Dans les tristes coulisses de Pôle emploi

183joursdanslabarbarieordinaireC’est un livre qui fait beaucoup parler de lui : « 183 jours dans la barbarie ordinaire », de Marion Bergeron, raconte l’histoire d’une jeune graphiste parisienne embauché en 2009 par Pôle emploi en tant que conseillère emploi. Faute de mieux, elle accepte ce CDD et nous entraîne dans une plongée effrayante au coeur d’une agence Pôle emploi de la banlieue parisienne. Ou plutôt une agence Anpe, car dans cet univers kafkaïen, la fusion entre les Assedic et l’Anpe n’est encore qu’une fiction.
« Une chimère de papier »
La réalité elle, est bien plus terrible : la violence verbale et physique des DE (demandeurs d’emploi) lui saute au visage dès ses premières heures de boulot. Comme dans l’Education nationale, les débutants sont en effet envoyés en première ligne, pour assurer l’accueil des « clients » sans aucune formation ni préparation. Elle doit aussi naviguer dans un labyrinthe de sigles comme seules les pires bureaucraties savent en inventer. Mais surtout, cette jeune conseillère se rend compte rapidement qu’il est impossible de faire son travail. « Le travail tel que nous sommes supposés l’exercer, n’existe pas. C’est une chimère de papier, les méthodes, les règles, les objectifs sont factices. Ils n’ont pas de sens. Ils sont irréalistes, inatteignables, inapplicables, illogiques ». A des années lumières des projets des gouvernants pour tenter de résorber le chômage.
« Asile de fous »
Ce qu’elle voit, c’est un système au bord de l’implosion permanente. Derrière son pupitre, elle évite les gifles, subit les insultes, et en ces temps de crise, la file d’attente ne désemplit pas. Quant aux collègues, ils sont aussi paumés qu’elle. Rares sont ceux qui arrivent à ruser avec les incohérences des outils informatiques. Le boulot commence à la miner, elle est laminée. La frustration, les larmes, les arrêts maladies… c’est le quotidien de Pôle emploi.

Son agence est un « asile de fous ». Elle essaie tant bien que mal d’orienter les demandeurs, même quand ils sont illettrés, incapables de faire un CV ou de se servir d’un ordinateur. Le tout pour un salaire de misère, certains de ses collègues touchant même le RSA. « Pôle emploi se résume tristement à des travailleurs pauvres, mal payés pour conseiller à d’autres travailleurs pauvres d’accepter un autre travail mal payé » écrit Marion Bergeron. Une lecture qu’il faudrait recommander au nouveau ministre du Travail…

« 183 jours dans la barbarie ordinaire. En CDD chez Pôle Emploi », de Marion Bergeron aux éditions Plon. 240 pages. 18,50 euros. Voir aussi le blog sur le livre et le blog de cette jeune graphiste.

Bien s’équiper pour bien recruter