Pourquoi un tiers des actifs n’est plus en emploi avant même l’âge de la retraite ?

Après des semaines de débats autour de l’augmentation de l’âge légal de départ à la retraite, une récente note d’analyse de France Stratégie met en lumière les sorties précoces de l’emploi des séniors par catégorie professionnelle. Tout métier confondu, environ 30% des actifs n’atteignent pas l’âge légal de départ au moment où ils quittent leur emploi.

Une fin de carrière sur trois concernée

Tous les ans, « environ 30% des départs en fin de carrière ne relèvent pas d’un passage immédiat de l’emploi vers la retraite ». C’est le principal enseignement de cette étude de France Stratégies, qui a étudié à la loupe les fins de carrière selon les métiers entre 2004 et 2019. De fait, comme le précise France Info, le taux d’emploi des séniors en France est en effet l’un des plus faibles d’Europe, 56,9% contre 62,4% pour la moyenne de l’union européenne.

Trois raisons principales expliquent ces sorties précoces selon l’organisme public : les raisons de santé, le chômage et l’inactivité. Les raisons de santé représentent 10 % de ces départs, le chômage 4 % et les autres situations d’inactivité 15 %. Or, comme le précise la note d’analyse, « les chances de retour à l’emploi avant le passage à la retraite sont très faibles » : dans neuf cas sur dix, lors d’un départ pour un autre motif que le chômage, la sortie de l’emploi est définitive. Concernant le chômage, à partir de 59 ans, 15% des actifs seulement parviennent à retrouver un emploi dans les dix-huit mois qui suivent.

Un départ plus précoce pour les métiers les moins qualifiés

Si la proportion de sorties précoces de l’emploi apparaît très hétérogène selon les catégories socio-professionnelles, elles sont d’autant plus importantes parmi les faibles qualifications : 21% chez les cadres contre 46% chez les ouvriers peu qualifiés. Une surreprésentation qui s’explique en grande partie par « les conditions de travail et les modes de gestion de la main-d’œuvre » précise France Stratégie.

Sur les vingt métiers les plus concernés, le taux de départs précoces oscille entre 40% et 60% – contre 30% de moyenne sur l’ensemble. Des sorties de l’emploi anticipées qui concernent majoritairement des employés ou ouvriers : hébergement-restauration, bâtiment, services aux particuliers et aux collectivités, manutention. L’âge auquel ces professionnels quittent leur emploi varie en revanche selon les métiers : 57 ans en moyenne pour un ouvrier peu qualifié ou un caissier contre 60 ans pour un assistant maternel ou un professionnel de l’hôtellerie.
A l’autre bout du spectre, avec un taux de sortie précoce compris entre 3% et 25%, on retrouve les cadres de banque, les enseignants, les ingénieurs et cadres d’industrie, les médecins ou encore les personnels d’étude et de recherche.

Parmi les principales solutions évoquées par France Stratégie pour lutter contre ces disparités, l’amélioration des conditions de travail pour les professions les plus touchées par les départs avant la retraite pour raisons de santé. Parmi celles-ci, on retrouve notamment les « conducteurs de véhicules, les ouvriers qualifiés du bâtiment et des travaux publics, certains ouvriers qualifiés de l’industrie (métallurgie, bois, textile et cuir), les aides-soignants et les employés de services à la personne et à la collectivité, tels les aides à domicile, les agents d’entretien ou les agents de gardiennage et de sécurité ». Un sénior sur trois entre 50 et 69 ans exerce l’un de ces métiers.

Et les employeurs rencontrent justement des difficultés de recrutement « fortes à très fortes » pour les trois quart de ces professions ! Selon France Stratégie, « pour que ces professionnels retardent l’âge de la liquidation de leur pension de retraite et contribuent ainsi à augmenter le taux d’emploi et réduire les difficultés d’embauche, il faudrait aussi améliorer les conditions de travail – voire de salaires – et prévenir l’usure professionnelle (réorganisation des horaires de travail, du processus de production, etc.). »