Votre budget RH est-il dans la moyenne ?
Une entreprise sur deux consacre moins de 5% de son budget global à la fonction RH. Un signal préoccupant alors que les directions RH sont appelées à piloter des chantiers lourds.
À l’heure où les entreprises rencontrent des difficultés à stabiliser leurs équipes et à absorber les transformations successives (IA, réorganisations, évolution des métiers), une question revient avec insistance dans les directions RH : avons-nous réellement les moyens de nos ambitions ?
Une étude* menée par Wobee, Yaniro et Un Vent Nouveau livre une photographie rare et très concrète des budgets RH en 2025. La conclusion semble limpide : les moyens sont modestes, parfois fragiles, mais leur impact dépend bien plus de la gouvernance que de leur montant.
Des investissements RH qui restent faibles
La moitié des organisations (51%) consacre moins de 5% de leur budget global à la fonction RH. Une proportion importante qui confirme combien les investissements restent modestes au regard des enjeux de recrutement, de montée en compétences et de fidélisation. Seuls 19% des répondants dépassent la barre des 10%, un seuil plus aligné avec les ambitions de transformation continue que les entreprises se fixent aujourd’hui.
Mais derrière chaque euro non investi se cachent des coûts bien plus élevés : turnover, départs regrettables, retard de compétences, impact sur la performance. Le paradoxe se joue ici : les entreprises investissent faiblement dans les RH, quitte à en supporter des conséquences qui peuvent se révéler coûteuses.
Des budgets qui varient fortement selon la taille de l’entreprise
L’étude montre des écarts importants en fonction de la taille des organisations :
- 50 000€ pour les structures de moins de 10 salariés ;
- 325 000€ entre 10 et 49 salariés ;
- 500 000€ entre 50 et 249 salariés ;
- Plus de 2,3 millions d’euros de 1 000 à 5 000 salariés.
Rapportés au nombre de collaborateurs, ces montants révèlent un phénomène structurel. Plus une entreprise est petite, plus son budget RH par salarié est élevé, faute d’économie d’échelle ou d’outillage capable d’automatiser les tâches.
L’opacité budgétaire : un angle mort stratégique
38% des répondants ne connaissent même pas leur budget RH. Ce chiffre interpelle. Comment piloter une fonction stratégique sans visibilité sur ses moyens ? Cette méconnaissance révèle un enjeu de maturité : sans visibilité financière, difficile de construire une stratégie RH crédible face aux directions générales et financières.
Sans maîtrise budgétaire, impossible de défendre des investissements structurants, d’arbitrer entre urgence et importance, ou de démontrer le ROI de ses actions RH. Cette méconnaissance constitue un frein majeur à la réussite de la fonction.
L’autonomie, premier facteur d’impact
L’étude montre que près d’un tiers des budgets RH sont décidés par le Comex ou le Codir, tandis qu’un autre tiers est arrêté sans même consulter le DRH. En d’autres termes, la fonction RH ne maîtrise pas toujours les moyens censés lui permettre d’agir.
Or, cette absence d’autonomie n’est jamais neutre. Comme le rappelle l’étude, « plus la décision est centralisée hors RH, plus la fonction se cantonne à l’administratif. À l’inverse, si les RH sont plus autonomes, cela démultiplie l’innovation et la cohérence d’exécution, à budgets constants. »
L’impact ne vient donc pas tant d’une question d’argent que de positionnement politique. C’est précisément en plaçant les RH au niveau stratégique, en leur donnant voix au chapitre dans les arbitrages business, que les organisations les plus performantes parviennent à obtenir davantage, même avec moins.
Des contradictions entre budget alloué et enjeux actuels
En 2024, près de 40% des entreprises ont vu leur budget RH réduit en cours d’année, indique encore l’étude. L’arbitrage en faveur d’autres départements est cité comme le premier obstacle rencontré lors de l’élaboration du montant alloué (24%). Un signal préoccupant dans un contexte où les directions RH sont appelées à piloter des chantiers lourds :
- Intégration de l’IA ;
- Adaptation aux nouvelles obligations (directive européenne sur la transparence salariale, IA Act) ;
- Gestion des pénuries de compétences ;
- Fidélisation des talents dans un marché sous tension.
Aussi, plus de la moitié des sondés (53%) jugent leur budget insuffisant, voire très insuffisant par rapport aux besoins réels. Ils sont également 44% à estimer que leurs moyens humains sont sous-dimensionnés. Concrètement, « le risque de surcharge, de baisse de la qualité du service RH ou de tensions sur la mise en œuvre des projets » est très présent.
Comment sont utilisés les budgets ?
Les quatre principaux postes de dépenses RH révèlent une orientation assez court-termiste, regrette l’étude :
- Le recrutement : une priorité absolue dans un contexte de guerre des talents ;
- La formation : un investissement contraint par l’obsolescence accélérée des compétences ;
- Les avantages salariés : un levier de rétention face à l’inflation et aux nouvelles attentes des collaborateurs ;
- Les systèmes d’information RH (SIRH) : une infrastructure indispensable.
Elle montre que l’énergie et les moyens sont grandement captés par la nécessité de recruter en continu, souvent pour compenser un turnover élevé. Dans un même temps, les leviers de rétention (onboarding, communication interne, outillage, formation managériale) sont sous-investis. Un cercle vicieux, qui prouve que moins l’on investit dans la fidélisation, plus il faut recruter. Et plus il faut recruter, moins il reste de budget pour la fidélisation.
Les RH, un moteur de performance, pas un centre de coûts
L’étude révèle une fonction RH encore sous-dotée, souvent cantonnée à l’opérationnel, alors même qu’elle joue un rôle déterminant dans la performance globale. Les organisations les plus avancées ne dépensent pas forcément plus, elles dépensent mieux. Elles accordent plus d’autonomie à leurs équipes RH, investissent dans les fondamentaux plutôt que dans l’urgence permanente. Car au-delà du montant des budgets, c’est la qualité du pilotage qui fait véritablement la différence.
*étude menée auprès de plus de 250 organisations et professionnels RH, enrichis d’entretiens qualitatifs.