Recruter avec l’IA : qu’en pensent les candidats ?

Alors que de plus en plus d’entreprises s’appuient sur l’intelligence artificielle pour recruter, les candidats sont partagés entre attirance et méfiance.

Deux tiers des entreprises utilisent l'IA pour recruter.
Deux tiers des entreprises utilisent l'IA pour recruter. © Murrstock/stock adobde.com

Selon une étude parue en août 2023, environ deux tiers des entreprises utilisent d’ores et déjà l’intelligence artificielle dans le cadre de leur process de recrutement. Que ce soit pour sourcer des candidats, trier des CV, rédiger des offres d’emploi ou préparer des trames d’entretien d’embauche.

Quelle perception les candidats ont-ils de cette nouvelle manière de recruter ? C’est ce qu’ont voulu savoir Maria Figueroa-Armijos, professeure associée en entreprenariat à l’EDHEC Business School et Serge da Motta Veiga, professeur en gestion des ressources humaines à Neoma Business School, auteurs de deux articles à ce sujet.

Des décisions plus objectives ?

68% des recruteurs estiment que des outils tels que ChatGPT ou Google Bard leur permettent de limiter leurs biais cognitifs, le plus souvent inconscients. Pourtant, l’expérience a montré que ces algorithmes pouvaient également discriminer certains candidats. Amazon, qui avait été l’une des premières entreprises à recruter avec l’IA en 2018, avait dû faire marche arrière, après la découverte de biais écartant certains groupes de candidats du processus d’embauche.

Même si la plupart des technologies travaillent à réduire ces biais, la possibilité d’une discrimination à l’embauche existe toujours, car l’algorithme s’entraîne sur des données qui peuvent, elles-mêmes contenir des biais. « Tous les systèmes qui impliquent des êtres humains sont biaisés d’une façon ou d’une autre, car les biais concernent tous les individus », explique Donncha Carroll, associé du département Revenue Growth d’Axiom Consulting Partners, au MagIT. Or ce sont des humains qui conçoivent les algorithmes et qui interprètent les résultats fournis par l’IA.

Une image d’entreprise innovante ?

Les travaux des deux chercheurs, relayés dans La Tribune, ont mis en évidence que plus les candidats considèrent l’intelligence artificielle comme éthique et efficace, plus leur confiance envers les employeurs qui l’utilisent pour leurs recrutements sera élevée. Ils soulignent que ce jugement éthique dépend de différents facteurs liés aux valeurs personnelles, à l’expérience et à l’acceptation de la technologie par les candidats.

Ces candidats considérant l’IA comme éthique seront plus enclins à postuler dans les entreprises ayant recours à cette technologie, car ils les jugent innovantes et attractives. À l’inverse, ceux qui mettent en doute l’éthique des décisions prises par l’algorithme seront moins tentés de candidater.

Une menace pour la vie privée ?

Les chercheurs montrent également que la perception des candidats dépend aussi de la finalité de l’utilisation de l’IA dans le cadre du recrutement. Si son usage pour établir l’adéquation d’un CV avec le descriptif du poste à pourvoir est globalement bien accepté par les candidats, son utilisation pour aller traquer leurs profils sur les réseaux sociaux ou analyser leurs comportements lors d’un entretien vidéo suscite davantage de défiance.

Les candidats redoutent, en effet, l’exploitation de leurs données personnelles par l’IA, et ont tendance à se détourner d’entreprises ayant ce type de pratiques.

L’humain doit rester au cœur du processus

En conclusion, les chercheurs constatent que « les candidats préfèrent encore être soumis à une décision humaine, ou à une collaboration entre l’homme et l’IA, plutôt que de voir leur sort influencé par une IA autonome ».

Selon eux, le développement de l’IA doit inciter les entreprises « à adopter une stratégie qui intègre systématiquement les perceptions positives des individus et leurs préoccupations en matière de risques dans leurs outils d’IA pour la gestion des ressources humaines ».

Visuel promo

Bien s’équiper pour bien recruter