Semaine de quatre jours : les leçons à tirer du test allemand
Après le Royaume-Uni, l’Allemagne a mené la deuxième plus grande vague de tests de la semaine de travail de quatre jours en Europe.

La semaine de quatre jours : argument pour attirer des talents ou fausse bonne idée ? Occasion pour optimiser ses process ou contrainte organisationnelle ? Vecteur d’amélioration du bien-être au travail ou accroissement de la charge de travail ? Les avis des employeurs sont souvent tranchés sur la question !
Rien de tel que la preuve par l’exemple pour « démystifier certaines croyances », selon Philippe du Payrat, co-fondateur de 4jours.work, qui représente le 4 Day Week Global en France. En l’espèce, celui de l’Allemagne, qui vient de mettre un terme à son pilote national de six mois (entre janvier et juin 2024), est édifiant.
Pourquoi ces 45 entreprises allemandes qui ont pris part à l’expérimentation ont-elles souhaité tester la semaine de quatre jours ? D’abord pour se rendre plus attractives (cité par 89% du panel), mais aussi pour améliorer le bien-être de leurs collaborateurs (77%) et accroître leur productivité (57%).
Sur les trois tableaux, le test a été plutôt concluant. C’est pourquoi 73% des entreprises qui ont participé ont décidé de pérenniser la semaine de quatre jours à l’issue de la phase d’expérimentation. Quelles conclusions tirer de la deuxième plus grande vague de test de la semaine de quatre jours à l’échelle de l’Europe, alors que la France s’apprête à lancer son propre pilote, en décembre ?
Une amélioration de la santé physique et mentale des salariés
Outre-Rhin, 90% des entreprises ont constaté une amélioration du bien-être général de leurs salariés après le passage à la semaine de quatre jours. Cette nouvelle organisation s’est notamment accompagnée d’une diminution du stress et de davantage de temps consacré au sommeil et à l’activité physique.
Fait étonnant, les scientifiques allemands ont décidé de mesurer le niveau de stress à l’aide d’une montre connectée et du prélèvement de mèches de cheveux des salariés ! De manière générale, les salariés ont utilisé ce jour off supplémentaire pour prendre soin d’eux, se consacrer à leurs hobbies et multiplier les interactions sociales.
Une productivité stable ou en hausse
Dans ces entreprises, en réduisant le temps de travail hebdomadaire, le niveau de production est resté identique. Ce qui signifie que les équipes ont maintenu voire accru leur productivité. Dans le détail, sur la base de 38,7 heures de travail effectif par semaine :
- 46% des entreprises ont réduit leur temps de travail hebdomadaire de 4h
- 20% de 4 à 7h
- 34% de plus de 7h
« Ces chiffres démontent le préjugé, également prégnant en France, selon lequel c’est le volume horaire qui fait le chiffre d’affaires de l’entreprise. En passant à la semaine de quatre heures, les entreprises n’ont perdu ni en rentabilité ni en compétitivité », constate le co-fondateur de 4.jours.work.
Moins d’absentéisme et de turnover
Les indicateurs RH sont, eux aussi, au vert. Les employeurs allemands ont enregistré une baisse de 11 points du taux d’absentéisme sur la durée du pilote. 53% des dirigeants estiment, par ailleurs, que cette expérience a eu un impact positif sur la rétention de leurs collaborateurs.
Des process repensés pour gagner en efficacité
Comment les entreprises ont-elles réussi à maintenir leur niveau de production sans que cela n’entraîne de charge de travail supplémentaire ? 65% d’entre elles ont réduit les distractions, 63% ont amélioré leurs processus, 52% ont repensé les réunions, 32% ont boosté les périodes de concentration, 25% ont eu recours à des solutions de digitalisation.
La semaine de quatre jours peut convenir à tous… à condition de trouver le bon modèle
Les entreprises allemandes qui ont pris part à cette expérience appartenaient à des secteurs aussi variés que le conseil, l’industrie, l’IT, la santé ou encore les médias. 60% des entreprises cobayes l’ont expérimentée à l’échelle de leur organisation, quand 40% ont préféré le faire au niveau d’un service ou d’un type de métier.
La plupart des entreprises ont opté pour un jour de travail en moins par semaine, quand d’autres ont préféré supprimer une demi-journée de travail hebdomadaire ou alterner entre semaine de quatre et de cinq jours.
Cela prouve qu’il existe tout une palette d’adaptation de la semaine de quatre jours en fonction de son activité et de sa culture d’entreprise. « D’ailleurs, parmi les entreprises qui ont souhaité pérenniser la semaine de quatre jours, 15% ont adapté ses modalités après la phase de test », précise Philippe du Payrat.
Un constat que partage la mission parlementaire française consacrée à la semaine de quatre jours en France, dont les résultats ont été communiqués le 16 octobre. « Globalement, ça fonctionne partout et notamment dans des secteurs où l’on aurait pu penser a priori que ce serait plus compliqué. Je pense notamment aux travaux publics ou aux métiers de la production », a indiqué Stéphane Viry, député Liot, co-rapporteur d’une mission d’évaluation à ce sujet. Selon les auteurs du texte, la semaine de quatre jours « mérite d’être mise en œuvre, autant qu’il soit possible », même si « ce n’est pas la panacée. C’est la raison pour laquelle il ne faut pas de loi pour la rendre obligatoire ».
Aujourd’hui, en France, seules 150 entreprises ont fait le choix de passer à la semaine de quatre jours.
Un pilote français lancé en décembre
« Les résultats du pilote allemand sont intéressants car le panel d’entreprises partage de nombreuses similitudes avec l’échantillon français : volume d’heures de travail hebdomadaires moyen, taille des entreprises participantes, motivations des employeurs, productivité initiale », liste Philippe du Payrat. « A travers ce pilote, nous souhaitons démocratiser la semaine de 4 jours, en particulier auprès des PME françaises, en dispensant une formation complète (juridique, RH, stratégique, opérationnelle) avec le soutien de l’EM Lyon Business, la CFE CGC et B-Corp, entre autres. »
Vous souhaitez participer au pilote ? Rendez-vous sur 4jours.work. Et si vous vous demandez si vous êtes prêt à passer à la semaine de quatre jours, faites votre diagnostic.