CDI senior : pourquoi la proposition fait débat

Remis sur la table par le patronat lors des discussions sur le Pacte de la vie au travail, le CDI senior est décrié par les syndicats.

Le gouvernement vise un taux d'emploi de 65% pour les 60-64 ans en 2030.
Le gouvernement vise un taux d'emploi de 65% pour les 60-64 ans en 2030. © Photographee.eu/stock adobe.com

Vers un retour du CDI senior ? On s’en souvient : la proposition d’un contrat dédié aux plus de 60 ans figurait dans le projet de loi de réforme des retraites. Mais la mesure avait été censurée par le Conseil constitutionnel, les Sages y voyant un « cavalier législatif », c’est-à-dire une disposition qui n’avait pas sa place dans le texte dans lequel le législateur souhaitait la faire figurer.

Pourtant, l’idée continue de faire son chemin, alors que le gouvernement vise un taux d’emploi de 65% des 60-64 ans d’ici 2030 (contre 36,2% en 2022). C’est le patronat qui l’a remise sur la table des négociations, jeudi 15 février, dans le cadre de ses discussions avec les syndicats sur le Pacte de la vie au travail.

Un contrat de travail réservé aux plus de 60 ans

Sa proposition ? Créer un contrat spécifique pour inciter à l’embauche des plus de 60 ans en exonérant les entreprises de certaines cotisations sociales. Cet outil permettrait « d’accompagner le salarié jusqu’à la retraite, éventuellement en cumulant ce CDI avec l’allocation-chômage différentielle, s’il est moins bien rémunéré par rapport à sa précédente activité », selon les mots du négociateur du Medef, Hubert Mongon. « Cela permettrait à l’employeur d’avoir une visibilité sur la date de départ, puisque la mise à la retraite serait possible dès l’obtention des conditions de retraite à taux plein, et non à 70 ans comme c’est le cas légalement aujourd’hui. »

Les organisations patronales souhaitent assortir ce contrat d’une suppression de la contribution spécifique de l’employeur de 30% au moment de verser l’indemnité de mise à la retraite du CDI senior. Et pour lutter contre un éventuel effet d’aubaine, un « délai de carence de six mois » serait mis en place entre un licenciement et une réembauche dans la même entreprise, a précisé le négociateur du Medef.

D’après une enquête menée par l’Association nationale des DRH début 2023, 64% des DRH se disent favorables à la création d’un tel contrat de travail. La présidente de l’ANDRH, Audrey Richard, y voit une « bonne initiative » qui peut rassurer l’employeur.

Les syndicats privilégient d’autres solutions

Les syndicats sont, en revanche, hostiles à l’instauration de ce nouveau contrat qui serait, selon Olivier Guivarch, le secrétaire national de la CFDT, « contradictoire avec le fait de dire qu’on lutte contre les stéréotypes » et « n’aurait pas d’impact sur le taux d’emploi » des seniors. Le secrétaire confédéral de la CFE-CGC, Jean-François Foucard redoute aussi la stigmatisation des demandeurs d’emploi de plus de 60 ans via un contrat qu’il dénonce comme une « pancarte lourde à porter ». Par la voix de sa secrétaire confédérale, Nathalie Bazire, la CGT s’est également prononcée contre « ce nouveau contrat qui ne [leur] va pas ».

Les syndicats privilégient d’autres leviers pour améliorer l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des seniors, à l’image d’un renforcement de la lutte contre les discriminations à l’embauche liée à l’âge, d’une augmentation des coûts d’une rupture conventionnelle pour un senior, d’une réduction du temps de travail des plus de 55 ans ou d’un meilleur accompagnement des fins de carrière.

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