Recruteur / hiring manager : comment construire un duo gagnant ?

Un bon recrutement ne repose pas sur un recruteur seul, mais sur un duo avec le manager de celui ou celle qui sera recrutée. Les conseils de deux experts en recrutement.

Recruteur hiring manager comment construire un duo gagnant
Un recrutement réussi ne tient pas seulement à un bon brief. Il se construit dans la relation, la confiance et la compréhension mutuelle entre recruteur et manager. © Knut / stock.adobe.com

La relation entre un recruteur et un manager qui recrute quelqu’un dans son équipe, un hiring manager, peut faire ou défaire un recrutement. Lorsqu’elle est bien huilée, elle devient une arme puissante pour recruter rapidement et avec efficacité. Mais si la collaboration est peu structurée, déséquilibrée, qu’un manque de confiance se fait sentir, cela risque de nuire au processus, à l’expérience du candidat, et ainsi, à l’image de l’entreprise.

Au-delà de l’indispensable brief de départ, comment construire avec les hiring managers des relations saines et solides sur le long terme ? Voici six indispensables à respecter, selon les deux experts en recrutement que nous avons interrogés.

Prendre le temps de se connaître

Dans la relation entre recruteurs et managers, la confiance ne se décrète pas. Elle se construit en s’apprivoisant, petit à petit. Sans un engagement réciproque pour mieux se comprendre, au-delà des objectifs chiffrés, les fondations sont instables.

« Il faut apprendre à se connaître, des deux côtés. Un manager doit prendre le temps de découvrir le métier du recrutement. De la même manière, un recruteur doit comprendre les métiers sur lesquels il recrute, mais aussi s’intéresser au rôle du manager : ses enjeux, ses priorités – par exemple, pourquoi un poste est plus stratégique ou plus urgent qu’un autre – ses contraintes, son emploi du temps. C’est tout cela qui permet de poser les bases d’une relation de confiance, qui ne soit pas uniquement pilotée par des KPI de recrutement », explique Héloïse Hamon, responsable recrutement et communication à Rennes chez Coexya by Talan, société spécialisée dans le conseil en systèmes et logiciels informatiques. Et sans une vraie relation de confiance, un partenariat solide entre recruteur et manager, cela se ressentira en entretien et renverra aux candidats une image négative de l’entreprise et de son ambiance de travail.

Pour Thomas Blanchard, Talent Acquisition chez Hellowork, « l’une des bonnes pratiques d’un recruteur est aussi de prendre le temps d’aller s’immerger dans les équipes où il recrute. L’idée, c’est de vivre, écouter, entendre leur quotidien. Ça permet de bien appréhender les métiers, de savoir quelles questions poser aux candidats, mais aussi de répondre à leurs interrogations, parce qu’on sait concrètement comment les choses se passent. »

Le conseil pratique : fixez des points réguliers avec les managers dont vous pourriez chapeauter les recrutements. En plus d’y régler des questions pratiques, ces rendez-vous vous permettront de mieux connaître le mode de fonctionnement des futurs hiring managers.

Clarifier les rôles de chacun, dès le début

Le rôle du recruteur va bien au-delà du simple entretien de préqualification. Il pilote et structure le processus. Être recruteur, c’est aussi faire en sorte que personne, ni le candidat ni le manager, ne perde le fil.

Pour Thomas Blanchard, « être recruteur, c’est aussi accompagner les managers tout au long du processus. Quoi qu’il arrive, on recrute pour leur équipe : ils prendront la décision finale. Mais c’est à nous de garder la main sur chaque étape : le premier contact, l’accueil lors du premier entretien, l’envoi et la réception des tests… C’est notre travail. De cette façon, on reste au cœur du process, on a toutes les informations, une vue d’ensemble. Et on soulage les managers, qui n’ont souvent ni le temps ni la disponibilité pour suivre chaque candidat ou formuler des retours détaillés. » Un manager qui comprend cela a compris l’un des piliers d’une collaboration saine et équilibrée.

Au-delà de la collaboration, chacun apporte sa propre expertise. Le recruteur n’est pas seulement là pour « fournir » des candidats : il a aussi un rôle de sensibilisation, notamment sur les pratiques de recrutement éthiques et objectives. « De nombreux managers n’ont jamais recruté. Pourtant, ils se retrouvent à devoir conduire des entretiens sans forcément connaître les règles du jeu. Il existe 26 critères de discrimination à l’embauche, et c’est notre rôle de les sensibiliser à ces enjeux », ajoute Thomas Blanchard. « Chacun a ses biais cognitifs, souvent inconscients, qu’il faut apprendre à déconstruire. Certains managers, par exemple, peuvent accorder de l’importance à la réputation d’une école. Mais cela ne garantit pas que le candidat soit le bon. Chaque manager est formé en interne sur ces sujets pour mieux comprendre leurs biais et faire évoluer leur posture », précise Héloïse Hamon.

Le conseil pratique : organisez des ateliers une fois par an avec tous les managers pour les sensibiliser aux biais cognitifs.

Communiquer régulièrement et en toute transparence

Dans toute relation de travail, la communication est la clé d’une collaboration qui fonctionne. Qu’il s’agisse de travailler en binôme, en équipe ou entre services, rien ne peut réellement avancer sans échanges réguliers, transparents et constructifs. Dans les relations professionnelles, elle permet d’aligner les attentes, de prévenir les malentendus, et surtout, de construire la confiance sur la durée.

« Il n’y a pas de recette miracle : il faut communiquer régulièrement avec les managers, leur montrer concrètement tout ce qu’on fait. Sur tous les profils qu’on reçoit ou qu’on chasse, seuls quelques-uns seront embauchés. C’est un entonnoir très sélectif. Le manager, lui, voit surtout qu’on ne lui présente personne, et peut penser à tort qu’on ne s’occupe pas de son besoin. C’est pour ça qu’il est essentiel de faire des points réguliers – même courts, 5 minutes suffisent -, pour montrer qu’on avance, qu’on a bien compris son besoin, et du coup, pour lui donner confiance », souligne Thomas Blanchard.

« Il arrive qu’un manager refuse un candidat qui, sur le papier, coche toutes les cases. Et dans ces cas-là, le recruteur a besoin de comprendre ce qui bloque, précisément pour pouvoir ajuster la suite du process. C’est là que les échanges réguliers, même informels, prennent aussi tout leur sens. Ils permettent de garder une communication fluide, de se challenger mutuellement, de faire évoluer le brief initial si besoin », complète Héloïse Hamon.

Le conseil pratique : utilisez des outils collaboratifs comme peut l’être l’ATS Hellowork Recruteur. De cette manière, vous pourrez partager plus facilement, avec votre équipe ou avec le hiring manager, vos comptes-rendus d’entretien avec les différents candidats.

Faire preuve de réactivité et d’agilité

La qualité de l’expérience candidat fait aujourd’hui toute la différence. D’abord, « il faut être réactif. Par exemple, sur des talents difficiles à capter, tout peut se jouer en une semaine. Dans ces cas-là, chaque étape du processus compte, et la rapidité devient un véritable levier de différenciation. On doit pouvoir apporter une réponse au candidat en moins de 24 heures, sinon, on peut passer à côté d’un talent rare. Et pour ça, on a besoin de managers qui se rendent disponibles », précise Héloïse Hamon.

Ensuite, que les retours soient positifs ou négatifs, les candidats attendent des explications, des clés de compréhension. On ne parle pas ici de retours froids, automatiques ou impersonnels. La personnalisation est devenue indispensable. Il ne s’agit plus seulement de répondre vite, mais de répondre bien, avec transparence et considération. Car chaque interaction compte dans la construction de la marque employeur. Pour Thomas Blanchard, « dire la vérité, même quand elle est difficile à entendre, c’est aussi une façon d’aider les candidats à progresser. Et sur ce point, les recruteurs doivent accompagner les managers souvent peu à l’aise avec cet aspect. »

Enfin, « face à des attentes irréalistes, un recruteur doit oser challenger le besoin pour faire sauter quelques leviers. Lorsqu’un poste est ouvert depuis six mois ou un an, on doit prendre le temps de discuter pour trouver des alternatives possibles », ajoute-t-il.

En somme, dans la relation entre recruteur et manager, « le recruteur doit adopter une posture proche de celle d’un coach », explique Thomas Blanchard : à la fois accompagnateur, facilitateur et expert du process et du marché de l’emploi.

Le conseil pratique : en période de vacances, par exemple l’été, faites le point avec les différents managers pour lesquels des recrutements sont en cours pour connaître leurs dates de vacances. De cette manière, vous saurez plus facilement qui est là ou pas pour un entretien avec les candidats que vous avez pré-sélectionnés.

S’appuyer sur des outils pour cadrer et gagner en confiance

« Chez Coexya, nous avons mis en place un questionnaire de satisfaction anonyme adressé à tous les candidats, dès lors qu’ils rencontrent un manager, et quelle que soit l’issue du process. On obtient d’excellents taux de retour, avec des feedbacks très riches. Cela nous donne des pistes concrètes pour améliorer nos pratiques, aussi bien côté recruteurs que côté managers », déclare Héloïse Hamon. L’utilisation d’outils spécifiques tout au long du processus de recrutement permet non seulement de nourrir une dynamique d’amélioration continue, mais aussi d’harmoniser les pratiques entre recruteurs et managers et d’objectiver les décisions.

Une score card permet, par exemple, de structurer les attentes et de mieux cadrer les critères de sélection pour toutes les parties prenantes. « C’est aussi un bon support pour aider un manager à valider ses impressions. Par exemple, si un manager est frileux à l’idée d’envoyer tel candidat à l’étape suivante, la score card peut l’aider à formaliser son ressenti et à gagner en confiance lorsqu’il doit défendre ce choix auprès de son propre N+1 », explique Thomas Blanchard.

Le conseil pratique : après la phase d’entretien, calez un point avec le hiring manager pour passer en revue les score cards des différents candidats que vous avez rencontrés. C’est ainsi que vous pourrez prendre votre décision le plus objectivement possible.

Faire de l’hiring manager un vrai partenaire de travail

« Sur des profils pénuriques ou stratégiques, nous n’avons tout simplement pas le droit à l’erreur. Il faut fonctionner comme un véritable binôme. On va être en contact quasi permanent, on travaille en pair sourcing, ciblé et qualifié plutôt qu’à grande échelle. Le recruteur apporte son expertise du recrutement, le manager sa connaissance métier, souvent très technique », partage Héloïse Hamon.

Dans un contexte de guerre des talents, la collaboration étroite entre recruteurs et managers est plus que nécessaire : elle est vitale. L’un et l’autre doivent être engagés, côte à côte, pour former un binôme soudé, agile, capable de répondre vite et bien à des enjeux de recrutement de plus en plus exigeants. « Et cette collaboration s’inscrit dans une continuité : du brief à la période d’intégration des collaborateurs. On doit rester ce binôme, parce qu’après l’expérience candidat, il y a l’expérience collaborateur, et donc la marque employeur. » conclut-elle.

Le conseil pratique : associez le hiring manager à votre stratégie de sourcing. Il peut avoir dans son réseau des candidats qu’il pourrait être intéressant pour vous de rencontrer. Sans tomber dans le copinage bien évidemment.

Bien s’équiper pour bien recruter