« Désmicardisation de la France » : quel est le projet du gouvernement ?
Lors de son discours de politique générale, prononcé mardi 30 janvier, le Premier ministre, Gabriel Attal a dit vouloir « mettre fin à la smicardisation de la France ».
Trois semaines après sa nomination, le Premier ministre, Gabriel Attal a listé ses priorités d’action devant les députés, dans le cadre de son discours de politique générale. La première d’entre elles : faire en sorte que « le travail paie mieux et toujours plus que l’inactivité, partout et pour tous ». Pour ce faire, le gouvernement entend notamment actionner un levier : la « désmicardisation de la France ».
Un nombre record de salariés au Smic en 2023
Indexé sur l’inflation, le Smic a été revalorisé huit fois, entre le 1er janvier 2021 et le 1er janvier 2024. Ce qui représente une augmentation cumulée de 13,6% de son taux horaire sur la totalité de la période, selon les données de la Dares.
Le constat avait déjà été posé par le groupe d’experts sur le Smic, dans un rapport publié fin 2023 : « Le pourcentage de salariés directement concernés par la revalorisation du Smic au 1er janvier continue d’augmenter en 2023 pour atteindre un niveau historique de 17,3 %, après 12% en 2021 et 14,5 % en 2022. » Au 1er janvier 2023, sur les 17,6 millions que compte le secteur privé, 3,1 millions touchaient donc 1 398,69 € net par mois.
Quelles conséquences sur les autres salaires ?
Conséquence : les bas salaires, non indexés sur l’inflation, ont été rattrapés par le revenu minimum. Tandis que le montant brut horaire du Smic augmentait de 13,6% en trois ans, celui des salaires de l’ensemble des employés et des ouvriers a connu une hausse de 9% et celui des salaires des cadres et des professions intermédiaires, de 7%.
Et sur les évolutions de salaires ?
Également dans le viseur : le mécanisme de prélèvements sociaux. Initialement imaginé pour lutter contre le chômage, les faibles cotisations patronales sur le Smic n’incitent pas les employeurs à augmenter les salaires au-delà de ce plancher.
« Plus qu’un problème économique, le resserrement de l’échelle des salaires se traduit, pour les gens juste au-dessus du Smic, par un sentiment de déclassement, l’impression d’être dévalorisés en matière de rémunération », explique Sylvain Bersinger, économiste au cabinet Astérès, dans les colonnes du Monde.
Quelles solutions ?
Le Premier ministre entend d’abord accélérer les négociations de branches dans les secteurs où les grilles salariales n’ont pas évolué au même rythme que l’augmentation du Smic. Fin 2023, 34 n’étaient pas encore au rendez-vous. Le ministre du Travail d’alors, Olivier Dussopt, avait alors annoncé la création d’un comité de suivi des négociations dont les premiers travaux doivent débuter sous peu. Des sanctions sont à l’étude pour les branches qui ne mettraient pas en conformité d’ici le 1er janvier 2025, a confirmé Catherine Vautrin, la nouvelle ministre du Travail.
Le chef du gouvernement souhaite aussi agir sur le volet des allègements de cotisations : « Nous devons faire évoluer un système qui nous a conduit depuis des décennies à concentrer nos aides, nos exonérations, au niveau du Smic. Aujourd’hui, pour augmenter de 100 euros le revenu d’un employé au Smic, l’employeur doit débourser 238 euros de plus. Quant au salarié, il perd 39 euros de prime d’activité et voit sa CSG et ses cotisations sociales augmenter de 26% et rentre dans l’impôt sur le revenu. » Cette réforme devrait être figurer dans le prochain projet de loi de finances.
Si Catherine Vautrin, s’est dite opposée à la suppression du Smic, sur le plateau de BFMTV, elle souhaite travailler avec des experts pour créer « des baisses d’impôts spécifiques pour les salaires se situant juste au-dessus du Smic, de façon à ce que le travail soit un outil d’émancipation ».