Baisse des charges : une bonne nouvelle pour les salariés au Smic ?

Deux économistes missionnés par Matignon se penchent, depuis le mois de novembre, sur la question.

En France, un salarié sur cinq était payé au Smic en 2023.
En France, un salarié sur cinq était payé au Smic en 2023.

Et si le couplage entre seuils d’exonération des charges patronales et salariales, et aides publiques empêchait les bas salaires de progresser ? C’est sur cette question que se penchent deux économistes missionnés par Matignon depuis la fin novembre, Antoine Bozio, directeur de l’Institut des politiques publiques (IPP) et Etienne Wasmer, professeur à l’université New York Abu Dhabi.

Lors de la conférence sociale du 16 octobre, la Première ministre Elisabeth Borne annonçait sa volonté que « le travail paye mieux et de relancer la promotion sociale ». Une promotion sociale qui semble bien compliquée pour les salariés au Smic ou en-dessous du Smic. Car l’exercice est risqué politiquement soulignent Les Echos : comment concilier l’amélioration de la compétitivité des entreprises, la quête du plein-emploi et la hausse du pouvoir d’achat des personnes payées au salaire minimum ?

Des cotisations remises en question

Alors que le Smic a connu sa huitième augmentation en trois ans le 1er janvier 2024 (porté à 1 766,92 euros brut mensuel, soit une hausse de 19,72 euros), ce sont avant tout les cotisations qui posent question. En France, il existe trois seuils d’allègement des cotisations patronales, rappelle le journal économique. La réduction dégressive jusqu’à 1,6 Smic (ex-réduction Fillon sur les salaires de moins de 2 827,07 euros brut mensuel), la réduction de 6 points de cotisations maladies jusqu’à 2,5 Smic (bandeau maladie), et de 1,8 point de cotisations familiales jusqu’à 3,5 Smic (bandeau famille). Des exonérations qui se sont élevées à 74 milliards d’euros en 2022 selon un rapport des députés Marc Ferracci et Jérôme Guedj.

Trop chères et pas assez efficaces sur l’emploi ces cotisations ? C’est ce dont ont convenu les députés qui ont adopté, au mois d’octobre, la suppression du bandeau famille sur les hauts salaires (entre 2,5 et 3,5%). Des exonérations finalement conservées jusqu’à 2,5 Smic, par le gouvernement, dans son budget 2024 de la Sécurité sociale, adopté le 4 décembre 2023 par recours à l’article 49.3 de la Constitution.

Un travail d’équilibriste

Dans le viseur de l’Assemblée et des économistes, les deux et troisièmes tranches, car il n’est pas question de toucher aux bas salaires. Une diminution des exonérations au fur et à mesure que l’on se rapproche du seuil de 1,6 Smic est cependant envisagée. En effet, soulignent Les Echos, dans certains cas, l’employeur et son salarié n’ont pas intérêt à convenir d’une augmentation. Celle-ci entraine ainsi une hausse des charges pour l’entreprise ainsi qu’une diminution de la prime d’activité pour l’employé (maximum 1,5 Smic) et son éligibilité à l’impôt sur le revenu. « A ces niveaux de salaires, augmenter de 100 euros le revenu disponible peut nécessiter d’augmenter le coût du travail de 483 euros pour une personne seule sans enfants », précise la lettre de mission citée par le média. La solution considérée ? Adoucir la pente des exonérations jusqu’à 1,6 Smic et la durcir au-delà.

Un travail d’équilibriste attend donc Antoine Bozio et Etienne Wasmer. De son côté, le député Marc Ferracci suggère d’indexer le Smic sur une moyenne de minima de branches professionnelles et de permettre, aux petites ou jeunes entreprises de déroger à un accord de branche, en renforçant ainsi le pouvoir de négociation de leurs employés.

 

Crédit photo : Marko Novkov@stock.adobe.com

Bien s’équiper pour bien recruter