Mutuelles : quelles stratégies RH pour faire face à la hausse des tarifs en 2025 ?
Découvrez les conseils de Catherine Colombie, experte en protection sociale au sein du cabinet Spartes, alors que les mutuelles s’apprêtent à augmenter de 8% à 12% leurs tarifs en 2025.
Le taux de remboursement des médicaments et des consultations médicales par la Sécurité sociale va baisser de 5% en 2025. C’est ce qu’a annoncé la ministre de la Santé, Geneviève Darrieusecq, en ouverture des débats sur le budget au Sénat, lundi 18 novembre.
Pourquoi les tarifs des mutuelles augmentent-ils ?
Cette hausse du « ticket modérateur » [la part de dépenses qui reste une fois le remboursement de l’Assurance maladie effectuée] devrait être, pour l’essentiel, prise en charge par les complémentaires santé, cofinancées par l’employeur et le salarié. « Cette hausse s’inscrit dans la continuité d’une volonté des gouvernements successifs, depuis trois ou quatre ans, de faire des économies pour contenir le déficit public sur le périmètre de la Sécurité sociale. La consommation française en matière de santé augmente plus vite que le PIB, c’est pourquoi l’Assurance maladie se désengage, partiellement, sur certains actes », décrypte Catherine Colombie, directrice associée du cabinet Spartes et experte en protection sociale. En 2023 déjà, la part de la Sécurité sociale dans le remboursement des soins dentaires était passée de 70% à 60%.
En parallèle, les tarifs des consultations de médecins généralistes et spécialistes ont augmenté, en novembre 2023, et devraient connaître une nouvelle hausse en décembre 2024. Enfin, le gouvernement a souhaité élargir le spectre du 100% santé, c’est-à-dire des soins sans reste à charge pour ceux qui bénéficient d’une complémentaire santé : « Certains actes qui n’étaient pas pris en charge à 100% le sont devenus, comme les prothèses auditives, dentaires, capillaires, et de nouveaux actes pourraient être concernés dans les années qui viennent », souligne Catherine Colombie.
« Toutes ces évolutions ont nécessairement eu un impact sur les mutuelles qui répercutent ces frais supplémentaires sur leurs tarifs, ce qui devrait représenter une hausse moyenne de 8% à 12% en 2025. Les salariés ne verront pas forcément l’impact de cette augmentation, mais, en réalité, ils seront mis à contribution, puisqu’ils cofinancent leur mutuelle avec leur employeur », rappelle l’experte.
Depuis 2016, tout employeur doit faire bénéficier ses salariés d’une couverture santé entreprise. L’employeur la finance au moins à hauteur de 50%, mais peut aller jusqu’à 100%, s’il le décide. « On est passé d’un modèle d’Etat providence à une individualisation de l’accès au soin en faisant peser cette charge sur l’employeur, analyse Catherine Colombie. Un contrat de mutuelle coûte environ 1 500€ par salarié et par an à une entreprise. Ce n’est pas neutre dans le budget d’une entreprise. D’où cette question des DRH en ce moment : est-ce que mon contrat vaut son coût ? »
5 bons réflexes pour limiter la facture
Le moment est venu de relire dans le détail le contrat de mutuelle de l’entreprise pour vérifier qu’il est bel et bien adapté aux besoins de celle-ci. Premier réflexe : regarder comment vos salariés consomment les soins. Catherine Colombie vous conseiller d’auditer la consommation médicale en masse de vos collaborateurs, de manière anonyme : « Vous pouvez regarder quels ont été, poste par poste, les montants engagés, la fréquence des actes médicaux, la part de remboursement de la Sécurité sociale. Ça permet d’aller voir les frais réels et d’éviter de payer pour des services que personne n’utilise ou très à la marge. »
Cet examen vous permettra de voir si votre mutuelle est la plus adaptée aux besoins de vos salariés ou s’il vaut mieux se tourner vers un autre assureur. Il sera aussi l’occasion de vous interroger sur les garanties supplémentaires de votre contrat : faut-il en supprimer, en ajouter ? « De plus en plus d’entreprises choisissent aujourd’hui de mettre l’accent sur la prévention, constate l’experte. Elles prennent donc des options qui permettent de prendre en charge la médecine douce, comme des séances d’ostéopathie, pour prévenir plus efficacement l’apparition de troubles musculo-squelettiques. Depuis quelques années, elles mettent aussi l’accent sur la santé mentale, à travers, en particulier, la prise en charge de consultations de psychologues. »
Intéressez-vous également à la structure de cotisation : « De nombreux contrats restent en taux famille, sur le modèle des contrats collectifs qui ont fleuri dans les années 1980, resitue la directrice associée du cabinet Spartes. Or, la réglementation a évolué et les schémas familiaux aussi. Il faut adapter ce taux de cotisation à la situation réelle des salariés (célibataire, en couple, avec ou sans enfant) et le faire évoluer au gré du temps, en ajoutant ou supprimant des ayants-droits. »
Catherine Colombie recommande également d’examiner les frais prélevés par les intermédiaires : assureur, gestionnaire, courtiers : « Soyez vigilant au fait qu’ils se rémunèrent à la juste valeur du service qu’ils vous apportent. »
Enfin, optez pour une politique de remboursement de frais de santé qui reflète vos valeurs : « A quoi sert votre contrat de mutuelle ? Qu’est-ce qui est important pour vous ? N’oubliez pas que c’est un élément de votre marque employeur. Créer une culture d’entreprise qui met au cœur la santé et le bien-être de ses salariés constitue une véritable opportunité d’attirer et de retenir vos talents ! »
Les salariés ne disent pas le contraire : 78% d’entre eux estiment l’entreprise légitime pour s’investir dans la prévention de la santé de ses collaborateurs et 46% jugent même que l’amélioration du bien-être au travail doit être un volet prioritaire de la politique RH, selon une étude Ipsos/Predlife de mars 2024.