RH : comment construire votre plan de santé mentale en 5 étapes

Prenez soin de vous-même pour mieux prendre soin de vos collaborateurs !

, 80% des RH se déclarent au bord de l’épuisement professionnel.
, 80% des RH se déclarent au bord de l’épuisement professionnel. © nenetus/stock adobe.com

En mars 2023, 80% des RH se déclaraient au bord de l’épuisement professionnel, selon le baromètre Payfit/Tissot. Les RH sont-elles les cordonniers les plus mal chaussés de l’entreprise ? Certes, on sait où les trouver en cas de problème, mais qui prend soin d’elles lorsqu’elles sont à bout ?

« La gestion émotionnelle n’est presque pas abordée dans les formations RH, d’où le fait que les RH aient souvent du mal à adresser le sujet de la santé mentale en entreprise, constate Sylvie Chauvin, psychologue du travail chez Moka.care et ex-DRH. On parle régulièrement de bien-être au travail, de vivre ensemble, mais le mot de santé mentale peut faire peur. Or la santé mentale, c’est primordial, c’est être bien émotionnellement pour pouvoir être efficace au travail. »

Comment mettre en place un plan de santé mentale efficace pour vous sentir bien et vous permettre de mieux prendre soin de vos collaborateurs ? Lors d’un live, à l’invitation de Maud Grenier, Sylvie Chauvin nous a livré ses conseils.

Étape 1 : Prenez soin de vous, surtout quand tout va bien

La base pour prévenir la fatigue mentale est d’avoir une routine de vie saine : dormir assez, manger équilibré, pratiquer un sport de manière régulière. Autant de réflexes de bon sens qui fabriquent un bon terreau pour mieux surmonter les journées intenses au travail.

Souvent identifiées comme interlocutrices privilégiées en cas de difficulté, les RH sont parfois très sollicitées par les collaborateurs : « Lorsque j’étais DRH et que j’arrivais au travail, je n’avais parfois pas fait 200 mètres que quatre collaborateurs étaient déjà venus me parler de leurs problèmes, témoigne Sylvie. De bon matin, j’avais déjà quatre problèmes sur mon dos. »

Pour alléger cette charge mentale, la psychologue recommande de ne pas discuter de ces sujets à la volée, au détour d’un couloir, car « c’est la meilleure manière de mal répondre à leur question ». « Proposez plutôt à la personne de fixer un rendez-vous pour aborder sereinement et calmement leur problème. Le RH n’est pas un sauveur, mais il peut aider à accoucher d’une solution. Il faut montrer qu’on est là, mais pas n’importe comment, dans un cadre. »

Elle conseille aussi de se créer un lieu ressource (un coin de nature, une pièce réconfortante…), une image mentale à laquelle vous rattacher lorsque vous êtes assailli par un trop-plein d’émotions.

Étape 2 : Identifier les signaux faibles de la fatigue mentale

À la manière des dispositifs de veille ou d’écoute pour repérer les signes d’une détérioration de la santé des collaborateurs, apprenez à identifier les KPIs personnels qui montrent que vous n’allez pas bien.

Ces signaux symptomatiques d’un type de fatigue appellent une réponse spécifique, détaille Sylvie :

  • « La fatigue mentale se traduit souvent par une incapacité à se déconnecter des écrans, par des maux de tête. Il faut alors s’obliger à fermer son ordinateur, aller marcher un peu.
  • La fatigue physique est plus facile à identifier. Elle se traduit par des douleurs musculaires, par exemple.
  • La fatigue réactionnelle apparaît si je sors, par exemple, énervé d’un CSE conflictuel. Il faut alors se poser et savoir se poser des questions pour prendre du recul.
  • La fatigue émotionnelle se manifeste si l’on reçoit une mauvaise nouvelle personnelle ou professionnelle. On peut alors chercher une personne qui saura nous consoler.
  • La fatigue compassionnelle touche énormément les RH : il s’agit de ce trop-plein d’empathie qu’on trouve essentiellement chez le personnel soignant, qui absorbe la douleur des patients. Dans ce cas, il faut tâcher de se mettre à la bonne distance et d’orienter les collaborateurs vers des relais adaptés (assistantes sociales, psychologues, médecin du travail, association…).
  • La fatigue décisionnelle : un RH peut avoir des décisions difficiles à prendre (licenciements, réorganisation…). Le mieux est d’en parler au comité de direction ou à un professionnel de santé.
  • La fatigue existentielle, liée à la quête de sens s’exprime par un sentiment de vide. C’est le moment de se demander si l’on est bien aligné avec les valeurs de l’entreprise et nos missions. »

Étape 3 : Mesurez votre dissonance émotionnelle

« Les RH sont des salariés comme les autres, il n’y a pas de posture à avoir. Plus vous êtes authentiques et en phase avec ce que vous êtes, plus vous serez un bon RH », estime Sylvie.

 « Si vous mettez un costume de RH chaque matin, et que l’on attend de vous un certain type de comportement (par exemple de sourire en permanence), vous ne pourrez pas être vous-mêmes au travail. Vous serez alors en dissonance émotionnelle, c’est-à-dire que vous porterez aux yeux des collaborateurs des émotions qui ne sont pas les vôtres. Et ça, ça rend malade. »

Comment l’éviter ? En acceptant d’être vous-mêmes au travail et de prendre du temps pour vous : « Fixez un rendez-vous avec vous-même quotidien dans votre agenda, par exemple autour de 16h. Deux ou trois minutes suffisent pour vous demander comment s’est passée votre journée. Si vous avez l’impression qu’elle est ratée, vous avez encore quelques heures pour inverser la tendance ! »  

Étape 4 : Muscler votre travail émotionnel

La psychologue du travail propose de noter sur une échelle de 1 à 10 votre forme et de s’interroger sur la manière de l’améliorer : qu’est-ce que je dois faire pour passer de 6 à 7 ? Discuter rapidement de ce problème complexe avec un collègue ? Boucler mon dossier d’ici la fin de la journée ?

« Ce bilan personnel peut être fait durant le rendez-vous avec vous-même et est essentiel pour votre hygiène émotionnelle », précise Sylvie.

Étape 5 : Trouver vos alliés

Comment les reconnaître ? « Ce sont des personnes, intérieures ou extérieures à votre entreprise, qui vous font du bien. C’est bien de leur dire explicitement que ça vous fait du bien d’échanger avec elles. Si elles vous disent en retour que ces sujets sont trop lourds à porter pour elles, ce ne sont pas les bonnes alliées. »

Au travail, ces alliés peuvent être dans votre comité de direction, votre manager, vos collègues… Vous pouvez également compter sur vos proches, mais prenez garde à ce que vos problématiques professionnelles n’aient pas trop de retentissement dans votre sphère personnelle. « C’est bien d’avoir un sas d’entrée à la maison : vous prenez deux minutes pour parler de vos soucis au travail, puis vous passez à autre chose pour profiter du bon temps en famille. »

Bien s’équiper pour bien recruter