacer mon poste ? ». Il est donc essentiel de rassurer et de protéger les équipes en leur montrant que l’IA est avant tout un outil extraordinaire, conçu pour faciliter leur travail. Elle peut nous permettre, par exemple, de gagner du temps, en automatisant certaines tâches, de sécuriser la conformité de nos process RH et de réduire les éventuels risques d’erreurs.
Où en êtes-vous sur le sujet de la transparence des salaires ?
Nous sommes prêts à plus de transparence. Même si les fourchettes ne sont pas encore systématiquement visibles sur toutes nos offres en ligne, c’est une démarche que nous intégrons progressivement. Mais au-delà du salaire, nous proposons un package global très attractif : hébergement et repas (environ 360 euros / mois), ce qui permet une capacité d’épargne bien supérieure à celle d’un salarié qui ne serait ni logé ni nourri. C’est un élément différenciant fort.
Avez-vous le sentiment que la charge de travail des RH s’est beaucoup alourdie ces dernières années et comment l’expliquez-vous ?
La charge de travail des RH n’est pas nouvelle, mais elle a clairement évolué. Les attentes des salariés ont changé, ils demandent plus d’écoute, plus de réactivité, et nos modes de communication ont changé. Il y a 40 ans, quand on était affecté à Bora Bora, appeler son gestionnaire de carrière était beaucoup plus complexe, voire peut-être même impossible. Les outils de communication actuels – téléphone, WhatsApp, réseaux sociaux – ont accéléré les échanges et modifié la relation RH. Le rôle des HRBP s’est transformé : ils sont devenus des accompagnants de proximité, parfois des coachs, voire des soutiens psychologiques. Cela demande une présence renforcée sur le terrain, une écoute active et une proximité avec les équipes en resorts. En tant que DRH, il est de mon devoir d’accompagner les salariés pour trouver le bon équilibre entre vie professionnelle et personnelle, et de veiller sur la fonction RH en restant attentive aux éventuels signes avant-coureurs.
Si vous deviez définir le métier de DRH en trois mots ?
Pour moi, un DRH doit aujourd’hui être attentif aux autres tout en faisant preuve de clairvoyance afin de se préparer continuellement aux défis futurs. Il faut être attentif aux personnes, lucide sur les enjeux présents, et constamment tourné vers l’avenir, notamment face à des évolutions rapides comme l’intelligence artificielle.
A la manière des questions posées en entretien d’embauche, où vous voyez-vous dans 10 ans ?
J’ai la chance de travailler dans une entreprise qui m’a fait grandir, qui m’a offert de belles opportunités, qui m’a permis de me développer, de me réinventer. Je viens du commercial et j’ai eu l’opportunité de devenir DRH en 2024 grâce à l’accompagnement de mes managers et de mes mentors. Je souhaite encore grandir et je sais que l’entreprise Club Med me donnera ces opportunités-là. J’espère rester au service des ressources humaines ; c’est un métier profondément humain, qui donne du sens à mon engagement.