Le télétravail illimité ou l’histoire d’une culture d’entreprise forgée pendant la crise sanitaire
Découvrez l’histoire d’une entreprise, née au début de la pandémie, qui a fait du télétravail un élément structurant de sa marque employeur.
Transformer le télétravail contraint en travail à distance durable a été l’un des plus gros challenges RH de ces derniers mois. Chez Blank, une néo-banque destinée aux petits professionnels indépendants, on a fait le choix de pérenniser le télétravail illimité. Focus sur un modèle qui ouvre une troisième voie, entre le full remote et le schéma classique de travail hybride, privilégié par une majorité d’accords d’entreprise.
« On a lancé notre boîte début 2020, alors que toute la France se confinait. Ce contexte a forcément eu un impact sur l’ADN de notre entreprise, rembobine Simon Parisot, co-fondateur et CEO de Blank. D’emblée, on a accordé une grande liberté, une grande autonomie aux collaborateurs. Chacun travaillait chez lui et on se voyait quand on pouvait, c’est-à-dire pas souvent. Ça aurait été étrange, une fois les restrictions sanitaires levées, qu’on impose à tout le monde de venir tous les jours au bureau. »
Un à deux jours au bureau par mois
Ils ont donc perpétué ce modèle de télétravail illimité, qui valorise l’autonomie et la responsabilité des équipes. « Les gens bossaient bien depuis chez eux, donc on s’est dit : pourquoi changer ? Le mode de fonctionnement est assez libre, même si on a mis en place quelques règles pour permettre aux collaborateurs de s’organiser et de cultiver un sentiment d’appartenance à l’entreprise », explique Ingrid Macabéo, la DRH.
Des principes au nombre de trois :
- Les collaborateurs sont incités à venir au moins une à deux fois par mois au bureau : « On ne force personne : ceux qui veulent venir plus le peuvent, ceux qui ne veulent pas venir du tout ont la possibilité de le faire, mais ces derniers sont minoritaires », constate-t-elle.
- Les nouvelles recrues sont incitées à venir tous les jours pendant un mois pour une prise de poste optimale, qui leur permettra d’être rapidement autonomes. Quant aux stagiaires, ils sont encouragés à venir trois jours par semaine pour bénéficier d’un accompagnement plus poussé.
- Sauf exception à discuter au cas par cas, le lieu de télétravail est le domicile du collaborateur, qui doit être couvert par une assurance habitation prenant en compte les risques d’accident du travail.
Un management basé sur la confiance et le résultat
Le remote a aussi eu une influence sur la culture managériale de Blank : « On n’a jamais fait de micromanagement, affirme Simon. On accompagne au maximum les équipes mais chacun doit prendre toute sa place, et pouvoir se rendre maître de son sujet, comme il l’entend. Ce fonctionnement force les managers à faire du bon management, c’est-à-dire à évaluer leurs collaborateurs sur les livrables, et non pas sur le temps passé au bureau. »
Télétravail illimité ne signifie pas full remote
Pourquoi ne pas avoir opté pour le full remote ?
« On avait besoin de se voir, d’avoir un lieu où se retrouver pour travailler ensemble, déjeuner avec les collègues, boire des verres. Ce ne sont pas les managers qui ont décidé que ce serait bien de réunir leurs équipes en présentiel, mais la majorité des salariés qui en avait assez de passer toutes leurs journées dans leurs petits apparts », affirme Simon.
L’entreprise a adopté un fonctionnement en flex office : 25 postes de travail, non attribués, sur lesquels tournent les 40 collaborateurs. « On ne demande pas aux gens de prévenir quand ils viennent mais personne ne s’est jamais retrouvé sans place. Globalement, on a rarement 25 personnes, en même temps au bureau. Ça n’est arrivé qu’une ou deux fois qu’on dépasse la capacité et qu’un collaborateur s’installe en salle de réunion. La moitié des effectifs se rendent deux à trois fois par semaine au bureau. On est beaucoup dans cette tranche d’âge (25-35 ans) à apprécier se retrouver au bureau, sans y être forcé. »
Dans la perspective de recrutements à venir, l’entreprise songe à agrandir ses locaux mais aussi à se doter d’outils pour recenser le nombre de collaborateurs présents, au jour le jour, au bureau et structurer les rotations.
Un onboarding qui vise à autonomiser rapidement les collaborateurs
« Globalement, nous n’avons pas rencontré d’obstacle à la mise en œuvre du télétravail, car on a mis en place un onboarding qui permet au nouveau collaborateur d’avoir tous les outils en main pour être autonome rapidement. Dès son arrivée, il suit une formation par métier ou par squad et il rencontre tous les services », détaille Ingrid.
Parce qu’il est plus difficile de prendre le pouls de ses équipes à distance, les managers organisent des one-to-one hebdomadaires avec chaque membre de leur équipe. « De mon côté, je suis vigilante, je suis les collaborateurs, et en particulier les nouvelles recrues, pour être certaine qu’il n’y aucun problème à signaler, témoigne la DRH. Si je sens qu’il y a un malaise, je propose au collaborateur d’aller prendre un café ou je l’appelle. Nous avons aussi mis en place un canal de discussion RH et un outil de sondages aléatoires qui me permet aussi d’envoyer des questionnaires personnalisés sur des sujets comme le bien-être, la rémunération, la montée en compétences, la qualité des feedbacks, le sentiment de reconnaissance ou d’appartenance. »
La présence au bureau : un bon indicateur RH
Pour Simon, la présence de ses collaborateurs au bureau est un bon indicateur RH : « Si on voit que quelqu’un vient moins souvent que d’habitude, ça nous alerte. On organise alors plus de points avec les RH et le manager. Ça peut parfois être un signe de désengagement, si le salarié n’est plus aligné avec les valeurs de l’entreprise ou qu’il a des soucis perso. »
Pour donner envie aux collaborateurs de venir au bureau, l’entreprise a instauré des rituels : le weekly du lundi (un petit-déjeuner hebdomadaire lors duquel sont présentés les chiffres de la semaine passée, les nouvelles fonctionnalités, les actus RH et les projets pour la semaine qui s’amorce), les séminaires d’été et d’hiver, les activités sportives en commun, qui se doublent de déjeuners réguliers et d’apéros improvisés.
Le télétravail illimité : un argument de poids pour les candidats
Blank a su faire du télétravail illimité un atout pour sa marque employeur. « Tous les candidats que je rencontre demandent du télétravail, donc notre mode de fonctionnement n’a jamais été un frein, bien au contraire ! Quand l’organisation du travail est la première question que posent les candidats en entretien, c’est un signe que c’est important pour eux. Notre modèle attire parce qu’il offre un confort de vie, notamment pour les jeunes parents. », explique Ingrid.
Du point de vue de Simon, « toutes les entreprises peuvent adopter le télétravail illimité. Seulement, ça nécessitera plus de temps et de capacité d’adaptation dans les entreprises où les salariés ont tous un bureau personnel et où la culture du présentéisme est très ancrée. Il y a tout un travail à mener pour faire en sorte que les collaborateurs aient cette marge de liberté mais que les bureaux ne soient pas vides tout le temps ».