Le « resenteeism » : quand la résignation devient un poison

Le mot RH de la semaine. Vesna Pajovic, experte en recrutement au Mercato de l’Emploi, pointe du doigt un type de comportement problématique pour l’entreprise et livre des clés pour y remédier.

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Le « resenteeism » a un impact direct sur la productivité et l'innovation. © snedorez/stock adobe.com

 

« Rester à son poste par défaut, en “rongeant son frein” et en cultivant une forme de ressentiment… Tel est le principe du resenteeism. Un mal sournois de notre époque que les RH peuvent combattre pour garantir l’épanouissement des talents et la performance collective de l’entreprise. »

Le concept

« Le resenteeism, contraction de resentment (ressentiment) et d’absenteeism (absentéisme), survient lorsque des collaborateurs, insatisfaits et démotivés, choisissent de rester dans leur poste par défaut. Ils ne démissionnent pas, mais ils sont émotionnellement absents. Ce n’est pas de l’absentéisme, puisqu’ils sont physiquement présents, ni du quiet quitting, car la motivation est différente. Le salarié en situation de resenteeism est animé par un sentiment de ressentiment profond vis-à-vis de son travail, de son manager ou de son entreprise, mais il n’a pas l’énergie ou les perspectives pour partir. Cette situation est d’autant plus préoccupante en 2025. Avec un marché de l’emploi moins dynamique, de nombreux salariés se retrouvent dans une position de vulnérabilité. La peur du changement, la difficulté à trouver un emploi équivalent ou la crainte de ne pas retrouver les mêmes avantages les retient. Le resenteeism est ainsi la conséquence directe d’un environnement économique qui restreint les options et renforce la résignation. »

Pourquoi c’est notre problème de RH

« Ce phénomène est un véritable poison pour l’entreprise. Il a un impact direct sur la productivité et l’innovation. Un salarié qui vit dans le ressentiment n’est pas engagé, il fait le “minimum syndical”, et sa performance est inévitablement en berne. Le resenteeism est un mal silencieux qui affecte la culture d’entreprise, car la démotivation est contagieuse et peut se propager au sein des équipes, minant le moral et la cohésion. En tant que RH, notre rôle est d’aller au-delà des chiffres et des indicateurs de performance. Nous devons nous interroger sur les causes de ce mal-être. Les raisons peuvent être multiples : un manque de perspectives d’évolution, un management toxique, un déséquilibre vie pro/vie perso, ou une perte de sens au travail. Face à ces constats, nous devons agir proactivement. »

Comment agir face au « resenteeism » ?

« Il ne s’agit pas de juger ces salariés, mais de comprendre leur situation et de leur offrir des solutions. Voici les axes sur lesquels il est possible d’agir :

  • libérer la parole en créant des espaces de dialogue réguliers et sécurisants : les managers doivent être formés pour détecter les signaux faibles de détresse et pour engager des conversations honnêtes ;
  • investir dans le développement en offrant des formations ciblées et des plans de carrière clairs : un salarié qui se sent grandir et évoluer dans l’entreprise aura moins de raisons de nourrir de la frustration ;
  • repenser le management : le manager de proximité est la pierre angulaire de l’expérience collaborateur. Un management de confiance, bienveillant et axé sur la reconnaissance peut faire des miracles ;
  • améliorer la qualité de vie au travail (QVT) : au-delà des bénéfices, la QVT passe par un environnement de travail sain, le respect du droit à la déconnexion, et une réelle flexibilité ;
  • assurer une meilleure mobilité interne en écoutant les talents qui “végètent” dans un poste pour mieux se réinventer ailleurs. »

« Le resenteeism est le symptôme d’une relation employé-employeur abîmée. L’employeur a le devoir de rétablir la confiance et de redonner de l’élan à ses équipes. Il ne faut pas laisser la résignation s’installer. C’est en cultivant l’engagement, l’écoute et le développement que les RH peuvent faire la différence. »

Bien s’équiper pour bien recruter