Entretien d’embauche par IA : l’étude qui surprend les recruteurs

L’IA appliquée au recrutement est diversement perçue par les candidats et les recruteurs, souvent partagés entre enthousiasme face à une technologie qui leur permet de gagner du temps et méfiance vis-à-vis d’un outil imparfait, qui présente certains risques lorsqu’il est mal utilisé.

Une étude*, publiée le 18 août et dirigée par Brian Jabarian, chercheur à l’université de Chicago, en collaboration avec Luca Henkel, chercheur à l’université de Rotterdam, apporte un nouvel éclairage sur les entretiens d’embauche réalisés par une IA. Les scientifiques ont passé à la loupe plus de 70 000 entretiens de candidats à des offres d’emploi publiées par PSG Global Solutions, une filiale de l’entreprise Téléperformance, spécialisée dans l’externalisation des processus de recrutement et basée aux Philippines.

Trois scénarios mais une même grille d’entretien

Sur ce panel, certains candidats ont passé leur entretien d’embauche avec un recruteur, d’autres avec un agent IA, surnommé Anna AI, d’autres enfin avaient le choix entre les deux. Dans tous les cas, la décision finale de sélection revenait au recruteur, après examen de la retranscription des échanges et des résultats obtenus aux tests techniques par les candidats.

Anna AI s’est basée sur le même guide d’entretien que les recruteurs, abordant les sujets dans le même ordre qu’eux. Les entretiens d’embauche duraient 10 à 20 minutes durant lesquelles jusqu’à 14 points pouvaient être abordés (flexibilité horaire du candidat, projet professionnel, expériences passées, études, motivation…).

De « meilleures » informations collectées par l’IA

Alors que les recruteurs s’attendaient à obtenir de moins bonnes performances auprès de l’échantillon interrogé par l’IA, c’est tout l’inverse qui s’est produit. Ainsi, les candidats interviewés par la machine ont eu 12% de propositions d’embauche de plus que ceux reçus par les recruteurs. Pour quelle raison ? « L’IA collecte de ‘’meilleures’’ informations pendant l’entretien, dans le sens où ces informations en apprennent davantage sur le candidat au recruteur et sont plus pertinentes pour prendre une décision de recrutement », notent les auteurs de l’étude.

Autre constat : les entretiens conduit par Anna AI couvrent davantage de sujets dans le temps imparti que ceux menés par un humain. Enfin, les réponses données à l’IA par les candidats sont généralement plus complètes et nécessitent moins de clarifications de la part du candidat.

Au-delà de la proposition d’embauche, les entretiens d’embauche réalisés par IA ont débouché sur 18% de débuts de contrat supplémentaires, par rapport à ceux effectués par un recruteur, et sur un taux de rétention des collaborateurs au-delà de 30 jours supérieur de 17%.

Une expérience candidat globalement positive

Mais qu’en est-il de l’expérience candidat ? Comment ces derniers ont-ils vécu leur entretien face à une IA ? La plupart parlent d’une expérience positive : la qualité des entretiens, leur fluidité et le niveau de feedback sont similaires à ceux rapportés par les candidats interrogés par des recruteurs. Fait intéressant, les candidats qui ont passé leur entretien avec l’IA ont moins le sentiment d’avoir été discriminés que les autres. En revanche, ils jugent l’interaction avec la machine moins naturelle qu’avec un humain. A noter aussi que dans 5% des cas, les candidats ont mis fin à l’entretien car ils ne voulaient pas interagir avec une IA et que 7% des candidats interrogés par Anna AI ont rencontré des difficultés techniques.

Dernier fait marquant mis en lumière par l’étude : lorsque les candidats avaient le choix entre un recruteur et une IA, 78% ont opté pour la seconde. Principalement parce qu’elle leur permettait de planifier l’entretien quand ils le souhaitaient, Anna AI étant disponible 7j/7 et 24H/24.

« Grâce à cette étude à grande échelle, nous avons pu constater que l’IA peut remplacer les recruteurs humains dans la conduite des entretiens d’embauche, une tâche complexe mais essentielle dans le recrutement, tout en préservant la satisfaction des candidats, en maintenant la fluidité des opérations et en améliorant l’efficacité des embauches ainsi que la rétention à 30 jours », conclut Brian Jabarian.

*Etude portant sur 70 884 candidatures reçues entre le 7 mars et le 7 juin 2025 portant sur 48 offres d’emploi sur des postes de service client pour le compte de 43 clients européens et américains dans divers secteurs d’activité (IT, assurances, finance, télécommunications, retail, santé, transports).