Faut-il remplacer l’entretien annuel par l’évaluation continue ?

Et si l’heure était venue de troquer l’entretien annuel par l’évaluation continue, plus adaptée au monde d’aujourd’hui ?

Faut-il remplacer l’entretien annuel par l’évaluation continue ?
La saison des entretiens annuels approche, mais sont-ils encore vraiment pertinents ? © A Stockphoto / stock.adobe.com

L’entretien annuel, ce rendez-vous sacralisé qui vient clôturer chaque année ou en débuter une nouvelle, fait aujourd’hui débat. Si certains y voient une étape incontournable pour évaluer les performances, d’autres n’y trouvent qu’un exercice peu adapté au marché du travail actuel. Alors, doit-on dire adieu à l’entretien annuel pour de bon et adopter l’évaluation continue ? Spoiler : probablement, en partie. Et voici pourquoi.

Pourquoi l’entretien annuel ne fait plus l’unanimité

L’entretien annuel a longtemps été perçu comme le moment clé pour discuter performances, objectifs et rémunération. Mais soyons honnêtes : combien de fois ces réunions se transforment-elles en une formalité, où l’on recycle les mêmes points chaque année ? Voici les principaux reproches qui lui sont faits :

  • Il est déconnecté du quotidien : attendre un an pour discuter des réussites ou des axes d’amélioration est souvent trop tard. Les feedbacks perdent de leur pertinence quand ils ne sont pas donnés au bon moment. « Les managers ne se rappellent pas toujours de ce qu’il s’est passé en début d’année. C’est ce qu’on appelle le biais cognitif de récence. Leur avis repose souvent sur des éléments marquants, et principalement des aspects négatifs en négligeant de se remémorer les réussites ou les points positifs », explique Marie-Françoise Hosdain, consultante en orientation professionnelle et co-autrice de Réussir ses entretiens RH, paru aux éditions Gereso Eds.
  • Il n’est plus adapté : dans un monde où les exigences du marché du travail et où les attentes des collaborateurs évoluent rapidement, attendre décembre pour faire le point semble… inadapté.
  • Il manque d’interactivité : un entretien annuel ressemble souvent à une descente unilatérale d’informations, où le manager « juge » et le collaborateur écoute. « Les managers sont très mal à l’aise dans cet exercice car ils ne savent pas comment aborder les sujets et n’aiment pas endosser le rôle d’évaluateur qu’ils confondent avec un rôle de juge. Ils préparent plus ou moins leurs entretiens et réalisent ensuite un long monologue où le collaborateur écoute et réagit (surtout au négatif)», précise-t-elle.
  • Il génère du stress : pour beaucoup, ce rendez-vous ressemble à un tribunal. De par ses enjeux, le stress monte, et la discussion perd en spontanéité.

L’évaluation continue : une révolution douce mais efficace ?

La solution serait-elle de passer à l’évaluation continue ? Cette pratique, déjà adoptée par de nombreuses entreprises telles que Orange, repose sur des échanges réguliers, plus informels, mais aussi plus efficaces. Concrètement, cela signifie :

  • Des check-in fréquents : une réunion de 15 à 30 minutes tous les mois ou tous les trimestres, où l’on discute des projets en cours, des réussites, des défis et des objectifs.
  • Un feedback instantané : lorsqu’un collaborateur réussit ou échoue sur une tâche, le manager donne son retour immédiatement. Résultat : une progression continue.
  • Une construction des objectifs en commun : les objectifs ne sont plus imposés une fois par an, mais ajustés en fonction des évolutions et des priorités changeantes de l’entreprise.

Pour Marie-Françoise Hosdain, « c’est une tendance qui se développe, notamment dans les grands groupes. Les directions se rendent compte que ces entretiens mobilisent beaucoup de temps et d’argent, pour un rendu pas toujours de qualité ou exploité derrière. De toute façon, on ne peut pas attendre la fin de l’année pour aborder ce qui ne va pas ou pour féliciter un collaborateur. Adopter un format mensuelle, simple et rapide pour faciliter la vie des managers, est une solution bien plus efficace pour la productivité. Une session de 30 minutes maximum, avec des cases à cocher et un bref commentaire à la fin me paraît plus pertinent. Ces échanges réguliers permettent aussi de s’adapter aux objectifs de l’entreprise qui peuvent changer pendant l’année. »

Pourquoi ça marche mieux ?

  • Plus de réactivité : on identifie les problèmes plus vite, on célèbre les succès au bon moment, et on ajuste quand c’est nécessaire.
  • Un focus sur le développement : l’évaluation continue s’intéresse moins au passé (ce qui a été fait) qu’au futur (comment s’améliorer).
  • Une relation renforcée : les échanges réguliers et transparents favorisent la confiance et créent un lien plus fort entre le manager et le collaborateur.
  • Moins de stress, plus d’engagement : plus besoin d’attendre des mois pour savoir si on est dans les clous. Le collaborateur sait où il en est en temps réel.

Comment passer à l’évaluation continue ?

Vous êtes convaincu, mais vous vous demandez comment opérer ce changement ? Voici quelques conseils pour une transition en douceur :

  • D’abord, « pensez votre stratégie en amont, pour que ce soit le plus cadré et le plus efficace possible pour le manager comme pour le collaborateur », insiste Marie-Françoise Hosdain.
  • Formez vos managers : l’évaluation continue demande une vraie culture du feedback. Apprenez-leur à donner des retours constructifs et réguliers.
  • Adoptez les bons outils : de nombreux outils digitaux facilitent le suivi des objectifs, des feedbacks et des discussions. Choisissez en un, il vous facilitera la tâche au quotidien.
  • Impliquez vos collaborateurs : expliquez-leur pourquoi vous faites ce changement et comment il bénéficiera à leur développement.
  • Testez et ajustez : faites un essai dans un service ou dans une équipe. Écoutez les retours et adaptez votre approche.

Alors, mort l’entretien annuel ? Oui, mais…

L’entretien annuel n’a peut-être pas besoin de disparaître complètement. Mais doit-il rester le seul et unique moment d’évaluation ? L’évaluation continue n’est-elle pas la clé pour des équipes plus agiles, plus engagées et plus performantes ?

« On reste attaché à l’habitude des entretiens annuels, mais les deux approches peuvent coexister. Les points mensuels permettent de fixer des objectifs pour le mois ou le trimestre à venir, en offrant un suivi régulier et réactif. Mais cela n’empêche en rien de réaliser un bilan annuel pour discuter des réalisations, avec plus de recul sur les événements », note la co-autrice de Réussir ses entretiens RH.

Alors, prêt à faire évoluer vos pratiques et engager vos collaborateurs tout au long de l’année ?

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