Travail hybride : quelles pratiques pour les entreprises en Europe ?
D’une obligation pendant la pandémie, le travail hybride est désormais devenu un choix stratégique pour les entreprises européennes.
Dans le cadre d’une étude (*) menée dans l’Europe des Vingt-Sept, la fondation Eurofound (**) a récolté les données d’institutions et entreprises sur le travail hybride. Le but ? Tenter de définir ce concept à travers l’analyse des pratiques des entreprises, avant et pendant la pandémie de Covid-19.
Une définition du travail hybride
Qu’est-ce que le travail hybride ? Selon Eurofound, la discussion autour de cette notion a pris forme peu après la première phase de la pandémie, à l’automne 2020. Et sa définition reste encore floue. Pourtant, le terme (hybrid work pour nos amis anglosaxons) est devenu tellement commun qu’il a été élu mot de l’année 2022 par le magazine britannique The Economist.
Au total, Eurofound a comptabilisé 93 définitions différentes dans les 27 pays, c’est dire que le sujet pose question. Mais les similarités entre ces descriptions sont nombreuses : généralement, le travail hybride est décrit comme une organisation flexible en termes de situation, de localisation et de temps. Il peut être effectué en partie dans les bureaux de l’employeur et en partie à la maison (ou ailleurs) à l’aide d’outils digitaux pour faciliter la communication et la coopération des équipes.
Télétravail : des spécificités européennes
Avant la pandémie, on pouvait noter de larges différences sur l’instauration du télétravail entre les pays européens. En cause ? Une variété de facteurs comme le métier, le genre, l’organisation du travail, l’encrage profond de certaines pratiques managériales ou de certaines lois. Cité par Eurofound, Sostero et al (2020) a notamment estimé que la proportion d’emplois possibles en télétravail pouvait varier de 33 % à 44 % selon les membres de l’UE.
L’organisation du travail questionnée
Toutes les études convergent cependant sur le même point selon Eurofound : l’utilisation des outils digitaux et des plateformes de collaboration devraient augmenter la pratique du télétravail. Mais, avec la popularisation du terme « travail hybride », c’est toute l’organisation du travail qui a plus largement été questionnée par les entreprises.
En fonction des entreprises et des pays, des caractéristiques plus personnalisés ont été définies pour le télétravail et ont mis en lumière des besoins de formaliser des accords sur la flexibilité du travail, de prévenir l’isolation, et de s’interroger sur le bien-être, l’équilibre vie pro – vie perso ou encore sur l’investissement des dirigeants.
De multiples défis…
Dans toute l’Europe, les entreprises ont dû organiser le télétravail à grande vitesse au début de l’année 2020. Quoique généralement bien perçu par salariés et dirigeants, le télétravail a aussi annoncé de nouveaux défis comme celui de pallier des conditions de travail inadéquates, une mauvaise ergonomie des espaces de travail ou encore un manque d’outils d’information et communication.
Les entreprises ont également dû faire face à la « Zoom fatigue » des salariés provoquée par l’utilisation prolongée des outils digitaux, l’équilibre pas toujours évident travail/famille et a contrario, l’isolement de certains collaborateurs. D’autres questions épineuses liées au travail à domicile ont été soulevées, comme la performance du matériel informatique et, par extension, la sécurité des données de l’entreprise.
… mais de nombreux avantages
Si la mise s’est avérée plus ou moins compliquée, qu’est-ce qui a motivé les entreprises à continuer sur cette voie ? Selon Eurofound, elles ont été nombreuses à observer les bénéfices et l’impact positif du travail hybride en termes de performances, d’équilibre vie professionnelle/vie privée ou de réduction du stress des employés. Elles ont aussi observé une baisse du coût de leur activité, notamment liée à une diminution substantielle des coûts alloués aux bureaux.
Un autre point mentionné par Eurofound, le développement durable. En effet, certains contributeurs ont évoqué les bénéfices environnementaux du travail hybride. L’accent a notamment été mis sur la réduction des déplacements des salariés et donc des émissions de CO2.
Derrière la définition, des pratiques variées
Eurofound liste quelques exemples de pratiques populaires en Europe : deux jours de travail à la maison et trois au bureau, une demi-journée au bureau et l’autre à la maison, un maximum de 35 jours télétravaillés par an ou encore une alternance hebdomadaire entre la maison et le bureau.
Des outils pour faciliter la mise en place du travail hybride
Les entreprises ont choisi d’actionner différents leviers pour rendre possible ces nouvelles organisations. Dans la majorité des cas, il s’agissait de l’utilisation d’outils technologiques mais il pouvait aussi s’agir d’un système de réservation de bureau dans les locaux, de formations pour les managers, d’aide à l’achat de fournitures ergonomiques à destination des employés ou également de nouveaux systèmes de soutien psychologique.
Des bureaux transformés
Autre initiative populaire chez les entreprises européennes : faire évoluer les locaux. De nombreux exemples mettent notamment en lumière un besoin de plus de salles de réunion, et moins de bureaux individuels.
Si certaines ont transformé leurs bureaux, d’autres ont choisi de déménager ! Elles ont privilégié des bureaux plus petits ou ont même choisi des locaux plus centraux afin de se rapprocher des lieux de vie de leurs salariés. Des entreprises sont même allées jusqu’à construire des hubs dans des endroits plus reculés pour leurs employés qui vivaient très loin du bureau.
Surtout, les entreprises ont bien compris que des conditions de travail flexibles leur permettaient d’attirer de nouveaux, et souvent jeunes, salariés !
(*) Hybrid work in Europe: Concept and practice, Publications Office of the European Union, Luxembourg. Les données de cette étude ont été récoltées auprès des entreprises, pendant la seconde année de la pandémie, en 2021. Eurofound a relevé 80 exemples d’implémentations du travail hybride, dans 21 secteurs d’activité différents dont la finance, l’information-communication, l’assurance, l’administration publique ou les services.
(**) Eurofound est une fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail. Cette agence tripartite a pour rôle de « fournir des connaissances en vue de définir des politiques plus éclairées dans le domaine social et en matière d’emploi et de travail ».