Arrêts maladie, avantages salariaux : pourquoi sont-ils mis en cause ?

Pour combler le déficit de la Sécurité sociale, la Cour des comptes formule une série de propositions radicales.

La Cour des Comptes a publié, le 29 mai, son rapport d'application sur les lois de financement de la Sécurité sociale.
La Cour des comptes a publié, le 29 mai, son rapport d'application sur les lois de financement de la Sécurité sociale. © HJBC/stock adobe.com

Dans un rapport publié le 29 mai, la Cour des comptes alerte sur le niveau de déficit « non maîtrisé » de la Sécurité sociale : après avoir atteint 10,8 milliards d’euros en 2023 (soit 4 milliards de plus que les prévisions initiales), celui-ci devrait rester stable, à 10,5 milliards, en 2024, dans l’hypothèse d’une « décélération importante du rythme d’augmentation des dépenses d’assurance-maladie », souligne la Cour. Sans perspective de retour à l’équilibre, ce déficit se chiffrerait à 17,2 milliards d’euros en 2027.

Vers un durcissement des règles d’indemnisation des arrêts maladie ?

Pour reprendre le contrôle, l’institution a formulé plusieurs mesures d’économies concrètes qui seraient lourdes de conséquences pour les entreprises et leurs salariés. Elle suggère notamment de réformer les règles d’indemnisation des arrêts maladie.

Alors que ces derniers ont augmenté de plus de 50% entre 2017 et 2022, la Cour des comptes propose l’allongement du délai de carence à sept jours (contre trois actuellement), la suppression de l’indemnisation par l’Assurance maladie des arrêts de travail de moins de 8 jours et la limitation de la durée maximale d’indemnisation à deux ans (contre trois aujourd’hui).

La Cour des comptes préconise aussi d’aller « plus loin dans la lutte contre la fraude aux arrêts de travail et dans le contrôle des prescriptions des médecins ». Ce jeudi 30 mai, au micro de France Inter, le Premier ministre, Gabriel Attal s’est dit favorable à cette dernière mesure. Il a revanche balayé l’option d’une augmentation du délai de carence pour les arrêts maladie.

Les exonérations de cotisations sur les compléments de salaire pointées du doigt

Également dans le viseur de la Cour des comptes, les exonérations de cotisations sociales sur les compléments de salaires (dispositifs de partage de la valeur, titres-restaurants, chèques-vacances, frais de transport, complémentaires santé, heures supplémentaires), qui représentaient, dans le secteur privé, 87,5 milliards d’euros en 2022, ajoutant, en moyenne, 13,2% au salaire de base des travailleurs.

« Depuis 2018, ces compléments de salaire ont pris une ampleur sans précédent. Ils tendent de plus en plus à répondre à un objectif d’amélioration du pouvoir d’achat, au même titre que le salaire de base, mais à moindre coût pour les entreprises du fait de leur régime social dérogatoire », décrit le rapport. La croissance de ces avantages sociaux s’est exercée au détriment de la progression des salaires, et des cotisations sociales assises sur ces derniers. Ce qui représente un manque à gagner de 18 milliards d’euros pour la Sécurité sociale, au titre de l’année 2022, d’après l’institution.

Dans ce contexte, la Cour recommande un retour vers des conditions de droit commun pour les dispositifs dérogatoires. Cela pourrait se traduire par une transformation des exonérations sur les heures supplémentaires en exemptions, pour ne plus qu’elles créent de droits à la retraite ou de les compenser par des crédits budgétaires.

Fin juin, la Cour des comptes proposera des pistes plus détaillées au gouvernement dans le cadre d’une revue de dépenses. « Il y a des gisements importants » dont la mise en œuvre dépendra de la « volonté politique » estime la Cour. Reste à voir comment l’exécutif s’emparera de ce sujet hautement sensible.

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